Prévoir une période d'essai
Période d’essai : une possibilité…
Un objectif. La période d’essai va vous permettre, en qualité d’employeur, d’avoir un aperçu des compétences de votre nouveau salarié et d’apprécier leur parfaite adéquation avec le poste. Aucune règle n’impose de prévoir une période d’essai dans le contrat, même si c’est souvent souhaitable. Pourquoi ?
Ce n’est pas obligatoire… La période d’essai n’est, en principe, pas obligatoire. Mais pour qu’elle soit valablement appliquée, elle doit être expressément prévue dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail, tant dans son principe que dans sa durée, et ce dès l’engagement du salarié. Et elle doit résulter d'une manifestation de volonté non équivoque du salarié, matérialisée par la signature du contrat ou de la lettre d’engagement.
C’est souhaitable… Bien que non obligatoire, elle reste souhaitable. Il est donc conseillé d’insérer dans le contrat de travail une période d’essai, qui présente un double intérêt :
- pour vous, en qualité d’employeur, elle vous permettra d’évaluer les compétences du salarié, sa capacité d’adaptation dans le poste occupé et dans l’entreprise de manière plus générale ;
- pour le collaborateur, ce sera aussi l’occasion de vérifier que le poste répond à ses attentes.
Le saviez-vous ?
Si vous prévoyez une période d’essai, il est impératif de le prévoir dans le contrat de travail (faire également mention de sa durée). A défaut, le salarié sera présumé embauché sans période d’essai. Cela vaut même si le salarié a sciemment refusé de signer son contrat de travail : aucune période d’essai ne trouve alors à s’appliquer.
L’intérêt… Pendant la période d’essai, sauf disposition conventionnelle contraire, l’employeur comme le salarié pourra mettre fin au contrat de travail, sans avoir de procédure spécifique à respecter (un délai de prévenance est en principe à respecter), ni d’obligation de motivation, ni d’indemnité à verser.
À noter. Un employeur peut revenir sur une rupture de la période d’essai, en annulant la décision de rupture. Cette annulation de la rupture est réputée acceptée par le salarié qui continue à travailler pour l’entreprise après l’expiration de cette période d’essai.
Ne confondez pas avec… La période d’essai ne doit pas être confondue avec la période dite probatoire qui s’adresse au salarié déjà en poste dans l’entreprise et dont les fonctions sont amenées à changer (nouveau poste, promotion, etc.).
Ne confondez pas non plus avec… De la même manière un essai professionnel n’est pas une période d’essai : définie comme une sorte d’examen, elle permet simplement de vérifier la qualification professionnelle du salarié dont l’embauche est envisagée. Dans le cadre d’un test professionnel, la personne ne réalise pas une prestation de travail, sous la subordination juridique d’un employeur (un test de cette nature ne caractérise pas l’existence d’un contrat de travail).
Période d’essai : une durée variable… maximale
Des distinctions à faire. Selon la nature du contrat de travail (CDD ou CDI), selon la situation (intérim, apprentissage, travail à temps partiel, etc., la durée de la période d’essai varie).
Pour les salariés en CDI… Dans le cadre général d’un CDI, la période d’essai ne peut pas excéder (sous réserves des dispositions spécifiques des conventions collectives) les durées maximales prévues par la Loi, qui sont fonction de la catégorie dont dépend le salarié :
- pour les ouvriers et employés : 2 mois,
- pour les agents de maîtrise et les techniciens : 3 mois,
- pour les cadres : 4 mois.
Des délais plus courts. Vérifiez votre convention collective, ainsi que la date de sa dernière négociation : si elle prévoit un délai plus court que celui prévu par la loi, sa durée ne s’appliquera que si la convention a été renégociée depuis le 26 juin 2008. Les délais plus courts prévus antérieurement ne sont désormais plus applicables. A l’inverse, les délais plus longs ne peuvent plus être prévus depuis le 26 juin 2008.
Délai raisonnable ? La durée raisonnable de la période d’essai s’apprécie, compte tenu de sa finalité, selon différents critères. Elle doit notamment permettre à l’employeur :
- d’évaluer les compétences du salarié dans les conditions normales d’exécution de son travail;
- de s’assurer que le salarié a toutes les qualités nécessaires pour assumer ses fonctions et les missions qui lui sont confiées.
Le saviez-vous ?
Un renouvellement de la période d’essai est possible, sous réserve qu’il soit prévu par un accord de branche étendu et par le contrat de travail, mais également sous réserve d’obtenir l’accord exprès du salarié.
Pour les salariés en CDD… La période d'essai ne peut excéder une durée calculée à raison d'un jour par semaine, dans la limite de 2 semaines lorsque la durée initialement prévue au contrat est au plus égale à 6 mois et d'un mois dans les autres cas (si le contrat ne comporte pas de terme précis, la période d'essai est calculée par rapport à la durée minimale du contrat).
Pour les salariés en intérim… Le contrat de mission peut comporter une période d'essai dont la durée est normalement fixée par convention, accord professionnel de branche étendu ou par accord d'entreprise. A défaut, la durée ne peut pas excéder 2 jours si le contrat est conclu pour une durée inférieure ou égale à un mois, 3 jours si le contrat est conclu pour une durée comprise entre 1 et 2 mois, 5 jours si le contrat est conclu pour une durée supérieure à deux mois.
Pour les salariés à temps partiel… La période d'essai d'un salarié à temps partiel ne peut avoir une durée calendaire supérieure à celle du salarié à temps complet.
Pour les apprentis… La durée de l’essai, pour un apprenti, est fixée à 2 mois.
Le saviez-vous ?
En principe, le décompte de la période d’essai s’apprécie en jours calendaires et non en jours travaillés. Il est toutefois possible de prévoir un décompte en jours travaillés, mais la durée de la période d’essai, elle, ne doit pas dépasser les durées maximales admises, appréciées en jours calendaires.
Le point de départ de la période d’essai est fixé au commencement de l’exécution du contrat et son terme est fixé au dernier jour à minuit. Ainsi, par exemple, si vous embauchez un salarié en CDI le 15 mars avec une période d’essai de 3 mois (non renouvelable), elle prend fin le 14 juin à minuit.
En cas d’arrêt de travail. Si le salarié se retrouve en arrêt de travail pendant sa période d’essai (pour maladie, accident du travail, accident de trajet), la période d’essai sera prolongée pour une période équivalente à son absence.
Période d’essai : le cas des contrats successifs
Plusieurs contrats pour un même poste. Il peut arriver que vous concluiez plusieurs CDD pour un même poste avec le même salarié. Dans ce cas, par principe, parce que vous avez déjà eu l’occasion d’apprécier les capacités du salarié, il n’est pas possible de soumettre à une période d’essai ce salarié ayant déjà occupé la même fonction dans l’entreprise.
Plusieurs contrats pour différents postes. La situation est ici différente : vous pourrez prévoir une période d’essai dans un nouveau contrat de travail avec un salarié que vous connaissez déjà dès lors qu’il s’agit pour lui de pourvoir un poste différent de celui occupé précédemment.
CDD suivi d’un CDI : période d’essai ? Voici la règle à retenir si vous concluez un CDI avec un salarié précédemment embauché en CDD ou en mission d’intérim, pour un même poste : la durée du CDD ou du contrat d’intérim doit être déduite de la période d’essai prévue par le nouveau contrat, durée pendant laquelle vous êtes réputé avoir déjà pu apprécier les capacités professionnelles du salarié.
Plusieurs contrats pour un poste différent. Imaginons que vous concluiez un nouveau CDD avec un salarié déjà connu, mais pour pourvoir un poste différent de celui qui a fait l’objet d’un précédent contrat. Dans cette hypothèse, la situation est différente : parce que l’emploi pourvu dans le cadre du nouveau contrat est différent de l’emploi pourvu dans le cadre du précédent contrat, vous pouvez imposer à votre salarié une nouvelle période d’essai.
Attention. Si la situation s’analyse en un simple changement de poste pour votre salarié (en cours de contrat, vous affectez ce salarié sur un nouveau poste), vous ne pourrez pas imposer une période d’essai. Au mieux, vous pourrez prévoir une période probatoire dont la rupture aura pour effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures.
À noter. Si vous embauchez (en CDD, en CDI, en intérim) un apprenti à l’issue de son contrat d’apprentissage, vous ne pourrez pas prévoir de période d’essai (sauf si la convention collective prévoit des dispositions différentes).
À retenir
Prévoyez dans vos contrats une période d’essai, de manière à permettre de mettre en situation le salarié nouvellement embauché, et de pouvoir vous en séparer plus facilement dans l’hypothèse où cette embauche n’est pas concluante. Ce sera aussi l’occasion pour le salarié de valider ses attentes à propos du poste occupé.
J'ai entendu dire
Je viens d’embaucher un salarié avec une période d’essai et je lui ai accordé, pendant cette période, une prise de congés. La période d’essai est-elle malgré tout décomptée pendant ses congés ?La règle est la suivante : toute absence pendant la période d’essai a pour conséquence une prolongation de cette période, sauf si l’absence est due à l’employeur. Donc, si votre salarié a effectivement pris ses congés pendant la période d’essai, cette dernière est prolongée pour une durée au moins équivalente à la durée des congés pris. Il en sera de même si le salarié en période d’essai ne peut pas travailler du fait de la fermeture de l’entreprise pendant les congés annuels.
- Articles L1221-19 et suivants du Code du travail
- Article L1242-10 du Code du travail
- Article L1243-11 du Code du travail
- Article L1251-38 du Code du travail
- Article L1251-14 du Code du travail
- Article L3123-9 du Code du travail
- Article L6222-18 du Code du travail
- Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture (article 19)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 février 1997, n° 93-44053 (le contrat de travail doit prévoir le principe d’une période d’essai et sa durée)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 novembre 2011, n° 10-13573 (pas de prestation de travail dans le cadre d’un test professionnel)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 mars 1997, n° 94-40042 (prolongation de la période d’essai pendant les congés payés)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 4 avril 2012, n° 10-23876 (prolongation de la période d’essai en cas d’arrêt de travail)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 juin 2012, n° 10-28286 (conclure des CDD successifs)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 octobre 2013, n° 12-12113 (période d’essai prévue dans un CDI à la suite d’un CDD)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 31 mars 2016, n° 14-29184 (inapplicabilité de la durée plus courte de la période d’essai des cadres prévue par la convention collective Syntec)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 10 novembre 2016, n° 15-10936 (renouvellement de la période d’essai avec accord du salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 mai 2017, n° 16-10544 (période d’essai prévue dans un contrat non signé)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 juillet 2017, n° 16-15446 (annulation de la rupture de la période d’essai)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 mars 2019, n° 17-22783 (inapplicabilité de la durée plus courte de la période d’essai des employés prévue par la convention collective CHR)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 21 octobre 2020, n° 19-17219 (période d’essai et acceptation non équivoque du salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 mai 2021, n° 19-20429 (calcul de la période d’essai en jours calendaires par principe)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 7 juillet 2021, n° 19-22922 (période d’essai de 6 mois et notion de durée raisonnable de la période d’essai)
- Arrêt de la Cour d’appel de Paris, du 5 octobre 2022, n°19/11925 (NP) (n’est pas abusive la rupture d’une période d’essai au bout de 2 jours dès lors que la salarié démontre un comportement inadapté à l’emploi)