Droit de communication en matière sociale
Droit de communication : qui est concerné ?
Un droit de l’administration. Le système social français est déclaratif : chaque mois, vous souscrivez une nouvelle DSN pour renseigner vos mouvements de personnel, les rémunérations versées, etc. L’administration détermine donc le montant de vos cotisations et contributions sociales sur la foi de ces déclarations. Lorsqu’elle contrôle la situation sociale d’un employeur ou d’un travailleur indépendant, l’Urssaf doit pouvoir accéder à l’ensemble des documents lui permettant d’effectuer sa tâche. Par le biais de son droit de communication, son pouvoir est même plus étendu…
Un pouvoir étendu. Le droit de communication va permettre à l’administration sociale, non seulement de prendre connaissance des documents comptables de votre entreprise, mais aussi de recueillir auprès de tiers tous les renseignements qui lui permettront de recouper, et ainsi de vérifier, les déclarations que vous avez déposées. Elle pourra utiliser les renseignements obtenus pour contrôler toutes les cotisations et contributions sociales à la charge de toute autre personne, le cas échéant, même non identifiée.
Qui peut l’exercer ? Initialement réservé aux agents de contrôle des organismes de sécurité sociale, le droit de communication est dorénavant, depuis le 25 octobre 2018, ouvert à tous les agents de ces mêmes organismes.
Qui est concerné ? Ce droit de communication peut être utilisé par l’administration (sur place ou par correspondance) auprès d’un grand nombre de personnes et d’organismes. Non seulement elle pourra s’adresser aux entreprises qui entretiennent des liens professionnels avec le contrôlé, notamment les banques, les compagnies d’assurance, les opérateurs de téléphonie, les fournisseurs d’accès à Internet, mais encore les tribunaux, les administrations publiques, etc.
Le saviez-vous ?
Les agents de l’Urssaf disposent désormais d’un droit de communication renforcé puisqu’ils peuvent maintenant obtenir la communication de documents auprès de tiers à propos de personnes non identifiées. Le refus de fournir les documents demandés est sanctionné par une pénalité de 5 000 € applicable à chaque refus ou communication incomplète.
Pouvez-vous vous y opposer ? Une entreprise est légalement tenue de répondre aux demandes de l’administration dans le cadre de ce droit de communication : c’est pourquoi l’absence de tenue, la destruction ou le refus de communiquer un document soumis au droit de communication entraîne l’application d’une pénalité de 1 500 € au maximum par cotisant concerné par le contrôle, sans pouvoir excéder 10 000 €. Depuis le 25 octobre 2018, cette pénalité s’applique également en cas de silence gardé par l’entreprise.
En cas de récidive… Le montant des pénalités sera doublé en cas de récidive de refus ou de silence gardé dans le délai de 5 ans à l’expiration du délai de 30 jours laissé au tiers pour faire droit à la 1ère demande de communication de l’organisme.
Droit de communication : quelles informations ?
Quelles sont les pièces communicables ? Comme il s’agit de vérifier les déclarations sociales réalisées, toutes les informations relatives au contenu de ces déclarations peuvent être communiquées. Le tiers détenteur des informations ne peut opposer à l’administration sociale le secret professionnel. Cependant, il y a des conditions…
Quelles sont les conditions ? Le droit de communication ne peut être exercé par l’administration sociale qu’après sollicitation de l’entreprise contrôlée et si :
- les éléments relevés en comptabilité sont insuffisants et que les informations recueillies auprès d’autres organismes ou administrations ne permettent pas de lever une incertitude ;
- elle refuse de fournir les informations ou documents nécessaires à son contrôle ou qu’il existe un doute sur la validité ou l’authenticité des pièces fournies ou des contradictions entre ces pièces et les éléments du dossier.
Sauf… En cas de travail dissimulé ou lorsqu’une sollicitation préalable serait de nature à compromettre les investigations menées afin de détecter une fraude, l’administration sociale n’est pas tenue de demander préalablement à l’entreprise contrôlée les documents nécessaires.
Le saviez-vous ?
Lorsque l’administration sociale sollicite des documents, la personne sollicitée doit les lui transférer dans les 30 jours suivant la demande, gratuitement.
Une interconnexion ? Les données obtenues à la suite de l’exercice du droit de communication peuvent faire l’objet d’une interconnexion avec les données des différentes Urssaf au titre de l’accomplissement de leurs missions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé. Les modalités de cette interconnexion sont définies par décret, après avis de la Cnil.
Droit de communication : modalités pratiques
Vous êtes le tiers détenteur de l’information. L’agent administratif chargé du contrôle peut vous réclamer communication de documents par voie postale ou vous adresser par LRAR un avis de passage précisant la date de sa visite dans vos locaux. Il doit, sauf urgence, tenir compte des contraintes de votre entreprise lorsqu’il détermine la date de son passage. Il vous présentera alors sa carte professionnelle.
Le saviez-vous ?
Les échanges d’informations ne peuvent pas avoir lieu par voie informatique mais il est possible, à la demande de l’agent de contrôle, de communiquer les documents sur un support numérique, par un dispositif sécurisé. Vous pouvez remettre de simples photocopies des documents demandés. Vos correspondances doivent se faire par LRAR pour justifier que vous respectez les délais impartis.
Une demande de l’Urssaf. L’agent de contrôle doit adresser une demande de communication au tiers qui détient les documents. Elle doit préciser :
- la nature de la relation juridique ou économique existant entre la personne à qui la demande est adressée et les personnes qui font l'objet de la demande ;
- les critères relatifs à l'activité des personnes qui font l'objet de la demande, dont l'un au moins des 3 critères suivants :
- le lieu d'exercice de l'activité ;
- le niveau d'activité ou niveau des ressources perçues, ces niveaux pouvant être exprimés en montant financier ou en nombre ou fréquence des opérations réalisées ou des versements reçus ;
- le mode de paiement ou de rémunération ;
- la période, éventuellement fractionnée, mais ne pouvant excéder dix-huit mois, sur laquelle porte la demande.
Vous êtes l’employeur contrôlé. Une fois les informations collectées par l’Urssaf, l’agent de contrôle vous informe, par LRAR, qu’il a fait usage de son droit de communication, qu’il souhaite obtenir vos explications et que vous pouvez obtenir communication des informations qu’il a recueillies. Vous disposez alors d’un délai de 15 jours pour répondre et, le cas échéant, demander communication des informations. S’il y a lieu, l’administration procède ensuite au recouvrement des sommes dues.
Conservation des documents. Les informations collectées par l’administration sociale sont conservées pendant 3 ans, à compter de leur réception et jusqu'à l'expiration des délais de recours contre les redressements, amendes ou condamnations pénales consécutifs aux contrôles réalisés sur la base de ces informations.
A retenir
Le droit de communication de l’administration est un droit très étendu qui lui permet de vérifier l’exactitude de vos déclarations et, le cas échéant, de procéder au recouvrement des sommes qui lui seraient dues. Vous ne pouvez pas vous y opposer sous peine d’amende.
- Articles L 114-19 à L 114-21 du Code de la Sécurité sociale
- Loi de Financement de la Sécurité sociale pour 2016 n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 (articles 92 et 95)
- Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, article 78
- Loi n°2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, article 8 (extension du droit de communication et des sanctions)
- Loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, article 22
- Décret n° 2017-859 du 9 mai 2017 relatif aux conditions d'exercice du droit de communication mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale
- Circulaire DSS n° 2011-323 du 21 juillet 2011 relative aux conditions d’application par les organismes de sécurité sociale du droit de communication institué aux articles L. 114-19 et suivants du code de la sécurité sociale