Aller au contenu principal
Gérer mes collaborateurs
Gérer la relation contractuelle

Gérer les usages dans l’entreprise

Date de mise à jour : 10/07/2023 Date de vérification le : 10/07/2023 10 minutes

Un salarié vous réclame la mise à disposition d’un téléphone professionnel, car ses collègues de service en disposent d’un. Il invoque un « usage » que vous avez instauré. Peut-il en bénéficier ? Devez-vous vous conformer à cet usage ? Avez-vous une possibilité d’y renoncer ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Gérer les usages dans l’entreprise

Un usage, qu’est-ce que c’est ?

Définition. Un usage est une pratique que vous avez instaurée, ou que les salariés ont instaurée sans opposition de votre part, et qui engage l’entreprise. Pour être reconnue en tant qu’usage, cette pratique doit répondre à plusieurs critères.

Quels critères ? Pour être reconnue en tant qu’usage, la pratique doit être générale, constante et fixe. La généralité signifie qu’elle s’applique à tous les salariés ou à une partie objectivement déterminée d’entre eux. La constance est appréciée selon le nombre de répétitions de la pratique. La fixité implique une formule déterminable par avance.

Des critères impératifs ! Ce n’est pas parce qu’une entreprise verse des primes de fin d’année tous les ans qu’il s’agit pour autant d’un usage si elles ne répondent pas aux critères de constance, de généralité et de fixité, que ce soit dans le montant ou dans le mode de calcul.

Attention au critère de généralité ! Une prime versée à plusieurs salariés sans tenir compte de leur catégorie professionnelle (attachée à la catégorie de cadre, d’agent de maîtrise ou d’ouvrier) doit reposer sur des raisons objectives justifiant la différence de traitement. En revanche, une prime versée à plusieurs salariés d’une même catégorie ne répond pas nécessairement au critère de généralité. Le critère de généralité est, toutefois, rempli lorsque qu’une prime est versée à un seul salarié qui est l’unique représentant d’une catégorie de personnel. 

Sur quoi portent les usages ? Les usages peuvent porter sur toutes sortes de choses : l’application volontaire d’une convention collective, la mise à disposition d’un outil de travail (téléphone, ordinateur, véhicule, etc…), la rémunération (l’attribution d’une prime, l’indemnisation de l’arrêt maladie sans délai de carence, par exemple). Mais les usages ne peuvent pas restreindre les droits donnés aux salariés par la loi ou les conventions collectives.

Caractère impératif. L’usage a force obligatoire pour l’employeur, c’est-à-dire que ce dernier est tenu de l’appliquer.

Le saviez-vous ?

Un nouveau salarié peut demander à profiter d’un avantage résultant d’un usage d’entreprise, même s’il n’en a lui-même jamais bénéficié auparavant. Cela s’explique par le fait que l’usage s’impose dans l’entreprise.


Un usage, pour toujours ?

Une possibilité de dénonciation. L’usage licite s’impose à l’employeur tant qu’il est applicable. Et il le sera tant qu’il n’aura pas été dénoncé ou qu’il n’aura pas été remplacé par un accord collectif ayant le même objet.

Une procédure de dénonciation ? L’usage peut être dénoncé après que vous ayez informé chaque salarié bénéficiaire et les représentants du personnel, en respectant un délai de prévenance suffisant. Ces conditions sont cumulatives.

Une dénonciation pas toujours nécessaire ? Un employeur a versé, pendant 10 mois, une prime panier à ses salariés alors que les conditions de versement de cette prime n’étaient pas réunies, d’après la convention collective applicable à l’entreprise. Apprenant qu’il avait fait une mauvaise interprétation de ce texte, l’employeur a cessé de verser cette prime. Ce qu’ont contesté les salariés qui voyaient là un usage que l’employeur aurait dû dénoncer selon la procédure spécifique. Mais le juge n’a pas validé l’usage, le versement de cette prime étant occasionné par une erreur d’interprétation, l’employeur n’avait pas la volonté de créer un usage.

L’information des représentants du personnel. Le rôle des représentants du personnel n’est pas à négliger puisqu’ils vont pouvoir intervenir dans un processus de négociation. Si votre entreprise dispose d’un comité social et économique (CSE), vous devez inscrire la dénonciation de l’usage à l’ordre du jour de la prochaine réunion du comité.

Le saviez-vous ?

Vous pouvez dénoncer un usage même en l’absence de représentants du personnel, si vous n’êtes pas responsable de cette carence.

L’information des salariés. L’information doit être faite de manière individuelle et par voie écrite. Idéalement, vous pouvez adresser une lettre recommandée avec avis de réception aux salariés bénéficiaires de l’usage pour les informer de cette dénonciation et de sa date d’effet.

Attention. Une information par voie d’affichage ne constitue pas une information « individuelle ».

Un délai suffisant. Ce délai n’est pas fixé par les textes mais il doit permettre aux représentants du personnel, lorsque l’entreprise en est munie, d’engager des négociations. Mais la négociation n’est pas impérative : c’est-à-dire que vous devez laisser un délai suffisant mais que les organisations syndicales ou les représentants du personnel ne sont pas obligés d’ouvrir des négociations.

A noter. Vous n’avez pas à motiver votre volonté de dénoncer un usage. Mais cette décision doit être anticipée pour que la procédure soit respectée, que les représentants du personnel, s’ils le souhaitent, ouvrent de nouvelles négociations.

Effet de la dénonciation. Une fois l’usage régulièrement dénoncé et le délai de prévenance (qu’on peut appeler « préavis ») expiré, il ne trouve plus à s’appliquer. A partir de ce moment, plus aucun salarié ne sera fondé à en demander son exécution.

Attention ! Si vous continuez d’appliquer un usage que vous avez dénoncé, il vous faudra renouveler la procédure de dénonciation lorsque vous souhaiterez définitivement vous en défaire.

Le saviez-vous ?

En cas de transfert d’entreprise, le nouvel employeur est tenu de respecter les usages de son prédécesseur ou de les dénoncer en respectant la procédure d’information des représentants du personnel, d’information individuelle des salariés et de préavis « suffisant ».

À retenir

L’usage est une pratique générale, fixe et constante qui s’impose à l’employeur tant qu’il n’a pas été dénoncé. Il doit profiter à tous les salariés d’une catégorie déterminée, le cas échéant.
 

Pour un contenu personnalisé, inscrivez-vous gratuitement !
Déjà inscrit ? Connectez-vous
Sources
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 4 mai 1988, n° 86-41678 (un usage dénoncé qui continue d’être appliqué pendant plus d’un an est maintenu en vigueur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 14 novembre 1990, n° 88-42325 (délai de prévenance suffisant)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 mars 1992, n° 88-44.531 (un salarié ne peut exiger le bénéfice d’une prime régulièrement dénoncée plus d’un an et demie avant son embauche)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 octobre 2001, n° 99-43661 (transfert d’entreprise et poursuite des usages)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 janvier 2005, n° 02-42819 (inscription à l’ordre du jour de la réunion CE)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 novembre 2005, n° 04-40339 (carence de délégués du personnel faute d’élections organisées par l’employeur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 27 mars 2008, n° 07-40437 (respect d’un délai suffisant pour permettre une éventuelle négociation)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 juin 2011 n° 10-14196 (une pratique isolée ne constitue pas un usage, sauf à être constante, générale et fixe)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 11 janvier 2017, n° 15-15819 (définition et critères d’un usage – exemple de la prime de fin d’année)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 juin 2017, n° 16-17094 (une erreur d’interprétation de la convention collective ne crée pas un usage)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 24 juin 2020, n° 18-20506 (appréciation du critère de généralité)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 24 juin 2020, n° 18-25451 (appréciation du critère de généralité)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 21 juin 2023, n° 21-22076 (appréciaton du critère de généralité pour une prime versée à un seul salarié, seul représentant d’une catégorie de personnel)
Voir plus Voir moins
Voir les sources
Votre cabinet mérite un site Internent sur-mesure. Nous vous l'offrons !
Abonnez vous à la newsletter
Accéder à WebLexPro
Accéder à WeblexPro