Conclure un contrat à durée indéterminée : ce qu'il faut savoir
Conclure un CDI : une obligation ?
Dans quel cas ? Le contrat à durée indéterminée (CDI) constitue le contrat « de droit commun » : c’est ce type de contrat que vous devez utiliser dans le cadre de la mise en place d’une relation contractuelle de travail avec un salarié, en vue de l’occupation d’un emploi liée à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Si, à l’inverse, vous décidez d’embaucher pour une tâche spécifique limitée dans le temps, vérifiez si vous avez la possibilité de conclure un autre type de contrat, du type contrat à durée déterminée ou contrat de travail temporaire.
Sous quelle forme ? Bien qu’il puisse être oral (s’il est à temps plein), le contrat doit revêtir une forme écrite (en français y compris pour les objectifs en cas de rémunération variable). Si le salarié est étranger, une traduction du contrat dans sa langue pourra être rédigée, à sa demande. La formalisation par écrit des relations contractuelles permettra d’acter les différentes clauses régissant les rapports entre le salarié et l’entreprise. Il faut, à cet égard, rappeler que l’un des éléments qui constitue le contrat de travail, outre la prestation de travail et la rémunération, est la subordination juridique. Ce lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements du salarié placé sous sa subordination.
Conclure un CDI : un contenu à vérifier et valider
Un exercice délicat. Mettre en place un contrat de travail, quelles que soient ses caractéristiques, nécessite de prendre un certain nombre de précautions. Voilà pourquoi il nous semble essentiel de recourir aux services d’un spécialiste qui saura vous conseiller dans la rédaction du contrat et les différentes clauses essentielles à y insérer. Ce qui ne doit pas vous empêcher, malgré tout, de connaître les conditions de mises en place d’un contrat de travail, a fortiori d’un CDI, parce qu’en signant le contrat, vous endossez aussi la responsabilité de sa bonne exécution…
À vérifier. Assurez-vous que le salarié embauché est majeur (s’il est mineur non émancipé, vous devez obtenir un accord signé du représentant) et qu’il est effectivement libre d’entamer une relation contractuelle de travail avec vous (au besoin, demandez le certificat de travail de son précédent employeur démontrant qu’il est libre de toute obligation, notamment de non-concurrence).
À mentionner. Le contrat doit notamment comporter les mentions suivantes :
- identité des parties (identité complète de l’employeur, identité, coordonnées et numéro de sécurité sociale du salarié),
- description de l’emploi concerné (titre, classement, description, etc.),
- la date de prise d’effet du contrat,
- rémunération appliquée (éléments de la rémunération indiqués séparément y compris les majorations pour heures supplémentaires ainsi que la périodicité et les éléments de paiement),
- la durée de travail (hebdomadaire ou mensuelle) et ses modalités d’aménagement sur une autre période de référence ainsi que les conditions dans lesquelles le salarié peut être amené à effectuer des heures supplémentaires et / ou complémentaires (précision quant aux modalités de changement d’équipe le cas échéant).
- lieu de travail et si elle est distincte l'adresse de l'employeur,
- durée de la période d’essai (pensez, en cas d’embauche en CDI à la suite d’un CDD, à déduire de la période d’essai prévue au contrat la durée du CDD, si le contrat porte sur le même emploi ou un emploi similaire),
- convention collective et accords collectifs applicables,
- coordonnées de l’organisme de sécurité sociale auprès duquel l’entreprise verse les cotisations, coordonnées de la caisse de retraite complémentaire ainsi que, le cas échéant, celles de l'organisme de prévoyance,
- mention selon laquelle les formalités de déclaration préalable d’embauche ont été effectuées en précisant les coordonnées de l’organisme auprès duquel cette formalité a été accomplie,
- le droit à la formation assuré par l’employeur,
- les régimes obligatoires auxquels le salarié est affilié, la mention des contrats de protection sociale complémentaire dont les salariés bénéficient collectivement en application d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur et le cas échéant, les conditions d’ancienneté qui y sont attachées,
- la procédure à mettre en œuvre par l’employeur et le salarié en cas de cessation de la relation de travail.
Le saviez-vous ?
Si vous êtes amené à utiliser des données informatisées relatives au salarié, vous devez insérer une clause rappelant qu’il dispose d’un droit de consultation et de rectification.
À valider. Vous êtes libre également de négocier avec le salarié et d’insérer dans le contrat toutes autres clauses que vous jugerez utiles, pour autant qu’elles ne soient pas contraires à l’ordre public. C’est ainsi qu’il vous sera interdit d’insérer une clause discriminatoire ou encore une clause prévoyant une rémunération inférieure au minimum légal, ou encore une durée du travail qui ne respecte pas le repos hebdomadaire. Par contre, vous pouvez, d’un commun accord, prévoir des clauses de mobilité, de secret professionnel, d’exclusivité (pour autant qu’elle soit indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise), de non-concurrence, de loyauté, etc.
Une prise d’effet différée. Il est possible de prévoir, dans le contrat de travail, une prise d’effet différée, notamment lorsque le salarié nouvellement recruté intervient dans le cadre d’un remplacement résultant du départ d’un précédent salarié, ou lorsque le salarié nouvellement recruté est encore lié à un autre employeur.
Attention ! Lorsque la prise d’effet du contrat est différée, il est possible de prévoir une condition suspensive qui, si elle n’est pas remplie, permettra au contrat de ne pas s’exécuter (il sera alors caduc). Mais attention à la rédaction de cette clause ! Un contrat qui prévoit qu’il prendra effet lorsque le salarié sera libre de ses engagements ou au plus tard à une date déterminée est conclu sans réserve ni condition. S’il n’est finalement pas exécuté, le salarié pourra obtenir des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, quand bien même le salarié serait encore engagé auprès de son ancien employeur (dans le cadre d’une clause de non-concurrence non levée, par exemple).
Mais… Il faut aussi savoir qu’un salarié qui ne se présenterait pas à son poste au jour prévu, alors même que le contrat a régulièrement été signé, pourra justifier le versement, à l’employeur, de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
Un contrat à durée « indéterminée ». S’agissant d’un contrat à durée indéterminée, il n’est pas possible d’y mentionner une date de rupture. Un employeur a déjà tenté de prévoir une date de fin de contrat aux 70 ans du salarié dans un CDI conclu dans le cadre d’un cumul emploi-retraite. La rupture du contrat effectivement intervenue aux 70 ans du salarié a été jugée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
À remettre. Le contrat doit être établi en double exemplaire, daté et signé par les parties, et vous aurez soin d’entre remettre un exemplaire au salarié (aucun délai n’est requis, contrairement à ce qui est prévu pour la remise du contrat à durée déterminée). Pensez également à remettre au salarié un document reprenant l’ensemble des éléments déclarés dans le cadre de la déclaration préalable d'embauche.
Le saviez-vous ?
Attention au moment de la conclusion du contrat ! En effet, le CDI conclu pendant une procédure collective, après la date de cessation des paiements, pourra être déclaré nul, et donc sans effet, s’il cause un déséquilibre important au détriment de l’employeur.
Proposition d’un CDI à un salarié en CDD ou en intérim. Dans le cas où le salarié qui se voit proposer un CDI était jusqu’alors embauché en CDD ou en intérim, l’employeur doit impérativement lui proposer le poste via une procédure formelle détaillée ici.
A retenir
Dans un CDI, vous pouvez insérer tous types de clauses que vous estimez utiles. 2 freins à cette liberté sont toutefois à mémoriser : les clauses contraires à l’ordre public sont strictement interdites et évitez toutes clauses discriminatoires.
J'ai entendu dire
J’ai entendu dire qu’on pouvait insérer, dans le contrat de travail, une clause de dédit-formation. De quoi s’agit-il exactement ?Une clause de dédit-formation est une clause par laquelle un salarié qui démissionnerait avant un certain délai s’engage à rembourser les frais de formation pris en charge par l’entreprise. Cette clause ne doit toutefois pas priver le salarié de sa liberté de démissionner et doit constituer la contrepartie d'un engagement pris par l'employeur d'assurer une formation entraînant des frais réels au-delà des dépenses imposées par la Loi ou la convention collective ; en outre, le montant de l'indemnité de dédit doit être proportionné aux frais de formation engagés. Il faut savoir, par ailleurs, que ce type de clause peut être interdit dans certains contrats spécifiques (comme le contrat d’insertion par exemple).
Il est interdit de prévoir une telle clause dans un contrat de professionnalisation.
- Articles L1221-1 et suivants du Code du travail
- Article L6325-15 du Code du travail (nullité de la clause de dédit-formation dans un contrat de professionnalisation)
- Décret no 2023-1004 du 30 octobre 2023 portant transposition de la directive (UE) 2019/1152 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne (renforcement de l’obligation d’information de l’employeur au salarié nouvellement embauché en CDI)
- Décret no 2023-1307 du 28 décembre 2023 relatif au refus par un salarié d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée
- Arrêté du 3 janvier 2024 relatif aux modalités d'information de l'opérateur France Travail par un employeur à la suite du refus par un salarié d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée à l'issue d'un contrat à durée déterminée ou d'un contrat de mission
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 juin 2002, n° 00-44327 (clause de dédit-formation)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 octobre 2013, n° 12-12113 (durée période d’essai en cas de CDI suite à un CDD)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 21 mars 2018, n° 16-26183 (CDI avec date de fin dans le cadre d’un cumul emploi-retraite)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 28 juin 2018, n° 17-14411 (embauche différée d’un salarié lié par une clause de non-concurrence)
- Arrêt de la Cour d’appel de Paris, du 28 janvier 2021, n° 19/05834 (nullité d’un CDI conclu pendant la période suspecte et causant un déséquilibre pour l’employeur)
- Arrêt de la Cour d’Appel de Bordeaux du 10 février 2021, n° 18/003969 (rupture abusive d’un contrat de travail par un salarié qui ne se présente pas à son poste)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 septembre 2023, n° 22-10950 (requalification d’un contrat de prestation en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 11 octobre 2023, no13770 (rémunération variable : les objectifs doivent nécessairement être rédigés en français)