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Comment savoir si une indemnité est soumise à la TVA ?

Date de mise à jour : 18/09/2023 Date de vérification le : 18/09/2023 17 minutes

Vous avez décidé de rompre le contrat d’un de vos agents commerciaux et, conformément aux clauses du contrat vous liant à lui, vous devez lui verser une indemnité. Il vous demande une facture avec TVA, ce qui ne manque pas de vous interpeller… À tort ou à raison ?

Rédigé par l'équipe WebLex. En collaboration avec Jean-Marc Le Gallo, Avocat au Barreau de Marseille, spécialisé en droit fiscal
Comment savoir si une indemnité est soumise à la TVA ?

TVA et indemnité : la problématique

Une problématique essentielle. En matière de TVA, vous aurez toujours raison de vous poser la question de savoir si une opération, quelle qu’elle soit, est ou non soumise à la TVA. On aborde, ici, la question du « champ d’application » de la TVA.

Pourquoi ? Si vous facturez une prestation en y incluant de la TVA, vous devez savoir qu’elle est due du simple fait de sa facturation : même si vous vous trompez, c’est-à-dire que vous appliquez de la TVA à une opération qui n’y est normalement pas soumise, vous en serez redevable auprès du Trésor. En outre, cette TVA ne sera pas déductible pour le client, puisque les textes imposent comme condition pour déduire la TVA qu’elle puisse 'légalement' figurer sur la facture.

Cela étant… Pour éviter de trop noircir ce tableau, l’administration fiscale tempère l’application de ces principes, au bénéfice des entreprises de bonne foi : une entreprise qui a donc facturé et reversé de la TVA à tort pourra la récupérer (par voie d’imputation ou de remboursement), à la condition d’envoyer au client une facture rectificative, annulant et remplaçant la précédente, et faisant référence à la facture initiale (le client sera tenu, de son côté, de reverser la TVA qu’il aura initialement portée en déduction).

À noter également. Si un fournisseur, qui se présente comme redevable plausible de la TVA, facture à tort de la TVA, vous pourrez déduire la TVA ainsi facturée à tort, pour autant que vous ayez de bonne foi cru qu’il était effectivement redevable de la TVA. Mais la position du juge sera plus stricte s’agissant d’opérations qui sont exonérées de TVA : si une société facture une prestation en incluant de la TVA, alors que cette prestation est exonérée de TVA (une indemnité de résiliation de contrat versée en réparation d’un préjudice, par exemple), vous ne pourrez pas déduire cette TVA, du seul fait qu’elle n’est manifestement pas due.


TVA et indemnité : la question qu’il faut se poser

Pour savoir si une indemnité est ou non soumise à la TVA… Pour éviter ces désagréments, il vaut mieux anticiper la question de l’assujettissement ou non à la TVA de l’indemnité que vous devez verser ou qui vous est versée. Il faut se référer aux conditions du versement de cette indemnité : par principe, une indemnité sera soumise à la TVA si un « lien direct » est caractérisé. Concrètement, que faut-il faire ?

Vous devez… Posez-vous les 2 questions suivantes : l’indemnité rémunère-t-elle effectivement une prestation ou un service rendu et le niveau des avantages retirés par le bénéficiaire du service est-il en rapport avec la contre-valeur versée au prestataire ?

Alors : TVA ou pas TVA ? Si la réponse à ces questions est positive, alors l’indemnité sera soumise à la TVA ; si ce n’est pas le cas, aucune TVA ne sera due à raison de l’indemnité versée. Si l’indemnité est soumise à la TVA, elle doit obligatoirement figurer sur une facture, laquelle doit reprendre l’ensemble des mentions obligatoires exigées par la réglementation comptable, fiscale et commerciale.

Une conséquence à connaître. Voilà pourquoi vous devez savoir si une indemnité est ou non soumise à la TVA :

  • si vous facturez de la TVA à tort : vous aurez alors reversé à tort de la TVA à l’administration fiscale, avec le risque de ne pas pouvoir récupérer cette somme ; mais, comme nous l’avons signalé précédemment, une rectification de cette erreur est possible, si votre bonne foi n’est pas mise en cause ;
  • si une indemnité n’est pas soumise, à tort, à la TVA : vous risquez un rappel de TVA, assorti d’une majoration (5 %) et des intérêts de retard (0,20 % par mois de retard) ;
  • si c’est à vous de verser une indemnité à un prestataire, posez-vous systématiquement la question de la TVA même si ce n’est pas à vous de procéder à la facturation, pour éviter d’avoir à rectifier (et à justifier auprès de l’administration fiscale) des montants de TVA que vous aurez ou auriez dû déduire.


TVA et indemnité : illustrations à partir d’exemples

Rupture de contrat. D’une manière générale, les indemnités versées qui ont pour but exclusif de réparer un préjudice commercial, du fait de la rupture d’un contrat conclu entre partenaires commerciaux, ne sont pas soumises à la TVA. Il est même précisé que le fait de verser une indemnité sous la condition, pour le bénéficiaire, de renoncer à tout recours n’est pas assimilé à un service rendu à la partie versante.

Le cas de l’agent commercial. En présence d’une rupture de contrat d’un agent commercial, notre hypothèse de départ, la situation au regard de la TVA est la suivante : l’indemnité versée ne sera pas soumise à la TVA si elle n’a que pour but de réparer le préjudice subi par l’agent. Si cette indemnité poursuit également un autre objectif, la fraction correspondante pourra s’analyser comme la contrepartie d’une prestation de services. Ce sera le cas, par exemple :

  • si l’indemnité vise le versement de rappels de commissions, les sommes correspondantes doivent être soumises à la TVA ;
  • si l’indemnité a pour objectif de dédommager l’agent au titre d’une indemnité de non-concurrence, la somme versée à ce titre doit être soumise à la TVA (l’indemnité rémunère, ici, une obligation de ne pas faire).

Le saviez-vous ?

Il a été jugé que l’indemnité versée à un agent commercial compensant la reprise par l’entreprise (le mandant) de la clientèle acquise par l’agent durant la période d’exécution du contrat ne caractérise pas une prestation de services : elle n’est donc pas soumise à la TVA.

Concrètement. Il faut donc bien analyser les conditions de versement de cette indemnité et les objectifs poursuivis : si vous versez une indemnité globale, et qu’elle correspond, pour partie à l’indemnisation du préjudice subi (non taxable à la TVA), et pour une autre partie à des rappels de commissions (taxables à la TVA), vous devez ventiler ce versement pour appliquer à chaque somme le traitement fiscal qui lui convient.

Arrhes conservées par un fournisseur. En cas de dédit d’un client qui a versé des arrhes, les sommes conservées à ce titre par le fournisseur ne sont normalement pas soumises à la TVA puisqu’il s’agira d’indemniser le fournisseur du préjudice qu’il subit du fait de l’annulation de la commande.

À ce sujet, le juge a récemment précisé que les avances conservées par une société hôtelière dans le cas où ses clients ne se présentent pas le jour convenu sans annulation préalable ne sont pas des “arrhes” puisqu’elles constituent la contrepartie intégrale de la prestation d’hébergement proposée par la société, que ses clients en profitent ou pas. Elles doivent donc être soumises à TVA.

Indemnités versées par un assureur à la suite d’un préjudice. Dans ce cas, le versement ne constitue pas la rémunération d’un service : il s’agit bien d’indemniser le client de l’assureur d’un préjudice (sinistres subis à la suite d’un vol, d’un incendie…).

Pénalités pour retard de livraison ou retard de paiement. Parce qu’elles réparent un préjudice, ces sommes n’ont normalement pas à être soumises à la TVA.

Indemnisation et prise en charge de travaux exceptionnels. Une indemnité versée en vue de compenser le coût de travaux exceptionnels ou de prestations complémentaires sera soumise à la TVA, même si ces travaux ou ces prestations ne sont pas initialement prévus dans le contrat vous liant à votre partenaire : il ne s’agit pas, ici, d’indemniser un quelconque préjudice lié à la prise en charge de travaux exceptionnels complémentaires, mais bien de les rémunérer.

Indemnité d’éviction. Une indemnité versée par un propriétaire à une entreprise locataire de son local commercial pour obtenir son départ et relouer le local à des conditions plus avantageuses sera soumise à la TVA.

Dépôt de garantie. Le dépôt de garantie conservé par un promoteur immobilier en cas de désistement d’un acheteur sera soumis à la TVA car il rémunère un service de réservation du bien.

Indemnité d’immobilisation. Inversement, l’indemnité d’immobilisation conservée par le vendeur d’un bien immobilier en cas de défaut de réalisation de la vente du fait de la défaillance de l’acheteur ne sera pas soumise à la TVA.

Indemnité d’occupation. L’indemnité d’occupation accordée par un juge à une société pour compenser le préjudice causé par l’occupant d’un local qui se maintient dans les locaux malgré la résiliation du contrat de bail n’est pas soumise à TVA.

Droit d’entrée dans le cadre d’un bail commercial.Le droit d’entrée n’est pas assimilable à une indemnité destinée à compenser un préjudice. Il s’agit, en réalité, d’un supplément de loyer qui constitue, au même titre que le loyer annuel, la contrepartie de l’opération de location et qui doit donc être soumis à la TVA.

Subventions européennes versées aux agriculteurs. Tout dépend de la nature de la subvention. S’il s’agit d’une véritable subvention, elle ne sera pas soumise à TVA. En revanche, si elle joue le rôle de complément de prix, par exemple en permettant à un groupement de producteurs de vendre à ses adhérents un bien à un prix inférieur à celui qu’il devrait exiger en l’absence de subvention, elle devra être soumise à TVA. 

Le saviez-vous ?

L’administration a eu l’occasion de préciser qu’elle n’était pas tenue par la qualification que vous avez donné à l’indemnité versée ou reçue. En cas de contrôle, elle analysera systématiquement les conditions de son versement pour apprécier sa situation au regard de la TVA.

A retenir

Pour savoir si une indemnité est, ou non, passible de la TVA, vous devez vous demander si, pour le bénéficiaire, elle constitue la contrepartie d’un service rendu. Si oui : l’indemnité est soumise à la TVA ; si non : vous ne facturez pas de TVA.
 

J'ai entendu dire

Je suis promoteur immobilier et, dans le cadre de nos contrats, nous demandons un dépôt de garantie de la part d’un candidat acquéreur, que nous conservons en cas de dédit de ce dernier. Si cela arrive, devons-nous soumettre les sommes correspondantes à la TVA ?

Ce cas a été tranché par la jurisprudence : le juge de l’impôt a, ici, considéré que les sommes conservées par le promoteur s’analysaient comme la rémunération du service de réservation du bien. Elles doivent donc être soumises à la TVA.
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