Mettre en place le travail de nuit
Instaurer le travail de nuit
Une organisation exceptionnelle. Par son caractère exceptionnel, le travail de nuit est strictement encadré, soit par un accord collectif, soit par la Loi. Les travailleurs de nuit bénéficient d’une protection et d’un suivi médical particuliers.
Définition du travail de nuit. Lorsqu’il est prévu par accord collectif, le travail de nuit correspond, en principe, à la période de travail d’au moins 9 heures consécutives incluant la période de minuit à 5 heures du matin, qui commence au plus tôt à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures.
A défaut d’accord collectif… A défaut d’accord déterminant le travail de nuit, celui-ci correspond, d’une manière générale, à la période de travail effectuée entre 21 heures et 6 heures du matin.
Le saviez-vous ?
Le travailleur de nuit est celui qui accomplit au moins 2 fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de travail de nuit ou 270 heures de travail de nuit pendant une période de 12 mois consécutifs (à défaut de précisions dans la convention collective) ou tout autre durée fixée par une convention collective.
Attention ! Toutes les heures comprises dans l’horaire habituel de travail du salarié qui répondent à cette définition sont réputées accomplies. Cela inclut les heures non effectivement travaillées en raison des congés, des jours de formation, des jours fériés, de la participation aux réunions du CE et des crédits d’heures des représentants du personnel.
Travail exceptionnel. Le travail de nuit doit être justifié par la nécessité de maintenir l’activité de l’entreprise, y compris la nuit. Il doit permettre d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.
Un accord collectif obligatoire ? Le travail de nuit ne peut être institué dans l’entreprise, ou étendu à de nouveaux salariés, qu’à la condition qu’un accord collectif ou qu’une convention collective ait été conclu(e).
A défaut d’accord… L’employeur ne peut mettre en place des horaires de nuit qu’à la condition qu’il ait sérieusement et loyalement engagé des négociations en vue de conclure un accord collectif. Si un tel accord n’a pas pu être conclu, le travail de nuit peut être autorisé par l’inspecteur du travail.
Le saviez-vous ?
Le médecin du travail doit être consulté avant toute mise en place ou extension de l’organisation du travail de nuit dans l’entreprise.
Des conditions précises. L’accord d’entreprise qui instaure le travail de nuit doit indiquer les justifications du recours aux horaires de nuit. Il doit définir la période de nuit, les contreparties (de repos compensateur et, le cas échéant, financières) accordées aux salariés, l’organisation des temps de pause, les mesures destinées à améliorer les conditions de travail des salariés, à faciliter l’articulation de leur activité professionnelle nocturne avec leur vie personnelle et avec l’exercice de responsabilités familiales et sociales (notamment pour les moyens de transport). L’accord doit également assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment par l’accès à la formation.
Gérer le travail de nuit
Travail de nuit : quelles limites ? Le temps de travail de nuit, parce qu’il fait courir des risques supplémentaires sur la santé des travailleurs et sur l’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie sociale, est strictement limité par la Loi.
Durée hebdomadaire. La durée hebdomadaire ne doit pas dépasser 40 heures. Elle est calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives. Elle peut, grâce à un accord collectif, être portée à 44 heures par semaine.
Attention. Le simple dépassement de la durée hebdomadaire pour un travailleur de nuit ouvre le droit, pour le salarié qui le demande, au versement d’une indemnité spécifique sans qu’il n’ait besoin de prouver un dommage.
Durée quotidienne. La durée quotidienne est, quant à elle, limitée à 8 heures. Un accord collectif (ou l’inspecteur du travail, en cas de circonstances exceptionnelles) peut, toutefois, la porter à 12 heures par jour.
Le saviez-vous ?
Vous pouvez solliciter l’inspecteur du travail afin que celui-ci autorise, exceptionnellement, un allongement de la durée quotidienne du travail de nuit. Pour cela, vous devez justifier dans votre demande le besoin d’augmenter cette durée. Vous devez également joindre l’avis du CE (ou, à défaut, des délégués du personnel ou, s'il existe, du CSE) ainsi que le procès-verbal de la consultation des délégués syndicaux s’ils existent dans l’entreprise.
Si l’entreprise ne comporte aucun représentant du personnel, vous devez justifier l’information préalable de vos salariés.
Le défaut de réponse de l’inspecteur sous 15 jours (à compter du dépôt de votre demande) vaut acceptation de la dérogation vous permettant d’augmenter la durée du travail de nuit.
Travaux urgents ? L’employeur peut, exceptionnellement, augmenter la durée quotidienne du travail de nuit en cas de travaux urgents, sans solliciter l’accord préalable de l’inspecteur du travail. Dans ce cas, une demande de régularisation devra être envoyée ultérieurement.
Des contreparties obligatoires ! Le travail de nuit doit obligatoirement être accompagné par l’octroi de contreparties en repos compensateur rémunéré. Il est également possible d’accorder, en plus de ce repos compensateur, une contrepartie financière. Mais attention, un accord ne peut pas substituer une compensation financière au repos compensateur.
A noter. Les travailleurs de nuit bénéficient d’un suivi médical spécifique auprès de la médecine du travail. Le renouvellement de leur visite médicale doit se faire tous les 3 ans.
Le saviez-vous ?
Dans l’hypothèse où l’employeur a choisi la contrepartie financière, le juge estime que les heures majorées doivent impérativement être mentionnées sur le bulletin de paie et payées en conséquence. Ces heures ne peuvent être considérées comme rémunérées car le salaire du salarié est supérieur au minimum conventionnel.
Travail de nuit : questions pratiques / cas particuliers
Un salarié demande à être changé d’affectation… L’un de vos salariés qui occupe un poste de nuit demande à changer d’affectation afin de travailler sur un poste de jour. Dans ce cas, il est prioritaire pour l’attribution d’un emploi de jour qui correspond à sa catégorie professionnelle.
A noter. Les travailleurs de jour sont également prioritaires pour obtenir un poste de nuit, s’ils le sollicitent.
Travailleurs mineurs. Notez que, sauf dérogations, les jeunes de moins de 18 ans ne peuvent pas travailler de nuit, sous peine d’encourir une amende de 1 500 €.
Femme enceinte. Une femme enceinte, affectée à un poste de nuit, peut demander à changer d’affectation, afin d’occuper, le temps de sa grossesse, un poste de jour. Le médecin du travail peut également constater que son état n’est pas compatible avec un poste de nuit. Dans ce cas, sa nouvelle affectation peut être prolongée d’un mois après son retour de congé maternité.
Attention ! Le changement d’affectation de la salariée enceinte ne doit entraîner aucune perte de salaire.
Un changement d’affectation impossible ? Si l’entreprise ne peut pas offrir un poste de jour, pour la période de grossesse de la salariée enceinte, l’employeur doit en informer la salariée enceinte et prévenir le médecin du travail. Dans ce cas, le contrat de travail de la salariée est suspendu le temps de la grossesse. Elle bénéficie alors d’allocations journalières de la sécurité sociale et d’un complément de salaire versé par l’employeur.
Le passage à l’heure d’hiver/d’été. Lors du passage à l'heure d'hiver, les travailleurs de nuit voient leur temps de travail augmenté d'une heure. La Loi ne prévoyant pas de disposition spécifique, cette heure « supplémentaire » doit être traitée comme n'importe quelle heure supplémentaire : elle doit donc donner lieu à une majoration de salaire, ou à un repos compensateur. Pensez à vérifier les dispositions de votre convention collective à ce sujet. Par ailleurs, lors du passage à l'heure d'été, les travailleurs de nuit sont épargnés d'une heure. A moins que la convention collective applicable à l'entreprise ne prévoie d'autres modalités, l'employeur est fondé à opérer une retenue équivalant à cette heure perdue sur la rémunération des travailleurs concernés.
Le saviez-vous ?
Le travailleur de nuit est celui qui accomplit au moins 2 fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de travail de nuit ou 270 heures de travail de nuit pendant une période de 12 mois consécutifs (à défaut de précisions dans la convention collective) ou tout autre durée fixée par une convention collective.
A retenir
Le travail de nuit est un mode d’organisation du temps de travail exceptionnel. Il est défini par un accord collectif et correspond à la période de travail d’au moins 9 heures consécutives incluant la période de minuit à 5 heures du matin. Les travailleurs de nuit bénéficient d’un repos compensateur et d’un suivi médical particulier.
J'ai entendu dire
Un de mes salariés refuse de travailler de nuit. Il m’a indiqué qu’il n’a pas de solution pour garder ses enfants pendant son temps de travail et qu’il n’a aucune autre solution que de refuser la nouvelle organisation du temps de travail dans l’entreprise. Son refus peut-il constituer un motif de licenciement ?Un salarié peut refuser de travailler de nuit si cette organisation du temps de travail n’est pas compatible avec ses obligations familiales (garde d’enfant, prise en charge d’une personne dépendante…). Ce refus n’est pas une faute, ni un motif de licenciement. Le salarié peut demander son affectation à un poste de jour.
- Articles L 3122-1 à L 3122-24 du Code du travail
- Articles R 3122-1 à R 3122-15 du Code du travail
- Article R 3124-15 du Code du travail (sanction pénale)
- Décret n° 2014-1290 du 23 octobre 2014 relatif aux exceptions à l'application du délai de deux mois de naissance des décisions implicites d'acceptation sur le fondement du II de l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social)
- Décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la modernisation de la médecine du travail
- Réponse ministérielle Andrieux, du 13 octobre 1976, Assemblée nationale, n° 32310 (changement d’heure)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 7 mars 2012, n° 10-21744 (heures réputées accomplies)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 16 mai 2018, n° 16-20691 (substitution du repos compensateur dans un accord concernant le transport)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 janvier 2019, n° 17-22018 (critère du travail de nuit)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 25 novembre 2020, n°19-14247 (absence de mention = présomption de non-paiement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 27 septembre 2023, no 21-24782 (le dépassement de la durée maximale de travail hebdomadaire ouvre automatiquement droit à réparation)