Gérer l’entretien professionnel
Entretien professionnel : ce qu’il n’est pas…
Définition. Quel que soit l’effectif salarié de l’entreprise, vous êtes tenu d’organiser, dès maintenant, un entretien professionnel périodique avec vos collaborateurs, dont l’objectif est d’analyser les perspectives d’évolution professionnelle du salarié (tout nouveau salarié doit être informé de ce droit lors de son embauche). L’entretien professionnel est un processus qui ne doit pas être confondu avec les entretiens déjà en cours d’application.
Il n’est pas… Un entretien d’évaluation : en effet, alors que l'entretien professionnel est consacré à identifier les perspectives d'évolution professionnelle du salarié, l'entretien d'évaluation permet de faire le bilan de l'année écoulée et de fixer les objectifs professionnels du salarié. La loi n’oblige pas l’employeur à mettre en place un entretien d’évaluation. Néanmoins, il peut être imposé par une convention collective.
Il n’est pas… Un entretien disciplinaire : en effet, alors que l'entretien professionnel est un outil de gestion des compétences du personnel de l'entreprise, l'entretien disciplinaire est un préalable obligatoire à une procédure mise en œuvre par l'employeur en vue d'infliger une sanction.
Il n’est pas non plus… Un entretien de début de mandat que le représentant du personnel titulaire, ou le délégué syndical, ou le titulaire d'un mandat syndical peut demander au sujet des modalités pratiques d'exercice de son mandat au sein de l'entreprise au regard de son emploi.
Mais aussi… Il faut encore distinguer l'entretien professionnel des entretiens spécifiques des travailleurs en télétravail ou des salariés en forfait annuel en jours. Ces entretiens sont organisés par l'employeur annuellement en vue d'évoquer, avec les salariés, leurs conditions de travail.
Entretien professionnel : ce qu’il est…
Un entretien qui remplace des dispositifs antérieurs. L’entretien professionnel remplace, en pratique, certains dispositifs antérieurs que sont le bilan d’étape professionnel et l’entretien pour les salariés de plus de 45 ans.
Pour qui ? La règle est relativement simple : tous les salariés sont concernés quel que soit l'effectif de l'entreprise. Donc, les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation doivent également en bénéficier.
Le saviez-vous ?
Les salariés titulaires d’un CDD doivent également bénéficier de cet entretien tous les 2 ans de présence dans l'entreprise. Cependant, les intérimaires sont exclus de ce rendez-vous dans l'entreprise utilisatrice.
Avec qui ? L’entretien est mené par l’employeur (ou son représentant). Cela signifie que vous ne pouvez pas externaliser les entretiens professionnels.
Pour quoi ? L'entretien professionnel a pour objet de faire le point avec le salarié sur son parcours et d'envisager les évolutions possibles de ses compétences et les moyens de formations à mettre en œuvre. En d'autres termes, cet entretien vous permet d'identifier les perspectives d'évolution du salarié. Notez qu’il s'agit d'une obligation légale pour l'employeur. Vous devrez communiquer, au cours de cet entretien, des informations relatives à la validation des acquis de l'expérience (pour encourager l’accès au congé pour VAE).
Quand ? Depuis le 7 mars 2014, vous devez proposer un entretien professionnel tous les 2 ans à compter de la date d'embauche de vos salariés (les premiers entretiens devront donc avoir lieu, par définition, avant le 7 mars 2016). Mais l’entretien devra aussi être organisé à d’autres moments, puisqu’en plus de cette répétition bisannuelle, vous devez également proposer systématiquement un entretien professionnel aux salariés à l'issue :
- d'un congé maternité,
- d'un congé parental d’éducation, y compris par période d’activité à temps partiel,
- d'un congé d’adoption,
- d'un congé de proche aidant (un entretien professionnel doit aussi avoir lieu avant ce congé),
- d’un congé de solidarité familiale (un entretien professionnel doit aussi avoir lieu avant ce congé),
- d'un congé sabbatique,
- d'un arrêt longue maladie,
- d'une période de mobilité volontaire,
- d'un mandat syndical ou de représentant du personnel titulaire lorsque ses heures de délégations représentent sur l’année 30 % de sa durée de travail (il faut dans ce cas évoquer les perspectives d’évolution du salarié mais aussi recenser les compétences acquises au cours de son mandat et préciser les modalités de valorisation de l'expérience acquise).
Spécialement s’agissant du congé parental d’éducation. Depuis le 6 août 2014, le contenu de l’entretien professionnel organisant le retour d’un salarié en congé parental ou en période d'activité à temps partiel a été précisé : au cours de cet entretien, vous devez prévoir avec le salarié son retour à l'emploi en déterminant ses besoins de formation et en examinant les conséquences éventuelles du congé sur sa rémunération et l'évolution de sa carrière.
En plus, tous les 6 ans… 1 entretien professionnel sur 3 doit faire l’objet d’un récapitulatif du parcours professionnel du salarié. Cet entretien récapitulatif, organisé tous les 6 ans, a pour objectif de vérifier que votre salarié a bénéficié des entretiens professionnels prévus au cours des 6 dernières années. Il permet également de s'assurer qu'au cours de cette période votre collaborateur a :
- suivi au moins une action de formation ;
- acquis une certification professionnelle (diplôme, certification, ...) ;
- et bénéficié d'une progression salariale ou professionnelle.
Depuis le 1er janvier 2019… Sachez qu’un accord collectif d'entreprise ou, à défaut, de branche, peut définir une périodicité des entretiens professionnels différente, ainsi qu'un cadre, des objectifs et des critères collectifs d'abondement par l'employeur du CPF. Il peut également prévoir d'autres modalités d'appréciation du parcours professionnel du salarié (autres que le suivi d'au moins 1 action de formation, l'acquisition des éléments de certification par la formation ou par une VAE ou le bénéfice d'une augmentation de salaire ou d'une promotion).
Entretien professionnel : comment faire ?
Au moment de l’embauche… Vous devez informer votre nouveau salarié qu’il a le droit à cet entretien professionnel tous les 2 ans. Notez que les instances représentatives du personnel doivent être consultées sur la mise en place de ces entretiens.
Avant l’entretien… Vous devez convoquer votre salarié par écrit à cet entretien et conserver la preuve de cette remise. Cette convocation doit être donnée au salarié suffisamment tôt, pour lui permettre de préparer l’entretien. Vous devez indiquer dans cette convocation le lieu, la date et l’heure de l’entretien (idéalement sur le temps de travail du salarié), la personne avec qui l’entretien aura lieu et l’objectif de cet entretien.
Le saviez-vous ?
Pour préparer au mieux l’entretien professionnel, nous vous conseillons de reprendre l'historique professionnel du salarié, d'identifier clairement ses tâches actuelles et ses compétences, et d'envisager le développement de sa qualification.
Posez-lui les questions pour savoir quel poste il a occupé dans l'entreprise, comment il voit évoluer son poste, s’il a effectué une formation dernièrement, etc.
Pendant l’entretien… Vous ne devez pas faire référence aux résultats ou à la qualité du travail du salarié. On rappelle que l'entretien professionnel n'est pas un entretien d'évaluation. Il doit d'ailleurs être clairement différencié de ce dernier. En pratique, vous devez échanger avec votre collaborateur sur son employabilité, ses évolutions en termes d'emploi (changement de poste, promotion, etc.) et envisager, si nécessaire, ses besoins en formation. Précisons que vous n'avez aucunement l'obligation de proposer, pendant cet entretien, une formation au salarié.
Des informations à communiquer. Au cours des entretiens professionnels, vous devez communiquer des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience (VAE). Vous devez également communiquer des informations relatives à l'activation, par le salarié, de son CPF, aux abondements que vous êtes susceptible de financer en tant qu’employeur, ainsi que des informations relatives au conseil en évolution professionnelle.
Après l'entretien… Vous devez formaliser par écrit les échanges intervenus pendant le rendez-vous. Ce document est remis en copie au salarié. Il peut refuser de signer le compte rendu du rendez-vous. Dans ce cas, nous vous conseillons de prendre acte de ce refus par une mention sur le compte rendu lui-même.
Une sanction ! Dans les entreprises de 50 salariés ou plus, si des salariés n’ont pas bénéficié de l’entretien professionnel sur les 6 années précédentes et d’au moins une action de formation non obligatoire, un abondement est inscrit à son compte et l’entreprise verse, dans le cadre de ses contributions au titre de la formation professionnelle, une somme dont le montant ne peut excéder 6 fois le montant annuel « habituel » de l’alimentation. Le salarié est informé de ce versement. L’employeur est contraint de verser 3 000 € sur le compte personnel de formation (CPF) du salarié.
Et pour les autres… La loi ne prévoit pas de pénalité pour les entreprises de moins 50 salariés. Cela n’exclut pas pour autant la possibilité qu’aurait le salarié, qui n’a pas bénéficié d’un entretien professionnel, d’obtenir des dommages-intérêts.
À noter. Pour les entreprises d’au moins 50 salariés, en vue de la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l’emploi, l'employeur met à disposition du comité social et économique (CSE) les informations sur la mise en œuvre des entretiens professionnels et de l'état des lieux récapitulatif.
À retenir
L'entretien professionnel est une obligation qui revient tous les 2 ans. Organisez-le suffisamment tôt en amont pour identifier vos besoins en compétence interne. La perle rare est peut-être déjà dans l'entreprise. Vous ne devez pas la manquer.
J'ai entendu dire
Un salarié peut-il demander la présence d'un autre salarié ou d'un représentant du personnel lors de son entretien professionnel ?Non, l'entretien professionnel est par nature individuel et revêt un caractère confidentiel. A la différence d’un entretien préalable à sanction disciplinaire, le salarié ne peut pas demander la présence d'un représentant du personnel lors de son entretien professionnel.
- Article L6315-1 du Code du travail (entretien professionnel individuel)
- Articles L6323-13 et R6323-3 du Code du travail (sanction en cas de défaut d’entretien)
- Article L1225-57 du Code du travail (congé parental d’éducation)
- Article L2312-26 du Code du travail (information du CSE sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi)
- Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale (article 5)
- Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes (article 12)
- Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (articles 9 et 78, II, 1°)
- Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel (articles 1 et 8)
- Ordonnance n° 2019-861 du 21 août 2019 visant à assurer la cohérence de diverses dispositions législatives avec la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel (article 7)
- Ordonnance n° 2020-387 du 1er avril 2020 portant mesures d'urgence en matière de formation professionnelle
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 6 juillet 2016, n° 15-18419 (défaut d’entretien professionnel et dommages-intérêts)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 juillet 2023 n° 21-24122 (l’entretien professionnel et l’entretien d’évaluation peuvent avoir lieu le même jour)
- Questions-réponses « L’entretien professionnel », du ministère du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion, à jour du 30 septembre 2022