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Gestion d’une copropriété en difficulté : ce qu’il faut savoir

Date de mise à jour : 26/04/2022 Date de vérification le : 26/04/2022 16 minutes

Une copropriété peut se retrouver en difficulté. Si cette situation devait survenir, 3 procédures sont prévues par la Loi sont là pour vous aider : la procédure d'alerte pour les copropriétés fragiles, la procédure applicable aux copropriétés en difficulté et la procédure en cas d'état de carence…

Rédigé par l'équipe WebLex. En collaboration avec Marie Caderon, juriste spécialisée en droit des affaires.
Gestion d’une copropriété en difficulté : ce qu’il faut savoir

Copropriété en difficulté : les critères de définition

2 types de difficultés. Une copropriété peut souffrir de 2 atteintes : le défaut d’entretien et le manque de trésorerie.

Le défaut d’entretien. Dans cette situation, c’est l’état général du bâtiment qui est atteint. Le défaut d’entretien résulte souvent de la non-exécution de travaux qui sont indispensables, entraînant la dégradation du bâtiment, de l’existence de malfaçons affectant la construction, de l’entretien insuffisant de l’immeuble et de ses équipements.

Le manque de trésorerie. C’est la situation dans laquelle les ressources financières sont insuffisantes. C’est le cas, par exemple, lorsque :

  • les charges de copropriété ne sont plus payées régulièrement ;
  • le nombre de locataires dans l’immeuble est plus important que celui de propriétaires ;
  • le nombre de demande de logements sociaux augmente sur plusieurs années, signe de précarité des copropriétaires en question ;
  • des troubles, des tensions, existent entre les résidents au sein de la copropriété ;
  • les copropriétaires manquent d’implication, ne participent pas ou plus aux assemblées générales et se désintéressent de l’état général et financier de leur patrimoine.


Copropriété en difficulté : la procédure classique

Objectif. La procédure dite « classique » a pour finalité est de rétablir le fonctionnement normal de la copropriété. La procédure est marquée par la nomination, dans un premier temps, d'un mandataire, puis dans un second temps, par celle d'un administrateur provisoire.

Nomination d’un mandataire. Dans cette procédure, pour commencer, un mandataire ad hoc est nommé, afin d’analyser la situation. Il va aider la copropriété à analyser sa situation, ses difficultés et à trouver des solutions de redressement.

Nomination d’un administrateur provisoire. Cette nomination est souvent suivie de la nomination d’un administrateur provisoire par une décision du Tribunal de Grande Instance (TGI). Il se substitue au syndic, qui est dessaisi, et s’immisce dans sa gestion. Il a pour mission d’opérer le rétablissement de la copropriété. Il intervient pour rétablir le fonctionnement financier de la copropriété et pour rétablir l’état des bâtiments (travaux d’entretien ou de réfection).

Vérifier les créances. Dans un délai de 2 mois à compter de sa nomination, l'administrateur provisoire va procéder à des mesures de publicité légales. pour permettre aux aux créanciers de produire les éléments nécessaires à l’évaluation de leurs créances. Concrètement, c'est à partir de la publication de l’ordonnance de désignation de l’administrateur provisoire que les créanciers du syndicat doivent déclarer leurs créances. Après vérification des créances déclarées, l'administrateur provisoire va établir et publier la liste des créances déclarées. Les créanciers disposeront alors d'un délai de 2 mois à compter de la publication de la liste pour contester son contenu auprès du président du TGI.

A noter. Les créances non déclarées régulièrement dans le délai de 2 mois sont inopposables à la procédure.

Apurer les dettes. L’administrateur provisoire peut conclure avec les copropriétaires de bonne foi des échéanciers individualisés de remboursement de leurs dettes vis-à-vis du syndicat. Le montant effacé est réparti entre les créanciers du syndicat proportionnellement au montant de leur créance. Le juge peut ordonner la mainlevée des éventuelles inscriptions hypothécaires relatives à ces dettes inscrites sur les locaux appartenant au syndicat des copropriétaires.

Vendre des actifs ? Si le syndicat des copropriétaires dispose d'actifs cessibles, notamment des locaux pouvant permettre l’apurement des dettes du syndicat, l'administrateur provisoire peut demander au juge l’autorisation de réaliser certaines cessions (impliquant en conséquence une modification du règlement de copropriété et de l’état descriptif de division !).

Substitution au syndic. Dans le cadre de sa mission de redressement de l’immeuble en difficulté, l’administrateur provisoire se substitue au syndic. Ainsi :

  • il doit informer au préalable les copropriétaires et le conseil syndical ;
  • il est habilité à prendre toutes les mesures nécessaires, dans la limite des pouvoirs qui lui ont été transférés par le Président du TGI qui l’a désigné ;
  • il a le droit de procéder à des injonctions de payer, préalables à des saisies, ou éventuellement à décider du recours à des hypothèques ou des cautionnements (cas des impayés de charges).

Etablir des rapports. Il établit des rapports, qui sont transmis régulièrement au greffe du TGI. Un rapport final en fin de mission est également rédigé, comportant ses recommandations.

Le saviez-vous ?

L'administrateur provisoire peut établir un plan d'apurement des dettes sur une durée de 5 ans maximum. Ce plan comporte un échéancier de versements auprès des créanciers du syndicat. Dans le cadre de ce plan, les créanciers ont 3 mois pour déclarer leur créance.

Lorsqu’un créancier n’a pas pu déclarer sa créance dans le délai de 3 mois, pour un motif qui n’est pas de son fait, il peut saisir le juge afin qu’il puisse tout de même le faire. Il a 6 mois, à compter de la publication de l’ordonnance de désignation de l’administrateur provisoire, pour le faire.

Attention ! Pendant la mission de l’administrateur provisoire, les actions intentées par les créanciers des copropriétaires débiteurs sont suspendues. Le recouvrement de la dette par le syndic de copropriété est prioritaire à toute autre créance (il est notamment prioritaire devant l’hypothèque d’une banque et devant les impôts).

Le saviez-vous ?

Les copropriétés en difficulté peuvent également être gérées et redressées par une commission nommée par le Préfet. Cette commission a pour mission d’élaborer un plan de sauvegarde, relatif à l’organisation de la copropriété, au statut de ses équipements, et de fixer la réalisation de travaux.


Copropriété en difficulté : l’état de carence

L'état de carence… Il caractérise les situations dans lesquelles le syndicat des copropriétaires d'un immeuble rencontre des difficultés financières ou de gestion telles qu'il ne peut plus assurer la conservation de l'immeuble ou la sécurité des occupants.

…un préalable à l’expropriation. En dernier recours, si aucune autre solution n’est viable, le juge peut prononcer l'expropriation de l'immeuble. Cette procédure comporte 2 étapes : la déclaration de l'état de carence, puis l'expropriation de l'immeuble.

A noter. L'expropriation de l’immeuble peut être poursuivie, en vue :

  • soit de la réhabilitation de l’immeuble ;
  • soit de la démolition totale ou partielle de l’immeuble (avec plan de relogement).

Experts. Un ou plusieurs experts, désignée par le président du TGI, sont chargés de constater l'importance du déséquilibre financier, ainsi que la nature et l'importance des travaux à mettre en œuvre. Les conclusions des experts sont notifiées au syndicat des copropriétaires et à chaque copropriétaire.

Exemple. L’état de carence n’est pas démontré dès lors que l’inexécution des travaux est imputable aux copropriétaires qui n’ont pas payés les charges de copropriété relatifs aux travaux.

Le saviez-vous ?

Une possibilité d'expropriation des parties communes a été instaurée à titre expérimental et pour une durée de 10 ans à compter de la promulgation de la Loi Alur, soit le 27 mars 2014.


Copropriété en difficulté : les autres procédures possibles

Les opérations de requalification des copropriétés en difficulté (ORCOD). Des opérations de requalification des copropriétés dégradées peuvent être mises en place par l'Etat ou les collectivités territoriales. L’objectif est de lutter contre l'indignité et la dégradation des immeubles en copropriété, dans le cadre d'un projet urbain et social ou d'une politique locale de l'habitat. Cette procédure prévoit alors un dispositif d'intervention immobilière et foncière (acquisitions de lots de copropriété, accompagnement social des occupants, dispositifs de lutte contre l'habitat indigne, offre de relogement, mise en œuvre de la procédure d'administration renforcée, etc.).

La procédure menée dans le cadre d’un plan de sauvegarde. Cette procédure est applicable en cas de graves difficultés sociales, techniques et financières, et risquant à terme de compromettre la conservation des groupes d'immeubles ou ensembles immobiliers concernés.

Objectif. Le plan de sauvegarde fixe les mesures nécessaires pour redresser la situation financière de la copropriété, et réaliser des travaux de conservation de l'immeuble ou tendant à la réduction des charges de fonctionnement… le tout dans un délai de 5 années !

ORCOD déclarée d’intérêt national. Une opération ORCOD peut être déclarée d’intérêt national par l’Etat lorsque les critères cumulatifs suivants sont remplis :

  • l'opération de requalification présente des enjeux majeurs en matière d'habitat dégradé ;
  • l'opération de requalification présente une complexité de traitement particulière ;
  • l'opération de requalification nécessite de lourds investissements ;
  • le droit de préemption urbain renforcé a été instauré.

Création d’une prise de possession accélérée des copropriétés dégradées. La Loi Elan crée une procédure de prise de possession accélérée pour les bâtiments dégradés situés dans les ORCOD d’intérêt national, lorsque des risques sérieux pour la sécurité des occupants rendent cette prise de possession anticipée nécessaires. Il faut également qu’un projet de plan de relogement des occupants ait été établi. Notez que les modalités d’application de cette procédure seront précisées dans un Décret non encore paru à l’heure où nous rédigeons cette fiche.

A retenir

Une copropriété peut souffrir de 2 atteintes : le défaut d’entretien et le manque de trésorerie. En cas de problèmes, plusieurs procédures existent afin de remédier aux difficultés rencontrées par la copropriété. Si les difficultés sont trop importantes, le juge peut faire une déclaration de carence qui peut aller jusqu’à l’expropriation…

J'ai entendu dire

Existe-il des aides pour les copropriétés en difficultés ?

Oui, il existe diverses aides spécifiques pour aider les copropriétés en difficultés. Notez que 2 nouvelles aides sont disponibles, depuis le 1er janvier 2017, pour venir en aide aux copropriétés en difficulté. La 1ère aide s’appelle « Habiter Mieux ». Elle vise à accélérer l’engagement de travaux de rénovation énergétique : son montant maximum par logement est de 3 930 €.

La 2nde aide vise à accompagner le portage ciblé dans les copropriétés en difficulté : le portage ciblé permet de faciliter le traitement de la dette de la copropriété en offrant un soutien aux propriétaires les plus endettés, le plus souvent par le rachat de leur bien par un opérateur missionné à cet effet (un organisme HLM le plus souvent). D’un montant maximum de 21 000 € par logement sur 6 ans, cette aide permet de couvrir la maîtrise d’ouvrage et la conduite de projets, l’accompagnement social et le relogement, les frais de gestion.

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Sources
  • Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis (articles 29-1)
  • Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (article 202)
  • Décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis (articles 62-15 et suivants)
  • Décret n° 2018-11 du 8 janvier 2018 relatif aux modalités d'exercice de l'action en relevé de forclusion ouverte aux créanciers d'un syndicat des copropriétaires en difficulté placé sous administration provisoire et portant diverses modifications de la procédure d'administration provisoire
  • Articles L 615-6 et suivants du Code de la construction et de l’habitation (procédure d’urgence)
  • Articles L 741-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation (requalification de copropriétés dégradées)
  • Communiqué de presse de l’ANAH du 5 octobre 2016
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 26 janvier 2017, n° 15-25971 (état de carence non démontré)
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