Répondre à une demande de l’administration fiscale
De la simple demande de renseignements…
Réagir face à un questionnement de l’administration. Dans le cadre de son activité liée au contrôle de vos déclarations fiscales, et notamment au regard de votre impôt sur le revenu, l’administration fiscale peut être amenée à solliciter divers renseignements complémentaires, par courrier généralement. En fonction de la nature de la demande, vous pouvez ne pas y donner suite…
Tout va dépendre du type de demande. Selon les cas, l’administration vous enverra une demande :
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de renseignements ;
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d’éclaircissements ;
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de justifications.
La simple demande de renseignements ne constitue pas, en soi, une mesure de contrôle fiscal, alors qu'une demande d’éclaircissements ou de justifications présente un caractère plus coercitif.
Une demande de renseignement. Une demande de renseignements peut être adressée par l’administration fiscale en toutes matières. L’administration vous laissera, en règle générale, un délai de 30 jours pour y répondre, sachant que vous n’avez aucune obligation d’y donner suite.
Faut-il y répondre ? Parce qu’aucune sanction en tant que telle ne vous sera opposée, vous n’êtes donc pas obligé d’y répondre. Cela étant, il ne faut pas perdre de vue que l’administration, face à votre silence, usera d’autres moyens, plus coercitifs, pour obtenir une réponse à ses interrogations. Pour éviter un contrôle fiscal, il est donc conseillé de répondre à une demande de renseignements, de la manière la plus précise possible.
… à la demande d’éclaircissements et de justifications
Hypothèses limitées. Une demande d’éclaircissements ou de justifications ne peut être faite que dans le cadre du contrôle de la déclaration d’ensemble de vos revenus, la règlementation fiscale restreignant la possibilité pour l’administration d’user de ce type de demande. Dans quels cas pourriez-vous recevoir une telle demande ?
Pour la demande d’éclaircissements. Dans le cadre du contrôle de votre déclaration de revenus, l’administration fiscale pourra vous envoyer une demande d’éclaircissements à chaque fois qu’elle disposera d’éléments faisant état de discordances ou de contradictions entre les éléments déclarés et les renseignements qu’elle peut détenir par ailleurs. Il pourra, par exemple, s’agir de discordances entre les revenus déclarés d’une année sur l’autre, ou de contradictions entre le montant des revenus bancaires reportés sur votre déclaration et les éléments qui lui ont été transmis par les établissements bancaires teneurs de vos comptes, etc.
Pour la demande de justifications. L’administration ne pourra vous envoyer une demande de justifications qu’en vue d’obtenir des documents et informations complémentaires sur :
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votre situation ou vos charges de famille (extrait de naissance, certificat de scolarité, etc.) ;
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les charges que vous avez portées en déduction de votre revenu net global (factures, quittances, etc.) ;
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les charges qui ont ouvert droit à une réduction d'impôt ;
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vos avoirs ou revenus d'avoirs détenus à l'étranger ;
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les éléments servant au calcul de vos revenus fonciers, de vos gains liés à la vente de titres de sociétés, de vos plus-values réalisées à l’occasion de la vente de biens immobiliers ou mobiliers ;
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tout élément qui permet de penser que vous avez des revenus plus importants que ceux qui font l'objet d’une déclaration (notez que cette condition est considérée comme remplie, notamment lorsque le total des montants crédités sur vos relevés de compte représente au moins le double de vos revenus déclarés ou excède ces derniers d'au moins
150 000 €).
À savoir ! Si l’administration vous envoie une notification de redressements qui trouve son origine dans une « demande de justifications » qui a porté sur un autre point que ceux précités, ces redressements pourront être annulés pour cause de procédure irrégulière. Sauf, rappelle le juge, si cette irrégularité ne vous a privé d’aucune garantie.
Le saviez-vous ?
Les demandes de justifications et d’éclaircissements doivent impérativement indiquer, de manière explicite, les points sur lesquels elles portent, de manière à ce que vous puissiez répondre aux demandes en toute connaissance de cause.
Un délai pour répondre. Vous disposez d’un délai de 2 mois pour répondre à une demande de justifications ou d’éclaircissements, délai qui doit être rappelé dans le courrier envoyé par l’administration. Le juge a précisé, à cet égard, que votre réponse doit être envoyée avant l’expiration du délai de 2 mois : ce délai sera considéré comme respecté, même si l’administration reçoit votre courrier après l’expiration du délai.
Faut-il répondre ? La réponse est, ici, affirmative sans aucune hésitation. Si vous ne répondez pas dans le délai de 2 mois à une demande de ce type, vous risquez l'imposition d'office ! Il est donc essentiel de répondre, et ce, de la manière la plus précise possible. Ne perdez pas de vue que si l’administration vous envoie une demande de ce type, c’est qu’elle a étudié votre dossier fiscal et que les interrogations qu’elle se pose sont certainement le prélude d'un contrôle plus approfondi si les réponses apportées ne sont pas jugées satisfaisantes. Recourir aux services de votre conseil habituel pour étudier la meilleure manière de répondre peut aussi être une solution pour sécuriser votre dossier.
Un examen de votre réponse. Si l’administration vous demande de lui fournir des justificatifs, encore faut-il qu’elle prenne le temps de les examiner. C’est précisément ce qu’a rappelé le juge à l’administration dans le cadre d’un litige l’opposant à un dirigeant.
Un soupçon. L’administration, soupçonnant qu’un dirigeant n’a pas déclaré l’intégralité de ses revenus, lui demande de justifier certains mouvements de fonds apparaissant sur ses comptes bancaires. Le dirigeant s’exécute, sans pour autant convaincre l’administration. Selon elle, les sommes présentes sur les comptes bancaires du dirigeant, et qui équivalent au double de ses revenus connus, sont en réalité des revenus dissimulés. Elle rehausse donc en conséquence le montant de l’impôt personnel dû par le dirigeant.
Sauf que l’administration n’a pas correctement analysé les justifications qui lui ont été apportées. Pour le juge, en effet, ne constitue pas des indices de revenus dissimulés :
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les crédits présents sur le compte bancaire du dirigeant et qui sont la conséquence d’un virement opéré depuis un autre compte bancaire (appartenant lui aussi au dirigeant),
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les crédits présents sur le compte bancaire qui correspondent au gain réalisé suite à la vente d’un immeuble, gain qui a été régulièrement déclaré à l’administration fiscale (antérieurement au contrôle) et taxé par elle.
Donc. Puisque l’administration n’a pas examiné avec soin les justifications apportées par le dirigeant, et puisqu’elle n’est pas en mesure de prouver que ce dernier aurait dissimulé une partie de ses revenus pour échapper à l’impôt, le redressement fiscal est, du moins en partie, annulé.
À noter. Si votre réponse, faite dans le délai de 2 mois, est jugée insuffisante par l’administration, celle-ci doit vous mettre en demeure, au préalable, d’apporter des précisions complémentaires dans les 30 jours : elle doit, à cet égard, préciser les éléments de réponse initiaux qui doivent être complétés et indiquer les pièces justificatives manquantes, le cas échéant. Bien entendu, cette mise en demeure doit être signée ; mais sachez que le juge de l’impôt a considéré que le défaut de signature n’est pas de nature à entacher d’irrégularité la procédure de contrôle en cas de redressements ultérieurs.
À noter (bis). Avant de vous envoyer la mise en demeure de compléter votre réponse, l’administration fiscale doit attendre l’expiration du délai de 2 mois (à défaut, la procédure serait irrégulière).
Le saviez-vous ?
Il peut arriver que vous deviez disposer d’un délai complémentaire pour réunir les documents justificatifs et autres éléments nécessaires au traitement de votre réponse. Dans ce cas, contactez sans tarder votre interlocuteur au sein de l’administration pour solliciter un délai complémentaire (demande qui devra être confirmée par écrit en indiquant le délai souhaité).
Une conséquence à connaître. La procédure d’imposition d’office permet à l’administration de déterminer vos bases d’impositions à partir des éléments dont elle dispose, en assortissant les redressements correspondants de pénalités qui varient selon les infractions relevées (intérêt de retard de 0,20 % par mois, 40 % en cas de manquement délibéré, 80 % en cas de manœuvres frauduleuses, etc.).
A retenir
Retenez le principe suivant : quel que soit le type de demande émanant de l’administration, faites en sorte de répondre systématiquement. S’il s’agit d’une simple demande de renseignements, un défaut de réponse ne pourra qu’inciter l’administration à poursuivre ses investigations par des moyens plus coercitifs. S’il s’agit d’une demande d’éclaircissements ou de justifications, un défaut de réponse sera sanctionné par la mise en place d’une procédure d’imposition d’office.
- Article L 10 du Livre des procédures fiscales
- Article L 16 du Livre des procédures fiscales
- Article L 16 A du Livre des procédures fiscales
- Article L 286 du Livre des procédures fiscales (respect de la date limite)
- BOFiP-Impôts-BOI-CF-IOR-50-30
- Arrêt du Conseil d’État du 16 avril 2012, no 320912 (demande de justifications et caractère limitatif)
- Arrêt du Conseil d’État du 13 novembre 2013, no 344064 (appréciation du délai de 2 mois)
- Arrêt du Conseil d’État du 17 février 2016, no 374928 (conséquence défaut de signature de la mise en demeure)
- Loi de Finances rectificative pour 2017 du 28 décembre 2017, no 2017-1775 (article 55)
- Arrêt du Conseil d’État du 1er octobre 2018, no 408543 (demande de justification et absence d’examen approfondi des mouvements bancaires)
- Ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période
- BOFiP-Impôts-BOI-DJC-COVID19-10 et suivants
- Arrêt du Conseil d’État du 8 juin 2011, no 310524 (mise en demeure et délai de 2 mois)
Pour aller plus loin…