Vendre les parts de votre société et partir à la retraite : bénéficiez d'un régime fiscal avantageux ! (régime applicable jusqu’au 31 décembre 2017)
Vendre vos titres et partir en retraite : déterminer la plus-value « brute »
Prix de vente. Le prix de vente à retenir pour le calcul de votre plus ou moins-value sera, s’agissant de titres non cotés, le prix que vous avez effectivement convenu avec votre acheteur. Il sera augmenté de toutes les charges et indemnités stipulées à votre profit (comme par exemple la prise en charge d’une dette vous incombant) et diminué des frais et taxes que seriez amené à payer (commission d’intermédiaires, honoraires de conseil liés à l’évaluation des titres, etc.)
Prix d’acquisition. Il faut ici retenir le prix pour lequel ces titres sont entrés dans votre patrimoine : valeur d’achat, valeur d’apport, valeur retenue pour le calcul des droits de mutation si ces titres ont été acquis par voie de donation ou de succession. Ce prix sera majoré des frais d’acquisition : droits d’enregistrement ou de mutation payés lors de leur acquisition, frais d’actes, honoraires, etc.
Le saviez-vous ?
Si vous avez obtenu une réduction d’impôt sur le revenu pour souscription au capital des PME, le prix d’acquisition des titres de votre société doit, pour le calcul de la plus-value imposable, être diminué de la réduction d’impôt effectivement obtenue.
Une plus ou moins-value. La différence entre le prix de vente et le prix d’acquisition fera donc apparaître une plus-value imposable ou une moins-value à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux (qui ne pourra s’imputer que sur une plus-value de même nature réalisée au cours de la même année ou des 10 années suivantes). Pour déterminer le montant net imposable ou net imputable, vous devez compenser l’ensemble des plus et moins-value de même nature réalisée au cours de l’année.
Vendre vos titres et partir en retraite : déterminer la plus-value « imposable »
Plusieurs abattements. Dans l’hypothèse où vous vendez les titres de votre société (soumise à l’IS) dans le cadre d‘un départ en retraite, à compter du 1er janvier 2014 et jusqu’au 31 décembre 2017, vous pourrez bénéficier de plusieurs abattements qui vous permettront d’échapper, en tout ou partie, à la taxation de votre plus-value.
Un abattement fixe de 500 000 €. La plus-value réalisée est, tout d’abord, diminuée d’un abattement de 500 000 €.
Le saviez-vous ?
Si vous vendez plusieurs sociétés au moment de votre départ en retraite, l’abattement de 500 000 € s’appliquera à chaque vente.
Une exception. Lorsque les sociétés vendues sont issues d’une scission intervenue au cours des 2 années précédant la vente des titres, l’abattement de 500 000 € ne s’appliquera qu’une seule fois à l’ensemble des gains se rapportant à la vente des sociétés issues de cette scission.
Une précision. En cas de ventes échelonnées de titres d’une même société, même au cours d’années différentes (mais dans la limite de 24 mois), l’abattement ne s’appliquera qu’une seule fois pour l’ensemble des ventes réalisées. Dans ce cas, le reliquat d'abattement non utilisé au titre de la 1ère vente est imputable sur les plus-values réalisées à l’occasion des ventes suivantes.
Un abattement pour durée de détention. Ensuite, vous bénéficierez d’un abattement pour durée de détention, calculé après application de l’abattement fixe de 500 000 €, et égal à :
- 50 % si vous détenez vos titres depuis au moins 1 an et moins de 4 ans ;
- 65 % si vous détenez vos titres depuis au moins 4 ans et moins de 8 ans ;
- 85 % si vous détenez vos titres depuis au moins 8 ans.
Attention. Ces divers abattements s’appliquent uniquement pour le calcul de l’impôt sur le revenu, pas pour celui des prélèvements sociaux (au taux global de 17,2%).
Le saviez-vous ?
Pour les ventes réalisées jusqu’au 31 décembre 2013, toujours dans le cadre d’un départ en retraite, vous bénéficiiez d’un abattement spécial d’1/3 par année de détention au-delà de la 5ème année, ce qui aboutissait à exonérer totalement d’impôt la plus-value pour des titres détenus depuis au moins 8 ans.
A noter. Si la vente des titres aboutit à la réalisation d’une moins-value (perte), les abattements ne s’appliqueront pas directement. La moins-value réalisée devra être imputée sur d’éventuelles plus-values de même nature. Ce n’est qu’à l’issue de cette imputation, s’il reste un reliquat de plus-value, qu’il pourra être fait application des abattements spécifiques pour déterminer la fraction du gain qui sera soumise à l’impôt sur le revenu.
Vendre vos titres et partir en retraite : une optimisation sous conditions
Vous concernant. Vous devez :
- avoir exercé au sein de la société une fonction de direction de manière continue pendant les 5 années précédant la vente de vos titres (cette condition n'est pas exigée dans le cadre de l’exercice, à titre principal, de manière continue pendant les 5 années précédant la cession, d’une profession libérale dans une SA ou une SARL dès lors que les parts ou actions de ces sociétés constituent pour vous des biens professionnels) ;
- avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de votre conjoint (époux(se) ou partenaire de Pacs) ou de vos ascendants ou descendants ou de vos frères et sœurs, de manière continue pendant les 5 années précédant la cession, au moins 25 % du capital de la société dont les titres sont cédés ;
- cesser toute fonction dans la société dont vous vendez les titres et faire valoir vos droits à la retraite dans les 2 années suivant ou précédant la vente.
Un conjoint ? Pour l’appréciation du seuil de détention de 25 % du capital, il n’est jamais tenu compte des titres détenus par le concubin notoire.
Attention. L’exercice d’une fonction, quelle qu’elle soit, après votre départ en retraite, et après ce délai de 2 ans, même à titre bénévole, vous ferait perdre le bénéfice de l’avantage fiscal. Si un accompagnement de l’acquéreur est prévu, il convient de veiller à ce qu’il ne soit pas fait en contradiction avec ces conditions pour éviter toute remise en cause du régime de faveur.
Le saviez-vous ?
La condition liée à la fonction est essentielle et s’apprécie strictement : dans une affaire où un couple marié a vendu ses titres, le juge a estimé que seule la plus-value réalisée par le conjoint qui exerçait effectivement une fonction de direction est éligible à ce dispositif. L’autre conjoint, non dirigeant, ne peut pas en bénéficier et voit sa plus-value taxée dans les conditions de droit commun.
Délai de 2 ans. Il est important de préciser que le délai de 2 ans à respecter ne commence pas à courir uniquement à partir de la cession des titres. Il commence à courir à partir du 1er évènement qui intervient : la vente des titres ou le départ en retraite.
Exemple. Un dirigeant prend sa retraite et cède ses titres 6 mois plus tard. Il devra dès lors cesser toute fonction dans la société dans les 2 ans suivant la liquidation de ses droits à la retraite, et non pas dans les 2 ans suivant la cession des titres.
2+2 ? Récemment, l’administration a refusé le bénéfice de l’avantage fiscal à un dirigeant, considérant que s’il avait bien pris sa retraite 23 mois avant la vente de ses titres, il exerçait toujours la fonction de directeur commercial plus de 2 ans après l’ouverture de ses droits à la retraite. Une argumentation balayée par le juge de l’impôt qui a annulé le redressement fiscal et rappelé que :
- le bénéfice de l’avantage fiscal suppose que le dirigeant ait cessé toute fonction dans la société cédée et qu’il ait fait valoir ses droits à la retraite au cours d’une période de 4 ans, allant de 2 ans avant à 2 ans après la vente ;
- rien n’impose que la cessation des fonctions intervienne avant la mise à la retraite ou inversement ;
- rien n’impose que ces évènements (cessation des fonctions et mise à la retraite) interviennent tous deux avant ou après la vente, ni qu’ils se succèdent dans un délai plus rapproché que la période de 4 ans.
A suivre. Dans cette affaire, la position tenue par le juge de l’impôt est inédite. Reste à savoir s’il va la réitérer. Affaire à suivre…
Concernant la société. Elle doit être soumise à l’impôt sur les sociétés, employer moins de 250 salariés au 31 décembre de l’une des 3 années précédant la vente, réaliser un chiffre d’affaires inférieur à 50 M€ ou avoir un total de bilan inférieur à 43 M€ à la clôture du dernier exercice (l’administration fiscale admet, toutefois, que les seuils de chiffre d’affaires et de total de bilan précités puissent être appréciés à la clôture de l’un des 3 derniers exercices qui précède celui au cours duquel intervient la cession). Pour information, sachez que ces seuils s’apprécient, le cas échéant, sur la base des comptes consolidés et en tenant des entreprises liées à votre société (pour rappel, des liens de dépendance sont réputés exister en cas de détention par une société de la majorité du capital social d’une autre ou lorsque les deux sociétés sont placées sous le contrôle d'une même tierce entreprise).
Nature de l’activité. La société doit exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, de façon continue, pendant les 5 ans précédant la cession des titres. En revanche, l’activité consistant à gérer de façon exclusive le patrimoine mobilier ou immobilier de la société dont les titres sont cédés n’ouvre pas droit à l’avantage fiscal.
A noter. Le juge de l’impôt a eu à se prononcer sur une situation de mise en location gérance du fonds de la société moins de 5 ans avant la cession des titres. Il a décidé que la mise en location gérance, par une société, de son fonds de commerce, après 5 ans d’exploitation continue, n’est qu’une façon de poursuivre son activité différemment : le fait d’encaisser des loyers ne suffit pas à caractériser qu’elle a pour seule activité la gestion de son propre patrimoine, et donc ne permet pas de l’exclure du bénéfice de l’exonération.
Attention. Son capital ne doit pas être détenu à hauteur de 25 % ou plus par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne répondant pas aux conditions précitées de manière continue au cours du dernier exercice clos (ne sont pas prises en compte les participations détenues par certaines structures de capital-risque).
Le saviez-vous ?
En cas de cession des titres à une entreprise, vous ne devez pas détenir, directement ou indirectement, de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de cette entreprise cessionnaire (notez qu'un pourcentage de détention de 1 % est toutefois toléré par l’administration fiscale). Sachez que cette condition s’apprécie à la date de la cession et pendant les 3 années (36 mois) qui suivent la cession des titres, délai apprécié de date à date.
Concernant la vente. Vous devez vendre l'intégralité des actions, parts ou droits que vous détenez dans la société dont les titres sont vendus. En cas de démembrement de propriété, il est toutefois admis que la vente soit partielle lorsqu’elle porte sur un nombre de titres démembrés vous conférant plus de 50 % des droits de vote de la société dont les titres ou droits sont cédés ou, en cas de la seule détention de l’usufruit, sur un nombre de droits démembrés vous conférant plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de la société concernée.
A retenir
La vente de vos titres à l'occasion de votre départ en retraite bénéficie d'un régime fiscal avantageux : la plus-value est diminuée d'un 1er abattement de 500 000 € puis d'un 2nd abattement qui peut aller jusqu'à 85 % si vous détenez vos titres depuis au moins 8 ans. Comme toujours, ce régime spécifique suppose le respect de conditions, mais il peut être intéressant de l’étudier au regard de l’avantage fiscal non négligeable qu’il permet.
J'ai entendu dire
A quel moment faut-il se placer pour apprécier la date du départ en retraite ?Il s’agit de la date à laquelle vous faites valoir vos droits à la retraite : il s’agit donc de la date à laquelle vous entrez en jouissance des droits acquis dans le régime obligatoire de base d'assurance vieillesse auquel vous êtes affilié à raison de vos fonctions de direction ou dans le régime obligatoire de base d'assurance vieillesse auprès duquel vous avez été affilié au titre de l’activité que vous cédez (si vous n’avez été affilié auprès d'aucun régime obligatoire de base pour votre fonction de direction). Notez, en outre, qu’il n’est pas exigé que vous liquidiez votre retraite au taux plein ou que, dans le même temps, vous entriez en jouissance des droits acquis auprès d’un régime de retraite complémentaire.
J’ai entendu dire que les plus-values réalisées en 2017 seraient soumises aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %. Je trouve cela étrange puisque, en toute logique, comme j’ai vendu mon entreprise en 2017, c’est le taux de 15,5 % qui devrait s’appliquer. Devrais-je payer les prélèvements sociaux au taux de 15,5 % ou au taux de 17,2 % ?
Depuis le 1er janvier 2018, le taux des prélèvements sociaux a augmenté significativement pour tenir compte de la hausse de 1,7 point de la contribution sociale généralisée (CSG) : il est passé de 15,5 % en 2017 à 17,2 % en 2018. En toute logique, du fait du principe de non rétroactivité de la Loi, cette hausse ne devrait pas s’appliquer aux plus-values réalisées à l’occasion de ventes intervenues avant le 31 décembre 2017.
Ce principe n’est toutefois pas absolu. En effet, la Loi de Financement de la sécurité sociale pour 2018, qui a fait passer le taux de CSG de 15,5 % à 17,2 %, prévoit expressément que cette augmentation s’appliquera à compter de l’imposition des revenus 2017, donc aux ventes de titres intervenues avant le 31 décembre 2017. Une position confirmée par le juge de l’impôt.
- Article 150-0 D ter du Code Général des Impôts
- Article 74-0 P de l’annexe II du Code Général des Impôts (date départ en retraite)
- Réponse ministérielle Blanc – Assemblée Nationale – du 9 janvier 2007, n° 96903 (modalités liquidation de la retraite)
- Loi de Finances pour 2013 n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 (article 10)
- BOFiP-Impôts-BOI-RPPM-PVBMI-20-30-30
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Nancy du 21 novembre 2013, n° 11NC01232 (appréciation condition de non détention des titres de la société cessionnaire)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 11 octobre 2012, n° 343844 (prise en compte des comptes consolidés et des liens de dépendance)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 10 décembre 2014, n° 371437 (condition liée à la fonction de dirigeant)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 27 mai 2015, n° 368056 (exercice d’une fonction de direction bénévole)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 9 octobre 2015, n° 374492 (appréciation condition de non détention des titres de la société cessionnaire)
- Réponse ministérielle Fourage, Assemblée Nationale, du 23 juillet 2013, n° 24280
- Loi de Finances pour 2014, n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 (article 17)
- Réponse ministérielle Cadic, Sénat, du 1er septembre 2016, n° 14869 (vente de plusieurs sociétés)
- Arrêt de la Cour administrative d’Appel de Nantes du 23 mars 2017, n°15NT01830 (cessation des fonctions dans les 2 ans suivant la liquidation des droits à la retraite)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 10 mai 2017, n°395897 (mise en location gérance du fonds de commerce avant la cession des titres)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 12 septembre 2019, n°431862 (taux de CSG applicable aux ventes de titres intervenues en 2017)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 16 octobre 2019, n°417364 (départ à la retraite, cessation des fonctions et délai global de 4 ans)
- Arrêt du Conseil d’Etat du 13 février 2020, n°425825 (seuil de détention de 25 % du capital de la société dont les titres sont cédés et non prise en compte des titres détenus par le concubin notoire)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles du 2 juillet 2020, n°19VE00795 (départ à la retraite, cessation des fonctions et délai global de 4 ans)