Caisse de congés payés du bâtiment : ce qu’il faut savoir
Une caisse de congés : pourquoi et pour qui ?
Pourquoi une caisse de congés dans le bâtiment ? Dans le BTP, les salariés sont amenés à changer régulièrement d’entreprise au risque de perdre leur droit à congés payés. C’est pourquoi, à la demande de la profession, le gouvernement décide de créer, en 1936, cette caisse destinée à « assurer la gestion et le paiement des congés payés des salariés du BTP ». Cette caisse permet alors de mutualiser les droits acquis par les salariés auprès de leurs différents employeurs du BTP. En 1947, c’est un régime d’indemnisation du chômage intempéries qui voit le jour afin de faire face aux difficultés spécifiques rencontrées par les entreprises du secteur.
« Une » caisse ou « des » caisses de congés ? Au préalable, rappelons qu’il n’existe pas « une caisse de congés » unique mais effectivement « des caisses de congés ». Le réseau actuel comporte 13 caisses réparties sur l’ensemble du territoire par grandes régions. Parmi elles, 2 caisses restent nationales : la caisse nationale des entreprises de travaux publics (CNETP) et la caisse nationale des sociétés coopératives.
Fonctionnement de la caisse des congés payés. Constituées sous la forme associative, elles perçoivent des cotisations de leurs adhérents. Elles sont dotées d’un règlement intérieur propre et d’une charte relative aux droits et devoirs de l’entreprise en cas de contrôle.
Pouvoir de contrôle. Le fonctionnement des caisses étant basé sur un système déclaratif, la caisse détient également un pouvoir de contrôle de ses adhérents (contrôle des rémunérations déclarées, des congés payés déclarés, du chômage intempéries…).
Obligation d’adhérer à une caisse de congés. Dès lors que l’entreprise relève d’une ou plusieurs activités entrant dans le champ d'application des conventions collectives nationales étendues du bâtiment et des travaux publics, elle a l’obligation d’adhérer à une caisse de congés intempéries. Cela signifie donc que les entreprises qui appliquent une convention collective du bâtiment ou des travaux publics devront obligatoirement adhérer à une caisse de congés payés.
Un cas spécifique. La situation est plus complexe lorsqu’une entreprise exerce à titre secondaire ou accessoire une activité bâtiment. C’est l’hypothèse où une entreprise poursuit, à titre principal, une activité qui ne relève pas du secteur du bâtiment et qui applique donc une convention collective nationale non BTP. L’adhésion pourra alors être facultative, sous réserve d’un accord conclu avec la caisse des congés.
Concrètement. Si l’entreprise ne relève pas d’un secteur ayant conclu un tel accord (et n’est pas adhérente d’une organisation patronale signataire dans certains cas), elle devra adhérer à une caisse de congés.
Secteurs relevant des caisses de congés intempéries. L’Union des caisses de France a signé des accords avec 8 organisations professionnelles visant les secteurs suivants :
- métallurgie (accord avec l’UIMM) ;
- miroiterie (accord avec la Fédération française des professionnels du verre) ;
- plasturgie (accord avec la Fédération de la plasturgie) ;
- paysagistes (accord signé avec l’Union nationale des entreprises du paysage) ;
- bois (accord signé avec la Fédération de l’industrie bois construction, FIBC, valant pour les entreprises membres de cette fédération ou d’un syndicat membre de celle-ci, en particulier le Syndicat national des applicateurs de la préservation des bois, SNAPB) ;
- froid (accord avec le syndicat national des entreprises du froid, d’équipements de cuisines professionnelles et du conditionnement de l’air, SNEFCCA) ;
- communication d’entreprises (accord signé avec la Fédération interprofessionnelle de la communication d’entreprise, FICOME),
- sécurité électronique (accord signé avec le Groupement des métiers de la sécurité électronique, GPMSE).
Le saviez-vous ?
Beaucoup d’entreprises veulent échapper à l’affiliation à la caisse des congés payés car elles pensent que cela est beaucoup plus coûteux. Pourtant, l’Union des caisses de France affirme que le coût est comparable à celui du régime général.
Il faut rappeler qu’en présence d’une caisse de congés, l’entreprise ne verse aucun salaire aux salariés en congés payés.
Organisation et missions de la caisse des congés
Plusieurs missions, plusieurs cotisations. Parce que la caisse ne gère pas seulement les congés payés, les cotisations qu’elle reçoit, leur taux et leur assiette répondent à des règles particulières.
Une cotisation de congés payés. La 1ère mission de la caisse est de garantir aux salariés travaillant dans les entreprises du secteur BTP de percevoir des indemnités de congés payés. Les entreprises adhérentes paient donc une cotisation assise sur les rémunérations des salariés qui peut intégrer, si le règlement intérieur de la caisse le prévoit, les salaires que les salariés auraient normalement perçus s'ils avaient travaillé pendant les périodes d'absence pour maladie..
Les conséquences pour les salariés. En contrepartie, la caisse versera aux salariés les indemnités correspondantes. Le salarié percevra également une prime de vacances égale à 30 % de l’indemnité de 24 jours (congé principal calculé à raison de 2 jours par mois). En pratique, les salariés du BTP acquièrent 2.5 jours ouvrables de congés par mois à concurrence de 30 jours sur une période complète d’acquisition. Cette période diffère du régime général puisqu’elle commence le 1er avril et se termine le 31 mars de l’année suivante (dans le droit commun, la période d’acquisition se situe entre le 1er juin et le 31 mai de l’année suivante).
Le saviez-vous ?
Dans le cadre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, la question s’est posée de savoir qui, de l’employeur ou de la caisse de congés payés, devait collecter et reverser la retenue à la source. Et, pour l’administration, ce sont les caisses de congés payés elles-mêmes qui se chargeront de la collecte et du versement de la retenue à la source et ce, même en cas de congés payés « procurés ». En conséquence, l’employeur n’aura pas à prélever la retenue à la source sur les indemnités de congés payés.
Pour mémoire, le système de congés payés « procurés » consiste, pour la caisse de congés payés, à verser les indemnités dues au salarié directement à l’employeur. C’est ensuite à l’employeur de reverser ces sommes au salarié.
Des déclarations patronales mensuelles ou trimestrielles... Chaque mois ou chaque trimestre (en fonction de la périodicité de paiement de la cotisation), l’entreprise procède à une déclaration auprès de la caisse dont elle dépend et indique les rémunérations brutes perçues par ses salariés.
... et annuelles. L'entreprise effectue également une déclaration annuelle « déclaration nominative annuelle – DNA » via laquelle elle indique pour chacun des salariés, le nombre d’heures de travail effectuées, les absences éventuelles et leur nature (maladie, accident du travail, maladie professionnelle, absences injustifiées, congé maternité/paternité…), le taux horaire du salarié, la durée du travail appliquée, etc. Cette déclaration permet à la caisse de procéder à l’évaluation de l’indemnité de congés payés de manière individualisée.
Passage en DSN ? Les déclarations mensuelles ou trimestrielles (DUCS CIBTP) devront passer par le dispositif de la déclaration sociale nominative (DSN) dès janvier 2022. Les déclarations annuelles (ou DADSU CIBTP), quant à elles, passeront en DSN en 2023. Toutefois, les demandes de congés et les déclarations d’arrêts intempéries, notamment, ne seront pas concernées par ce passage en DSN.
En pratique. L'employeur remettra au salarié, avant son départ en congés ou à la date de rupture de son contrat, un certificat en double exemplaire qui permet à ce dernier de justifier de ses droits à congés envers la caisse d'affiliation du dernier employeur. Ce certificat mentionne le nombre d'heures de travail effectuées par le salarié dans l'entreprise pendant l'année de référence, le montant du dernier salaire horaire calculé ainsi que la raison sociale et l'adresse de la caisse d'affiliation.
Une indemnité compensatrice de congés payés en fin de contrat ? Lorsque le salarié quitte l’entreprise, il ne perçoit pas nécessairement une indemnité compensatrice de congés payés. Il pourra conserver ses certificats et conserver son droit à congés lorsqu’il intègrera une nouvelle entreprise du BTP. Cela étant, il peut également choisir de bénéficier de l’indemnité compensatrice en retournant le certificat à la caisse.
Précisions. La caisse des congés payés verse les indemnités de congés avant la prise des congés et directement au salarié. Elle se charge par ailleurs de régler le montant des cotisations retraite et prévoyance calculées sur les indemnités de congés.
Le saviez-vous ?
La caisse de congés payés peut être substituée à l’employeur uniquement dans la situation où il est établi que ce dernier a effectivement effectué le nécessaire afin de permettre au salarié de bénéficier de son droit à congés payés.
Le chômage intempéries. La 2nde mission de la caisse est d’assurer un régime de chômage en cas d’intempéries. Ce dispositif permet de pallier aux risques encourus par les salariés du BTP dans l’exercice de leur activité du fait des conditions atmosphériques.
Qu’est-ce que des intempéries ? La Loi définit les intempéries comme « les conditions atmosphériques et les inondations lorsqu'elles rendent dangereux ou impossible l'accomplissement du travail eu égard soit à la santé ou à la sécurité des salariés, soit à la nature ou à la technique du travail à accomplir ». Cela implique donc des conditions atmosphériques dangereuses conduisant à l’arrêt du travail, de manière imprévisible et irrésistible.
Une déclaration intempéries. L’employeur doit alors procéder à une déclaration auprès de la caisse des congés payés dans les 30 jours qui suivent l’événement.
Une indemnisation sous conditions.Les salariés placés en intempéries seront indemnisés par l’employeur sous réserve de remplir cumulativement les conditions suivantes :
- ils ont travaillé au moins 200 heures au cours des 2 derniers mois ;
- ils n’ont pas été indemnisés plus de 55 jours au titre de l’intempérie depuis le 1er janvier de l’année en cours ;
- ils restent à la disposition de l’employeur pendant la période d’interruption du travail ;
- ils n’exercent pas d’autres activités salariées pendant l’indemnisation ;
- ils ne cumulent pas l’indemnisation intempérie avec d’autres systèmes d’indemnisation (tels que la maladie, par exemple).
Conditions de l’indemnisation. L’indemnisation du salarié commence après un délai de carence d’une heure. Il lui sera versé une indemnité égale aux ¾ de son salaire horaire de référence, dans la limite de 90 % du plafond horaire de la sécurité sociale (soit 26.1 € pour l’année 2024). Le nombre d’heures pouvant être indemnisées à ce titre est plafonné à 9 heures par jour, à 45 heures par semaine et 55 jours sur l’année civile.
Un revenu exonéré de cotisations sociales ? Lorsqu’il s’agit effectivement d’une situation d’intempérie, l’indemnité versée aux salariés sera exonérée de cotisations sociales mais restera assujettie à la CSG et à la CRDS au taux réduit de 6,20 % pour les revenus de remplacement.
Un remboursement possible. Vous pourrez demander à votre caisse de congés payés un remboursement de ces indemnités si votre entreprise est assujettie à la cotisation chômage-intempéries. Cela concerne donc les entreprises dont l’ensemble des salaires soumis à cotisations sociales dépassent un seuil fixé à 82 008 euros pour la campagne 2021-2022 (c’est-à-dire pour les salaires arrêtés au 31 mars 2022). Toutefois, ce remboursement ne correspondra pas à 100 % des indemnités versées mais sera fonction de la masse salariale de votre entreprise.
Le saviez-vous ?
Les conditions atmosphériques empêchant l’accès au lieu de travail ne relèvent pas du chômage intempéries. L’employeur devra pouvoir prouver que l’activité elle-même est impossible du fait des conditions météo. Il devra tenter d’affecter ses salariés à d’autres tâches (en atelier par exemple) ou de convenir avec eux de la prise de congés.
La caisse, organisme collecteur de cotisations sociales. Certaines cotisations obligatoires ou facultatives vont être collectées par la caisse des congés et reversées aux organismes tiers. C’est notamment le cas :
- de la cotisation obligatoire des entreprises du BTP à l’Organisme Professionnel de Prévention du Bâtiment et des Travaux Publics (OPPBTP) dont la mission est de préserver la sécurité et l’hygiène, d’assurer la prévention des risques professionnels dans le secteur (cette cotisation correspond à un pourcentage appliqué à l’assiette des rémunérations brutes majorées de 1,1314) ;
- de la contribution au titre de l’emploi du personnel intérimaire, due par l’entreprise qui recourt à l’intérim ; la contribution est calculée sur la base du nombre d’heures de travail payées au personnel intérimaire, multiplié par un montant forfaire fixé annuellement ;
- de la cotisation destinée à l’Association Paritaire d’Action Sociale du Bâtiment et des travaux Publics (APAS-BTP), qui gère notamment les œuvres sociales des salariés de la profession ; sa cotisation obligatoire est calculée sur les rémunérations brutes perçues par les salariés ;
- des cotisations facultatives que les employeurs choisissent de verser aux organisations professionnelles représentatives auxquelles ils adhèrent (CAPEB, Fédération Française du Bâtiment, Fédération Nationale des Travaux Publics…) : une cotisation spécifique est alors appelée à paiement lors des déclarations mensuelles ou trimestrielles ; son pourcentage varie d’une organisation à l’autre et est généralement assis sur la masse salariale brute déclarée.
La caisse, engagée dans la lutte contre le travail illégal. Depuis 2017, c’est également l’union des caisses de France qui gère le portail dédié à la carte d’identification professionnelle du BTP, visant ainsi à lutter contre le travail illégal.
A retenir
La caisse des congés ne se borne pas à indemniser les congés payés des salariés de la branche. Elle est une institution centrale et indispensable au fonctionnement du secteur.
J'ai entendu dire
Les salariés du bâtiment ont-ils droit aux congés de fractionnement ?Oui. Tout comme dans le régime dit « de droit commun », les salariés du BTP peuvent bénéficier de 2 jours supplémentaires de fractionnement.
Oui. Ces congés supplémentaires seront fonction de la catégorie des salariés (Ouvriers, ETAM) et de l’ancienneté acquise.
- Code du travail : Article L. 3141-32 (texte fondateur)
- Code du travail : Articles D. 3141-12 et suivants (affiliation, dérogation)
- Code du travail : Articles D. 3141-29 et suivants (indemnités, certificats)
- Code du travail : Articles L. 5424-6 et suivants (chômage intempéries)
- Code du travail : Articles D. 5424-7 et suivants (chômage intempéries)
- Convention collective nationale des Ouvriers du Bâtiment (jusqu’à 10 salariés)
- Convention collective nationale des Ouvriers du Bâtiment (plus de 10 salariés)
- Convention collective nationale des ETAM du Bâtiment
- Convention collective nationale des Ouvriers des Travaux Publics
- Convention collective nationale des ETAM des Travaux Publics
- Site internet de l’Union des Caisses de France : www.cibtp.fr
- Fiche DSN-Info du 15 octobre 2018, n°1987 (Prélèvement à la source)
- Cibtp.fr, Actualité du 14 avril 2021 : Baisse des taux de cotisation au régime de chômage intempéries
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 septembre 2021, n° 19-17046 (indemnité de congés payés et caisse de congés payés)
- Décret n° 2024-629 du 28 juin 2024 relatif à la détermination du montant des cotisations versées par les employeurs affiliés à des caisses de congés et destinées à financer les indemnités de congés payées