Sécurité au travail : assurer la formation de vos salariés
Qui peut, qui doit être formé ?
Vous devez former vos salariés à la sécurité. Vous devez vous assurer que vos collaborateurs bénéficient d’une formation pratique et appropriée en vue de faire face aux risques auxquels ils sont potentiellement exposés dans le cadre de leur travail. Et il est conseillé de se ménager des preuves écrites de la réalité de ces formations car, n’oubliez pas que vous avez une obligation de résultat en matière de sécurité : vous devez prouver que vous avez pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la santé de vos salariés.
Une question de responsabilité. Imaginons qu’un de vos salariés ait un accident au travail : votre faute inexcusable pourrait être invoquée si, l’accident ayant une origine professionnelle, le salarié peut démontrer que vous aviez et auriez dû avoir conscience du risque et que vous n’avez pas pris les mesures nécessaires pour prévenir ce danger. En outre, vous pourriez être poursuivi pénalement pour violences involontaires et infractions à la règlementation sur la sécurité des travailleurs.
Les objectifs de ces formations. Grâce à ces formations, vos salariés bénéficieront d’outils pour identifier les risques et dangers auxquels ils peuvent être confrontés, se protéger contre ces risques et apprendre à anticiper et gérer les éventuels accidents ou sinistres. Il doit s’agir de formations pratiques et adaptées aux risques spécifiques de l’entreprise, qui porteront sur :
- les conditions de circulation dans l’entreprise : consignes sur les règles de circulation des véhicules et engins sur les lieux de travail, les chemins d’accès aux lieux de travail, les issues et dégagements de secours, les modalités d’évacuation, etc.,
- les conditions d’exécution du travail : enseignements relatifs aux comportements et gestes les plus sûrs, au fonctionnement des dispositifs de protection, aux utilisations des machines et équipements de l’entreprise, à la manipulation des produits dangereux, à la conduite des engins de toute nature, etc.,
- la conduite à tenir en cas d’accident ou de sinistre (la formation à la sécurité sur les dispositions à prendre en cas d'accident ou de sinistre doit être dispensée dans le mois qui suit l'affectation du salarié à son emploi) : lui fournir les informations nécessaires pour appeler les secours et les personnes référents dans l’entreprise, pour localiser les trousses de secours, les extincteurs et autres matériels et équipements de secours, etc.
Formation à l’identification du risque de harcèlement. Les mesures de prévention du harcèlement, parmi lesquelles l’information et la formation des salariés, permettent à ces derniers de mieux identifier des faits qui pourraient déboucher sur un harcèlement. C’est pourquoi, il ne suffit pas à l’employeur de mettre en place une procédure d’alerte et de prendre des mesures immédiates pour remédier à un harcèlement.
Le stress au travail n’est pas une fatalité. Il est possible que vous soyez alerté d’une situation de stress à laquelle vos salariés sont spécifiquement soumis. Dans ce cas, dans le cadre de votre obligation de sécurité de résultat, vous pouvez notamment mettre en place un dispositif adapté et spécifiquement centré sur le stress et le mal-être au travail. Il peut s’agir d’une formation axée sur le stress ou une information sur le mal-être au travail par exemple.
Les bénéficiaires de ces formations. Le risque 0 n’existant pas, il est important que chaque salarié de l’entreprise soit sensibilisé à la question de la sécurité de son poste de travail et bénéficie, dans cet objectif, d’une formation appropriée à chaque fois que cela s’avère nécessaire. En tout état de cause, une formation à la sécurité doit être nécessairement assurée :
- aux nouveaux embauchés,
- aux salariés qui changent de poste de travail ou de technique de travail,
- aux stagiaires, aux salariés temporaires et ceux embauchés en CDD, et spécialement à ceux qui sont affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers, tant pour leur santé que pour leur sécurité, qui doivent, à ce titre, bénéficier d’une formation renforcée à la sécurité : vous devez, à cet égard, établir la liste des postes présentant « des risques particuliers pour la santé et la sécurité », après avis du médecin du travail et du CSE ; et si aucun poste de travail ne présente de risques particuliers, un état néant sera établi.
Attention. Votre faute inexcusable est présumée établie pour les salariés en CDD ou en intérim, victimes d’un accident du travail, alors qu’ils sont affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé s’ils n’ont pas bénéficié d’un accueil ou d’une information adaptés dans l’entreprise. Dans l’hypothèse où un salarié intérimaire qui n’aurait pas bénéficié d’une formation renforcée à la sécurité, dispensée par l’entreprise utilisatrice, et serait victime d’un accident du travail, il pourrait faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur (l’entreprise d’intérim). Cette dernière pourrait obtenir la prise en charge du coût de la faute inexcusable auprès de l’entreprise utilisatrice défaillante.
Le saviez-vous ?
A la demande du médecin de travail, une formation doit être assurée aux salariés qui reprennent leur activité après un arrêt de travail d’au moins 21 jours.
Attention. En cas d’infraction à l’obligation de formation à la sécurité, vous encourez une amende de 3 750 €, étant précisé que cette amende est appliquée autant de fois qu'il y a de salariés de l'entreprise concernés indépendamment du nombre d'infractions relevées.
Formation des salariés : modalités pratiques
Organisez ces formations. L’organisation des formations à la sécurité vous incombe (elles doivent se dérouler pendant l’horaire normal de travail), mais vous devez y associer les représentants du personnel et notamment, le cas échéant, le CSE (ou la CSSCT) qui participe à la préparation des formations. Associez également les services de la médecine du travail dans l’élaboration des contenus des formations.
Mettez en bonne place la question sécuritaire dans le processus d’intégration. Dans le cadre des nouvelles embauches, formalisez une intégration du nouveau salarié dans l’entreprise en lui remettant un livret d’accueil, dans lequel vous pourrez insérer des modules informant des risques liés à l’activité de l’entreprise et les mesures prises en interne pour prévenir les dangers.
Le saviez-vous ?
Vous devez élaborer le document unique d’évaluation des risques dans l’entreprise et permettre à l’ensemble des salariés d’en prendre connaissance. Vous devez également informer vos salariés sur les dispositions contenues dans le règlement intérieur.
Financez les formations. Le principe veut que le financement des formations à la sécurité dans l’entreprise soit à la charge de l’employeur. Contactez votre Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail (CARSAT) qui pourra vous aider à organiser et à rechercher des financements pour la mise en place de vos formations ; prenez également l’attache de votre organisme paritaire collecteur agréé, de l’agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, de l’inspection du travail, etc., autant d’organismes qui pourront vous apporter aide et assistance dans cette démarche de formation à la sécurité.
Formation des salariés : le passeport de prévention
Un nouvel outil… À compter de 2025, chaque salarié devra disposer d’un passeport de prévention produisant ses effets et répertoriant l’ensemble des attestations, certificats et diplômes qu’il a obtenu dans le cadre de formations relatives à la santé et à la sécurité au travail.
À noter. Ce passeport pourra être complété, soit :
- par l’employeur, dans le cadre des formations dispensées par l’entreprise ;
- par les organismes de formations, à l’occasion des formations qu’ils dispensent ;
- par le salarié lui-même, lorsqu’il suit des formations de sa propre initiative.
Consultation. L’employeur peut être autorisé par le salarié, sous conditions, à consulter l’ensemble des données contenues dans le passeport de prévention, pour les besoins du suivi de ses obligations en matière de formation à la santé et à la sécurité.
Le saviez-vous ?
Dans la situation où le salarié (ou le demandeur d'emploi) dispose d'un passeport d'orientation, de formation et de compétences, le passeport de prévention y sera intégré.
Quelle mise en œuvre ? Les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention, ainsi que de sa mise à disposition de l’employeur, seront déterminées par le Comité national de prévention et de santé au travail (CNPST), une instance paritaire nouvellement créée par la loi santé au travail. Toutefois, si le Comité ne se prononce pas à ce sujet dans les 6 mois suivant sa création, les modalités de mises en œuvre du passeport de prévention seront alors déterminées par décret.
À retenir
Ne considérez pas que la formation des salariés à la sécurité consiste en une simple formation et prise en main du poste de travail. Il s’agira de former vos salariés, et notamment ceux nouvellement embauchés, sur les conditions de circulation dans l’entreprise, les conditions d’exécution du travail, la conduite à tenir en cas d’accident.
Associez la médecine du travail dans l’organisation des formations liées à la sécurité dans l’entreprise et consultez, le cas échéant, les représentants du personnel sur le programme de formation envisagé.
J'ai entendu dire
Un salarié peut-il refuser d’assister à une formation liée à la sécurité dans l’entreprise ?En pratique, non : un salarié qui refuse une telle formation peut être sanctionné pour faute, dans la mesure où son refus de se former peut avoir des conséquences sur la sécurité et faire courir un risque dans l’entreprise. Il ne faut pas oublier, à cet égard, que si vous êtes tenu à une obligation de sécurité dans l’entreprise, le salarié est également tenu par cette obligation, pour assurer tant sa propre sécurité que celle des autres.
- Articles L 4142-1 à L 4143-1 du Code du travail (obligation générale d’information et de formation)
- Articles et R 4141-1 à R 4141-12 du Code du travail (obligation générale d’information et de formation)
- Articles L 4154-2 et L 4154-3 du Code du travail (salariés intérimaires, en CDD et stagiaires)
- Loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, article 6
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 1er juin 2016, n° 14-19702 (harcèlement moral et nécessité de prévention)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 novembre 2016, n° 15-21226 (répondre au stress par un dispositif adapté et spécifiquement centré sur le stress et le mal-être au travail)
- Arrêt de la Cour de Cassation, 2ème chambre civile, du 11 octobre 2018, n° 17-23694 (absence de formation renforcée et faute inexcusable de l’employeur)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre criminelle, du 21 janvier 2020, n° 18-87109 (défaut de formation d’un salarié et poursuites pénales)
- Communiqué de presse du ministère du travail, du 29 février 2024, « Passeport de prévention : report de l’ouverture de la déclaration des formations par les employeurs et les organismes de formation en 2025 »