Mettre en place des conditions générales de vente
Conditions générales de vente : une obligation entre professionnels
Un paradoxe. La rédaction des conditions générales de vente (CGV) n’est pas obligatoire. Toutefois, elles doivent être communiquées à tout acheteur professionnel qui en fait la demande… Par voie de conséquence, bien que non obligatoire, la rédaction des CGV est fortement conseillée, d’autant que le défaut de communication est sanctionné : votre responsabilité pourra être engagée et vous pourrez être recherché en réparation du préjudice causé.
Une obligation entre professionnels... Voici ce qu’imposent les textes : « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services qui établit des conditions générales de vente est tenue de les communiquer à tout acheteur qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Cette communication s'effectue par tout moyen constituant un support durable ».
... mais aussi envers les particuliers ? De nombreuses entreprises ont rédigé des CGV qu’elles opposent à l’égard de leur client particulier même si leur rédaction n’est pas obligatoire. Pour que ces CGV soient opposables au client particulier, il est nécessaire que vous les ayez portées à sa connaissance et qu’il les ait acceptés. Son acceptation devra être matérialisée, pour des raisons de sécurité juridique, par un écrit. En pratique, il est donc nécessaire de faire apparaître vos CGV sur vos bons de commande ou sur vos devis. Notez qu’en cas de contradictions entre vos conditions générales et des éventuelles conditions particulières, ces dernières l’emporteront sur les conditions générales.
À noter. Dans le cadre de cette fiche, seules les obligations de mise en place et de communication des conditions générales de vente établies entre clients professionnels seront abordées.
Le saviez-vous ?
La Loi Hamon rappelle le principe suivant : « les conditions générales de vente constituent le socle unique de la négociation commerciale ». En substance, il faut comprendre que :
- si vous pouvez prévoir des conditions particulières de ventes, elles ne sont admises que dans le cadre de cette négociation commerciale ;
- un distributeur ne pourra pas écarter les conditions générales de vente d’un vendeur en vue d’imposer ses propres conditions d’achat.
Une communication obligatoire. S’il le souhaite, votre client professionnel doit donc obtenir, auprès de vous, communication de vos CGV sur simple demande : faites donc en sorte que vos CGV soient établies sur un document écrit prêt à être communiqué, notamment par voie informatique. Cette communication peut se faire par tous moyens, l’essentiel étant que vous soyez en mesure de prouver que vos CGV ont effectivement été communiquées à votre client : vous ne pourrez faire valoir vos CGV que si l’acheteur en a eu connaissance et les a effectivement acceptées.
Attention. Un professionnel a inséré dans une confirmation de commande une clause selon laquelle le client reconnait avoir reçu les conditions générales de vente. À la suite d’un litige soumis à son avis, le juge a toutefois considéré que cette information ne permettait pas de considérer que le client en avait eu connaissance.
Pratiques utilisées. Il vaut donc mieux éviter les clauses de style, qui seraient dénuées de valeur, et vous assurer que vos clients ont effectivement pris connaissance de vos CGV. Vous pourriez, par exemple, les reproduire et faire signer l’exemplaire vous revenant en faisant préciser que votre client déclare avoir pris connaissance des CGV et les accepter sans réserve. Une autre pratique consiste également à les reproduire sur les confirmations de commande, les bons de livraison, les devis et les factures, en vous assurant que vos clients déclarent expressément avoir pris connaissance des CGV et les accepter sans réserve.
Bon à savoir. Une société a mentionné ses CGV au verso de ses factures. Mais elle ne s’était pas assuré que son partenaire commercial déclare expressément avoir pris connaissance desdites CGV et les ait acceptées sans réserve. Malgré cela, le juge a considéré que le partenaire commercial avait tacitement accepté les CGV, par ailleurs correctement rédigées, car leur relation d’affaires avait duré 8 ans et avait donné lieu à l’établissement de 120 factures.
Et sur le net ? En cas d’achats professionnels sur Internet, il faut savoir que les CGV s’imposent à vous si vous les avez acceptées d’un simple clic (c’est ce qu’a décidé la Cour de Justice de l’Union Européenne qui considère que l’important reste que l’entreprise puisse avoir eu la possibilité de consulter les CGV et de les imprimer ou de les sauvegarder avant de passer sa commande).
Le saviez-vous ?
Faites en sorte que vos CGV soient écrites en termes clairs, lisibles et apparents de sorte que l’on ne puisse pas se retrancher derrière leur caractère incompréhensible ou illisible pour les contester. Il n’est, à cet égard, pas inutile de faire ressortir les clauses importantes pour attirer spécialement l’attention de vos clients.
Une différenciation possible selon les catégories de clients. Vous avez la possibilité de mettre en place des CGV différenciées selon différentes catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de services. Il est ainsi possible d’imaginer des CGV spécifiques aux clients grossistes, des CGV spécifiques aux commerces de proximité, des CGV spécifiques en cas de recours à la vente à distance, etc. Si vous recourez à des CGV catégorielles, l’obligation de communication portera sur les CGV applicables aux acheteurs de produits ou aux demandeurs de prestation de services d'une même catégorie.
Conditions générales de vente : un contenu minimal obligatoire
Un contenu obligatoire, sous peine d’amende. Lorsque vous formalisez vos CGV, vous êtes tenu d’y insérer des clauses obligatoires : si vous n’indiquez ou ne respectez pas les mentions que doivent légalement comporter les conditions générales de vente, vous encourez une amende administrative de 15 000 € (pour une personne physique) ou de 75 000 € (pour une société). Autant s’accorder un peu de temps pour vérifier si vos CGV comportent le minimum requis…
Des mentions obligatoires. Vos CGV doivent, a minima, apporter des précisions sur les conditions de vente (délais et coût de livraison, modalités de retour des marchandises, etc.), les conditions de garantie (prévoir notamment la mention selon laquelle le vendeur est tenu des défauts de conformité ou des défauts cachés), le barème des prix unitaires, les réductions de prix et les conditions de règlement.
Le saviez-vous ?
Dans le cadre des conditions de règlement, vos CGV doivent notamment faire apparaître les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur votre facture.
En outre, vous devez mentionner le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement (le montant minimum étant fixé à 40 €) dans l’hypothèse où les sommes dues sont payées en retard.
Bon à savoir. S’il est prévu une procédure d'acceptation ou de vérification permettant de certifier la conformité des marchandises ou des services au contrat, la durée de cette procédure doit être fixée conformément aux bonnes pratiques et usages commerciaux. En tout état de cause, cette durée ne doit pas excéder 30 jours à compter de la date de réception des marchandises ou de réalisation de la prestation des services (à moins qu'il n'en soit expressément stipulé autrement par contrat et pourvu que cela ne constitue pas une clause ou pratique abusive).
Pensez à d’autres clauses… Cette liste n’est évidemment pas limitative. Il est même conseillé de ne pas se limiter à ces seules informations. Il ne faut pas oublier que la finalité des CGV est de clarifier les relations avec vos clients et donc, in fine, de limiter autant que possible les éventuelles contestations, sources de litiges. Vous pourriez, par exemple, prévoir d’insérer :
- une clause prévoyant la validation préalable des commandes qui prévoira que la commande ne sera réputée acceptée que lorsque l’entreprise en aura accusé réception ;
- une clause de réserve de propriété qui stipulera que vous conservez la propriété du bien vendu jusqu’au paiement complet du prix par le client ;
- si vous exercez votre activité dans un cadre international, il peut être utile d’insérer une clause précisant que la Loi applicable à vos opérations est la Loi française ;
- une clause attributive de juridiction, de manière à spécifier que tout litige sera porté devant le tribunal compétent du ressort du siège de votre entreprise, ceci afin d’éviter de voir les litiges portés devant les tribunaux compétents du ressort du siège de vos clients (elle doit être spécifiée de façon très apparente : à défaut, elle peut être considérée comme nulle).
Dans tous les cas, personnalisez vos CGV ! Une entreprise ne ressemble à nulle autre : il est impératif que vos CGV correspondent à vos propres spécificités. Pour paraphraser le Code de commerce, les CGV « constituent le socle unique de la négociation commerciale ». Parce qu’elles vont prévoir, définir, régler, anticiper les conditions commerciales et financières dans lesquelles vos clients pourront traiter avec vous, elles doivent être adaptées à votre activité et vos modalités de fonctionnement. Cela passera peut-être par une étude de vos pratiques commerciales et le recours à des spécialistes de la rédaction des CGV, mais ce peut être là un investissement qu’il ne faut pas négliger.
Le saviez-vous ?
Le contenu des CGV a un caractère impératif pour les entreprises, de sorte que les clauses et leur contenu s’imposent à elles.
Pour la petite histoire. Mais attention tout de même au libellé de vos CGV et aux conditions que vous y insérez. Une société commercialisant des voitures a fait mentionner dans ses CGV que les ventes seraient définitives après que les clients aient réceptionné un avis de confirmation envoyé par lettre recommandée avec AR, après réception d’un acompte. Parce que la société n’a pas respecté ce formalisme qu’elle s’est elle-même imposée, un client a pu faire annuler la vente d’une voiture, alors qu’il avait déjà versé un acompte, parce que la société avait envoyé son avis de confirmation par un simple mail.
Conditions générales de vente : pour les prestataires de services
Des obligations d’informations complémentaires. Il est prévu que tout prestataire de services doit avant l’exécution de la prestation de services, mettre son client en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du service (ne sont pas concernées les services de nature financière et les opérations pratiquées par les compagnies d’assurance, les mutuelles et les instituts de prévoyance).
De quelle nature ? Les informations qui doivent être mises à la disposition de votre client de manière claire et non ambiguë sont les suivantes :
- nom, statut, forme juridique, adresse et toutes coordonnées permettant de vous identifier et de vous contacter ;
- le cas échéant, numéro d’inscription au Registre du Commerce et des Sociétés ou au Répertoire des Métiers et de l’Artisanat ;
- si l’exercice de votre activité est soumis à autorisation, les coordonnées de l’autorité ayant délivrée cette autorisation ;
- si vous êtes assujetti à la TVA, numéro individuel d’identification délivré par les services de l’administration fiscale ;
- si vous êtes membre d’une profession réglementée, votre titre professionnel et l’’État membre de l’Union européenne dans lequel il a été octroyé, ainsi que le nom de l’ordre ou de l’organisme professionnel auprès duquel vous êtes inscrit ;
- vos conditions générales ;
- le cas échéant, les clauses contractuelles relatives à la législation applicable et la juridiction compétente ;
- le cas échéant, l'existence d'une garantie après-vente non imposée par la Loi ;
- l'éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle que vous avez souscrite, ainsi que les coordonnées de l'assureur ou du garant et la couverture géographique du contrat ou de l'engagement.
Et, sur demande… Vous devez également communiquer au consommateur qui en fait la demande les informations complémentaires suivantes :
- en ce qui concerne les professions réglementées, une référence aux règles professionnelles applicables dans l'’État membre de l'Union européenne sur le territoire duquel vous êtes établi et aux moyens d'y avoir accès ;
- des informations sur vos activités pluridisciplinaires et vos partenariats qui sont directement liés au service concerné et sur les mesures prises pour éviter les conflits d'intérêts ;
- les éventuels codes de conduite auxquels vous êtes soumis, l'adresse électronique à laquelle ces codes peuvent être consultés ainsi que les versions linguistiques disponibles ;
- les informations sur les conditions de recours à des moyens extrajudiciaires de règlement des litiges, lorsque ces moyens sont prévus par un code de conduite, un organisme professionnel ou toute autre instance.
A retenir
Vos conditions générales des ventes (CGV) doivent, a minima, apporter des précisions sur les conditions de vente, le barème des prix unitaires, les réductions de prix et les conditions de règlement. Mais ce ne doit pas être les seules informations à reprendre dans vos CGV, qui doivent, autant que possible, prévoir et organiser vos conditions commerciales et financières avec vos clients.
Assurez-vous que vos clients ont effectivement pris connaissance de vos CGV et qu’ils les ont dûment acceptées.
J'ai entendu dire
Puis-je refuser à un client de livrer les marchandises commandées, en raison de factures impayées, en me prévalant d’une clause des CGV, même si je ne l’ai jamais appliqué à son encontre ?Oui, ce n’est pas parce qu’une clause des CGV n’a jamais été appliquée qu’elle n’existe plus et que son application devient impossible.
- Article L 441-1 du Code de commerce (réglementation des conditions générales de vente)
- Article L 441-2 du Code de commerce (CGV et prestataires de services)
- Article 1112-1 du Code civil (obligation générale d’information précontractuelle)
- Article L 111-2 du Code de la consommation (obligation générale d’information à la charge des prestations de services)
- Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (primauté des conditions générales de vente)
- Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (article 2)
- Ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 portant refonte du titre IV du livre IV du code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 19 février 2013, n° 11-22827 (communication des CGV)
- Arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne, 3ème chambre, du 21 mai 2015, n° C-322/14 (acceptation des CGV par clic sur Internet)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 8 mars 2017, n° 15-20457 (clause de compétence territoriale nulle)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 20 septembre 2017, n° 16-20147 (CGV non respecté par la société qui s’est imposée un formalisme supplémentaire)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 10 janvier 2018, n° 16-21949 (clause des CGV inappliquée pendant 10 ans reste applicable)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 15 mai 2018, n° 17-12044 (invitation à prendre connaissance des CGV sur la confirmation de commande, le bon de livraison et la facture)
- Réponse Ministérielle Deflesselles, Assemblée Nationale, du 29 janvier 2019, n° 15745 (mises à jour des CGV pour les sociétés de location de véhicules-impact de la réforme du FPS)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 13 février 2019, n° 18-11609 (CGV au verso des factures-acceptation tacite)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 11 mars 2020, n° 18-17261 (respect du formalisme des réclamations prévu par les CGV)