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Gérer mes collaborateurs
Le statut du salarié dans l'entreprise

Gérer le cumul mandat social-contrat de travail

Date de mise à jour : 26/04/2022 Date de vérification le : 26/04/2022 9 minutes

Les dirigeants de société (présidents, directeurs généraux ou gérants) ne sont pas, en principe, salariés. Cependant, selon la nature de la société et les fonctions occupées, les dirigeants pourront cumuler 2 statuts : celui de mandataire social et celui de salarié ; c'est le cas du cumul mandat social – contrat de travail. Voici des éléments qui vous permettront de comprendre cette situation complexe…

Rédigé par l'équipe WebLex.
Gérer le cumul mandat social-contrat de travail


Conditions du cumul mandat social-contrat de travail

2 conditions. Avant d'envisager le cumul mandat social-contrat de travail, il faut examiner la situation juridique de la société et du dirigeant puis apprécier si un contrat de travail existe ou non.

Qu’est-ce qu’un mandataire social ? Le mandat social correspond à la fonction du dirigeant dans l'entreprise. En vertu de son mandat, le dirigeant pourra représenter l'entreprise et aura les pouvoirs de gestion de la société. L’appellation du mandataire varie en fonction de la nature juridique de la société. Le mandat se distingue donc de la simple qualité d'associé. Une personne peut être associée sans avoir de mandat.

Cumul possible avec une activité salariée ? Dans certaines situations, le dirigeant pourra faire valoir des fonctions « doubles » : il aura, à la fois, des pouvoirs de gestion au titre de son mandat mais exécutera aussi des fonctions de salariés. Il pourra, sous conditions, bénéficier d'un cumul de fonctions. Cependant, certaines situations juridiques vont immédiatement exclure la possibilité d'un tel cumul.

Le gérant de SARL. Dans une société à responsabilité limitée (SARL), le mandataire est appelé « gérant ». Ce dernier peut détenir à lui seul l'ensemble des parts sociales de la société mais il peut aussi avoir un associé. Cet associé sera parfois cogérant, c'est-à-dire que les deux associés cogérants sont désignés mandataires.

Exclusion du gérant de SARL. Dans la SARL, il faudra surtout examiner si le gérant est majoritaire, égalitaire ou minoritaire, en fonction du nombre de parts détenues, pour vérifier si le cumul sera possible avec un contrat de travail. Le gérant majoritaire ne pourra jamais avoir le statut de salarié. Seul le gérant minoritaire ou égalitaire pourra cumuler son statut de mandataire avec celui de salarié.

Le mandataire de SAS. La société par actions simplifiées (SAS) permet déjà au mandataire de rémunérer son mandat social via un bulletin de salaire. Cela ne lui donne pas la qualité de salarié pour autant (il n'est pas soumis aux dispositions du droit du travail) mais il cotise au régime général de la sécurité sociale. Ce statut est spécifique et source de confusions par les administrations.

Cumul mandat de SAS et contrat de travail. Rien n'interdit au mandataire de SAS de cumuler son mandat avec un contrat de travail s'il remplit les conditions du cumul. Il recevra alors deux bulletins de salaire : l'un au titre de son mandat social, l'autre pour ses fonctions de salarié dans la société.

Le saviez-vous ?

Le mandataire/associé d’une SASU (unipersonnelle) ne pourra revendiquer la qualité de salarié.

L’administrateur de SA. Dans une société anonyme (SA), un salarié peut tout à fait être nommé administrateur. L'inverse sera également possible mais sous conditions (notamment d'effectifs, de chiffre d'affaires à la clôture de l'exercice).

L’associé de SNC. Dans une société en nom collectif (SNC), les associés ont tout simplement l'interdiction d'être liés à la société par un contrat de travail. Le cumul est donc interdit dans cette forme de société.

Lorsque le cumul est impossible. Ce n’est pas parce que le cumul mandat social-contrat de travail est impossible qu’un salarié doit impérativement démissionner pour exercer un mandat social dans son entreprise. Dans pareil cas, son contrat de travail sera suspendu. Attention, pendant la période de suspension du contrat de travail pour exercer son mandat social, il reste tenu d’une obligation de loyauté à l’égard de son employeur. Un manquement à cette obligation justifierait son licenciement.

L’existence d’un contrat de travail. Dès lors que le mandataire se trouve dans une situation permettant le cumul, encore faut-il remplir la condition principale : prouver l'existence d'un contrat de travail. En effet, le mandataire dispose des pouvoirs de gestion de l'entreprise. Il est en général rémunéré pour cela. Le cumul de son statut avec celui de salarié devra donc permettre d'identifier les points suivants :

  • il occupe des fonctions distinctes techniques de celles qu’il exerce en tant que mandataire ;
  • il est placé dans un lien de subordination juridique ;
  • il perçoit une rémunération spécifique en contrepartie de ces fonctions.
  • l’absence de fraude à la loi.

Attention au lien de subordination ! Un vétérinaire, associé dans sa clinique, se prétendait titulaire d’un contrat de travail pour les fonctions techniques distinctes de son mandat social qu’il occupait en tant que vétérinaire. Mais, pour le juge, il ne rapportait pas la preuve de l’existence d’un lien de subordination, caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. C’est pourtant en justifiant des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur que la relation de salariat pourra être établie, peu importe la volonté exprimée par les parties dans leur contrat ou la dénomination qu'elles lui ont donnée.

Concrètement. On comprend mieux certains cas d'exclusion ci-dessus évoqués : l'associé unique de la SASU pourra difficilement prouver un lien de subordination (il ne peut se donner des ordres à lui-même !). De même, le gérant majoritaire de la SARL, disposant des pleins pouvoirs, aura les mêmes difficultés.

Le saviez-vous ?

Plus les tâches occupées s'apparenteront à des tâches de direction ou de gestion, plus il sera difficile de les distinguer de celles du mandat social. En pratique, l'élément le plus déterminant sera le lien de subordination : le mandataire qui, pour l'exécution de fonctions distinctes, reçoit clairement des ordres (horaires de travail, objectifs professionnels...) pourra faire valoir l'existence d'un contrat de travail.

1er exemple. Le cogérant d'une SARL cumule effectivement son mandat social avec un contrat de travail pour lequel il est en charge de commercialiser des pièces détachées, parce qu’il se trouve sous la subordination de l'autre cogérant qui organise ses horaires de travail, lui donne ses consignes et ordres pour l'approvisionnement, l'organisation et la gestion du point de vente.

2ème exemple. Un gérant et salarié d'une entreprise, employé en qualité de directeur technique, bénéficie de 2 rémunérations distinctes. Les autres associés largement majoritaires peuvent imposer une politique économique, financière et technique et le salarié exerce effectivement ses fonctions sous le contrôle du directeur administratif. Cette situation caractérise bien l'existence d'un contrat de travail.

Attention ! Un contrat de travail écrit peut être remis en cause s’il manque l’un des critères caractérisant l’existence d’un contrat de travail.

Attention (bis) ! Si un salarié également mandataire social de l’entreprise ne se présente plus au travail, n’en tirez pas pour conclusion qu’il a, en plus de son abandon de poste, abandonné ses fonctions de mandataire social. L’abandon d’un mandat social doit être clairement caractérisé.


Conséquences du cumul mandat social-contrat de travail

Plusieurs conséquences. Le cumul mandat social – contrat de travail va avoir plusieurs incidences, notamment sur la protection sociale du mandataire salarié.

En matière d’assurance maladie. L'intérêt de cumuler le mandat avec un contrat de travail repose également sur le fait que le concerné va pouvoir dépendre du régime général de la sécurité sociale pour les risques maladie vieillesse et maternité, le régime général étant souvent préféré au régime réservé aux travailleurs non-salariés (TNS).

A noter, cependant. Plusieurs mandataires sociaux relèvent déjà du régime général, même en dehors d'un cumul (présidents du conseil d'administration ou directeurs généraux d'une SA, gérants de SARL ou de SELARL ne possédant pas la majorité des parts, présidents de SAS...) à condition toutefois qu'ils perçoivent bien une rémunération !

Le mandataire salarié est un salarié ! La relation de travail va être soumise au droit du travail. Ainsi, le salarié bénéficie de l'ensemble des dispositions du Code du travail mais aussi de la convention collective éventuellement applicable (en matière de rémunération, d’avantages, notamment). De même, pour rompre le contrat de travail, il faut alors s'en remettre aux cas légaux de rupture du contrat (démission, licenciement, rupture conventionnelle …).

En matière de chômage. Le dirigeant en principe exclu de l'assurance chômage pourra, uniquement en cas de cumul, relever et bénéficier de l'assurance chômage (Pôle Emploi et AGS) dans la limite des salaires qu'il perçoit au titre de son contrat de travail. Ce point est très certainement le plus important.

Au préalable et en pratique, il sera nécessaire de constituer un dossier d'instruction auprès de Pôle Emploi pour vérifier que les conditions d'affiliation au régime sont bien remplies : Pôle Emploi appréciera la situation réelle, demandera des justificatifs et se positionnera alors sur la cohérence du dossier. Il est recommandé de faire cette demande en amont afin d'éviter que cette instruction ne s'effectue au moment d'une demande d'indemnisation chômage (cela peut être long). Par ailleurs, cela peut éviter de cotiser à tort si les conditions ne sont finalement pas remplies. Si des cotisations ont été versées inutilement, il est possible d'en demander le remboursement.

Le saviez-vous ?

Le dirigeant peut perdre ou renoncer à son mandat mais conserver son statut de salarié et inversement. Cela peut conduire à des situations conflictuelles et litigieuses. C'est d'ailleurs souvent après la perte d'un mandat social (en cas de révocation notamment) que le dirigeant fait valoir l'existence d'un contrat de travail devant le Conseil de Prud'hommes : il peut arriver qu'un mandataire soit révoqué et qu'il perde ainsi sa place dans la société. S'il parvient à démontrer qu'un contrat de travail existait, la révocation n'entraînant pas la rupture du contrat de travail, le dirigeant déchu pourrait faire reconnaître un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

A retenir

Si le cumul d'un mandat social et d'un contrat de travail présente beaucoup d'intérêt, il n'est pas si évident de remplir toutes les conditions pour en bénéficier. Avant toute chose, il sera nécessaire de vérifier que la situation est éligible au cumul.

J'ai entendu dire

Le dirigeant « salarié » doit-il disposer d'un contrat de travail écrit ?

Non, cela n'est pas obligatoire, tant qu'il peut prouver l'existence d'un contrat de travail dans les faits (fonctions distinctes correspondant à un emploi effectif, lien de subordination et rémunération). Le dirigeant salarié licencié peut-il percevoir des indemnités ?

Oui. Le dirigeant qui cumule mandat social et contrat de travail est bel et bien salarié pour ses fonctions distinctes. Ainsi, si l'employeur souhaite licencier le salarié, il devra lui verser toutes les indemnités afférentes (indemnité de licenciement, indemnités compensatrices de congés payés ou de préavis...)
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Sources
  • Article L 311-3 du Code de la Sécurité Sociale
  • Loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives
  • Directive Unédic n° 36-02 du 31 juillet 2002 relative aux droits de dirigeants mandataires et aux autres régimes d’assurance chômage
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 14 octobre 2015, n° 14-10960
  • Arrêt de la Cour d’Appel de Nancy, du 10 février1999
  • Arrêt de la Cour d’Appel de Paris, 18e chambre C, du 3 juin 1993
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 7 mars 2018, n° 16-19577 (contrat de travail fictif)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 5 avril 2018, n° 16-18589 (confusion abandon des fonctions de gérant et abandon de poste)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 16 mai 2018, n° 16-22655 (obligation de loyauté du salarié et contrat de travail suspendu pour l’exercice de son mandat social)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 janvier 2020, n° 17-13498 (exemple du gérant de SARL exerçant une activité salariée dans sa SARL)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 21 octobre 2020, n° 19-16352 (exemple d’un vétérinaire associé se prétendant salarié)
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