Formaliser une promesse d’embauche (ou une « promesse unilatérale de contrat de travail »)
La promesse d’embauche : définition et utilité
Une possibilité. Lorsque vous avez terminé votre recrutement et que vous avez trouvé le candidat correspondant au poste vacant, la conclusion d’une promesse d’embauche ou lettre d’engagement peut s’avérer nécessaire. Notez que le terme « promesse d’embauche » a été remplacé par les juges par la notion de « promesse unilatérale de contrat de travail », qui aura les mêmes effets.
Pour quels objectifs ? Il se peut que le candidat soit déjà en poste au moment où vous choisissez sa candidature. Dans ce cas, la promesse unilatérale de contrat de travail (anciennement « promesse d’embauche ») peut poursuivre deux objectifs : celui de vous assurer qu’il ne s’échappera pas chez un concurrent mais également celui de rassurer le candidat qui pourra alors démissionner en toute tranquillité.
La promesse vaut contrat ! La promesse unilatérale de contrat de travail constitue un engagement valant contrat de travail, c’est une offre ferme et précise. Au stade où vous formalisez la promesse unilatérale de contrat de travail, certains éléments essentiels du contrat de travail doivent être déterminés. La promesse unilatérale de contrat de travail se distingue donc de la simple offre d’emploi, ou proposition de contrat de travail.
Une option pour le bénéficiaire. La Loi précise que la promesse détermine les éléments essentiels du contrat, qui sera applicable si le bénéficiaire (le candidat au poste) donne son consentement.
La promesse d’embauche : contenu et forme
Promesse = contrat de travail. La promesse promesse unilatérale de contrat de travail est un véritable engagement de l’employeur.
A distinguer de l’offre de contrat de travail. Le fait, pour un employeur, de proposer à une personne un engagement précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction et d’exprimer sa volonté d’être lié en cas d’acceptation, constitue une offre de contrat de travail. Il est, dans ce cas, possible pour l’employeur de se rétracter librement et sans pénalité, dès lors que l’offre n’est pas parvenue à son destinataire ou dans un délai qu’il a lui-même fixé ou, à défaut, dans un délai raisonnable. Néanmoins, si cette rétractation occasionne un préjudice pour le candidat à l’emploi, ce dernier pourra réclamer des dommages-intérêts. Dès lors que l’offre de contrat de travail a été acceptée par son destinataire, le contrat de travail est formé et l’employeur ne peut plus se rétracter.
Définition de la « promesse unilatérale de contrat de travail ». La promesse est un contrat par lequel l’employeur accorde à une personne, appelée « bénéficiaire », le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés. Le contrat n'est formé que si le bénéficiaire l'accepte. Il n’est pas possible pour l’employeur de révoquer la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire. Une rétractation n’empêchera pas la formation effective du contrat de travail promis. La différence avec l’offre de contrat de travail réside dans la volonté ferme de l’employeur de s’engager au profit du candidat retenu.
Pourparlers et promesse. Une entreprise peut tout à fait adresser au candidat à un poste une proposition d’embauche mentionnant la rémunération, le projet de contrat de travail à retourner dans un délai déterminé. Cependant, s’il apparaît un désaccord sur le montant de la rémunération et si les pourparlers ne se poursuivent pas, la rémunération n’est, en définitive, pas « déterminée ». Par conséquent, la proposition ne vaut pas contrat de travail.
La promesse unilatérale de contrat de travail n’est pas le contrat définitif. Ainsi, même si la promesse doit contenir les éléments essentiels, tous les éléments du contrat n’ont pas à y figurer. Le contrat pourra donc valablement prévoir des clauses spécifiques comme une clause de non-concurrence ou encore des éléments de rémunération variable, des objectifs professionnels…
Le saviez-vous ?
Le fait que la promesse unilatérale de contrat de travail ne prévoit pas de période d’essai n’empêche pas d’en inclure une dans le contrat de travail définitif, à moins que la promesse stipule clairement que l’engagement se fera sans période d’essai. Afin d’éviter tout conflit au moment de la signature du contrat, il est recommandé de la prévoir dès la promesse unilatérale de contrat de travail.
De même, bien que la rédaction du CDD soit très règlementée, la promesse unilatérale de contrat de travail sous CDD ne devra pas contenir l’ensemble des dispositions obligatoires du contrat définitif. Cela ne remettra pas en cause la validité de l’engagement en CDD, tant que le contrat définitif est rédigé conformément aux dispositions en vigueur.
Des conditions suspensives ? La promesse unilatérale de contrat de travail pourra en outre être conclue sous condition suspensive : par exemple à la condition que l’employeur obtienne un marché ou que le salarié obtienne un diplôme particulier.
Mais attention à la rédaction d’une telle clause ! Dans une affaire, un employeur a signé 2 promesses unilatérales de contrat de travail, au profit de 2 candidats à l’emploi, prévoyant 2 conditions suspensives : l’une d’obtention de la qualification requise pour les salariés, et l’autre d’une certification particulière pour la société. Cependant, la clause insérant ces conditions suspensives précisait également que si l’une ou l’autre de ces conditions n’était(ent) pas remplie(s), l’employeur pourrait se rétracter. Ce qui imposait une démarche à l’employeur (se rétracter). Ici, l’employeur n’a fait aucune démarche, estimant que les conditions n’étant pas remplies, le contrat est caduc (c’est-à-dire qu’il ne peut pas s’appliquer). Abstention sanctionnée par le juge qui a condamné l’employeur au paiement d’indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse pour chaque salarié.
Un formalisme précis ? La différence entre l’offre de contrat de travail et la promesse unilatérale de contrat de travail est subtile puisqu’elle réside dans l’intention de l’employeur de s’engager fermement. C’est pourquoi vous devez accorder un soin particulier à la rédaction de votre acte.
A noter. Un document qui ne mentionnerait ni la date d’embauche, ni la rémunération, ne constitue ni une offre de contrat de travail, ni une promesse unilatérale de contrat de travail. Il n’engage donc personne.
Rupture de la promesse unilatérale de contrat de travail : les conséquences
Distinction promesse/offre de contrat de travail. L’intérêt de distinguer la promesse unilatérale de contrat de travail de la simple offre d’emploi repose sur les conséquences. En effet, seule la promesse engage la responsabilité de l’employeur en cas de rétractation.
Rupture de la promesse par l’employeur. Dans la mesure où celle-ci vaut contrat de travail, le non-respect d’une promesse unilatérale de contrat de travail par l’employeur s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire nul si la rétractation repose sur un motif discriminatoire.
Rupture de la promesse par le candidat. S’il ne respecte pas la promesse unilatérale de contrat de travail qu’il a acceptée, il s’expose à des dommages-intérêts pour le préjudice subi par l’employeur.
Cas de rupture possibles. La rupture d’une telle promesse reste toutefois possible d’un commun accord ou si vous disposez d’un motif légitime par exemple si la condition suspensive n’est pas remplie ou si vous avez éventuellement prévu une clause de rétractation.
A retenir
La promesse unilatérale de contrat de travail est un engagement de l’employeur valant contrat. Avant tout, soyez certain de votre recrutement car une fois la promesse faite, vous ne pourrez vous rétracter que pour un motif légitime.
J'ai entendu dire
J’ai fait une promesse unilatérale de contrat de travail à un candidat et je viens d’apprendre qu’il a été licencié pour faute grave chez son précédent employeur. Puis-je valablement me rétracter ?Non ! La promesse unilatérale de contrat de travail vaut contrat. La rupture de la promesse sur ce motif s’analyserait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- Article 1124 du Code Civil
- Ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 12 Juin 2014, n° 13-14258 (absence de période d’essai dans la promesse)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 6 juillet 2016, n° 15-11138 (promesse d’embauche sous CDD)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 13 mai 2003, n° 01-42729 (condition suspensive)
- Arrêt de la Cour de Cassation, 1ère chambre civile, du 28 mars 2000, n° 97-18028 (promesse d’embauche par fax)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 2 juin 2004, n° 03-45269 (promesse d’embauche par mail)
- Arrêt de la Cour d’Appel de Dijon, du 25 février 1999, n° 98-1398 (licenciement pour faute grave chez le précédent employeur) NP
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 9 juin 2017, n° 16-14019 (condition suspensive d’embauche et rétractation)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 21 septembre 2017, n° 16-20104 (distinction offre d’embauche/promesse d’embauche)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 26 septembre 2018, n° 17-18560 (promesse unilatérale de contrat de travail et pourparlers concernant la rémunération)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 28 novembre 2018, n° 17-20782 (sans date d’embauche et sans mention de la rémunération, pas de promesse d’embauche)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 23 septembre 2020, n° 18-22188 (exemple d’une offre de contrat de travail acceptée)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 avril 2022, n°20-22454 (la promesse unilatérale de contrat de travail n’est pas formée si des pourparlers relatifs à la part variable de la rémunération se poursuivent)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 janvier 2024, no 21-25029 (avenant au contrat de travail)