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Contrôle fiscal et mini abus de droit : ce qu’il faut savoir

Date de mise à jour : 31/08/2021 Date de vérification le : 31/08/2021 9 minutes

A l’issue d’un contrôle, l’administration fiscale vous reproche un « abus de droit » : concrètement, elle vous reproche d’avoir mis en place un schéma qui, dans un but principalement fiscal selon elle, vous permet d’optimiser le montant de vos impôts ou ceux de votre entreprise. Mais s’agit-il vraiment d’un « abus de droit » ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Contrôle fiscal et mini abus de droit : ce qu’il faut savoir


Nouvel abus de droit : une définition précise

De quoi s’agit-il ? Voici ce que l’administration est autorisée à faire lorsqu’elle suspecte un abus de droit : « Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ont pour motif principal d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. ».

Concrètement…En pratique, cette notion d’abus de droit (on parle de « mini-abus de droit ») pourra donc se rencontrer à chaque fois qu’un acte est pris ou une opération est réalisée dans un but « principalement » fiscal qui sera de réduire ou d’annuler un impôt ou une taxe. En d’autres termes, un abus de droit pourra vous être reproché si :

  • l’opération (ou le montage) réalisé(e) a pour motif principal d’atténuer ou d’éluder la charge fiscale ;
  • l’opération (ou le montage) a été mis(e) en place en contradiction avec l’intention poursuivie par le législateur.

2 éléments doivent être réunis. Selon l’administration fiscale, la qualification « d’abus de droit » nécessite la réunion de 2 éléments :

  • un élément objectif : l’utilisation d’un texte (Loi, convention internationale, décret, arrêté, décision administrative ayant une portée générale, rescrit, réponse ministérielle, etc.) à l’encontre des intentions de son auteur ;
  • un élément subjectif : la volonté principale d’éluder l’impôt, à savoir réduire une dette, percevoir indûment un crédit d’impôt, augmenter abusivement une situation déficitaire.

Des précisions attendues. Ces précisions restent assez sommaires, et nécessiteront certainement des éclaircissements ultérieurs. A suivre...

Quand ? Cette nouvelle procédure d’abus de droit fiscal s’appliquera aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 et qui portent sur des montages, opérations, etc., réalisés à compter du 1er janvier 2020.

Une procédure qui s’ajoute à la procédure de mini abus de droit déjà existante. Cette nouvelle procédure d’abus de droit s’ajoute à celle déjà existante qui s’applique lorsqu’une opération est réalisée à but « exclusivement » fiscal : en cas de contrôle fiscal, l’administration aura, le cas échéant, le choix des armes.

     =>  Pour plus d’information sur la procédure d’abus de droit déjà existante, consultez la fiche « Contrôle fiscal et abus de droit : ce qu’il faut savoir »

Pour tous les impôts ? Oui, presque... Cette notion peut se rencontrer dans toutes les matières fiscales, que ce soit dans le cadre des impôts directs (impôt sur le revenu, impôts locaux), de la TVA, des droits d’enregistrement, des taxes diverses, etc., à l'exception de l'impôt sur les sociétés.

En matière d’IS... S’agissant de l’impôt sur les sociétés, l’administration dispose d’une procédure spécifique : la clause anti-abus générale. Dans ce cadre, depuis le 1er janvier 2019, l’administrations peut rectifier un résultat imposable à l’impôt sur les sociétés à chaque fois qu’une société aura obtenu un avantage fiscal dans des conditions allant à l’encontre de son objet ou de sa finalité. Plus exactement, cette procédure peut s’appliquer lorsque les 2 conditions suivantes sont réunies :

  • un montage est mis en place en vue d’obtenir indûment un avantage fiscal (allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable) ;
  • le montage n’a pas de justification économique (on dit alors qu’il n’est pas considéré comme authentique).

A noter. La nouvelle procédure d’abus de droit fiscal ne s’applique pas lorsque le Gouvernement lui-même a souhaité encourager la réalisation de certaines opérations en mettant en place un mécanisme d’incitation fiscale.

Par exemple. Tel est notamment le cas d’une donation temporaire portant sur l’usufruit d’un immeuble au profit d’un enfant majeur, ce qui lui permet de jouir de l’immeuble soit en l’occupant, soit en le plaçant en location.


Nouvel abus de droit : une sanction lourde

En plus du redressement fiscal… Bien entendu, lorsque l’administration rectifie le montant d’un impôt ou d’une taxe en recourant à la procédure de l’abus de droit, elle va recalculer le montant effectivement dû. Et elle va assortir le redressement de sanctions particulièrement lourdes…

… des sanctions ! Non seulement elle va calculer un intérêt de retard (au taux de 0,20 % par mois de retard), mais elle va aussi pouvoir appliquer les sanctions de droit commun : majoration de 40 % pour manquement délibéré, majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses, etc.


Nouvel abus de droit : vos moyens de défense

Une procédure spécifique. Lorsque l’administration envisage de retenir un abus de droit, elle doit recourir à une procédure spéciale : la procédure d’abus de droit. Cette procédure se caractérise par les particularités suivantes :

  • elle doit clairement indiquer, dans la proposition de rectification fiscale, qu’elle se place expressément dans le cadre de la procédure d’abus de droit ;
  • vous pouvez solliciter l’avis d’une commission spéciale : le comité de l’abus de droit fiscal (une demande de saisine non suivie d’effet par l’administration pourra conduire à l’annulation du redressement fiscal !) ;
  • depuis le 1er janvier 2019, et quelle que soit la position du comité de l’abus de droit, la charge de prouver que l’opération est constitutive d’un abus de droit fiscal sanctionnable revient toujours à l’administration fiscale.

Un cas vécu. Un couple achète 3 appartements à un particulier. Suite au décès du vendeur, l’administration fiscale, qui procède au contrôle de la déclaration de succession, constate que le prix auquel les 3 appartements ont été vendus était bien inférieur au prix du marché. Assimilant cette vente à une donation indirecte, elle réclame non seulement au couple un supplément d’imposition (droits d’enregistrement), mais aussi le paiement d’un intérêt de retard et d’une pénalité pour manquement délibéré au taux de 40 %.

Sauf que… Pour le couple, l’administration a commis une erreur : en s’attachant à démontrer qu’ici, la vente cachait en réalité une donation, tout en invoquant la volonté manifeste et délibérée du couple d’éluder l’impôt, l’administration s’est placée sur le terrain de l’abus de droit, sans pour autant respecter la procédure spécifique attachée à cette notion. Un « oubli » qui permet au couple de réclamer, et d’obtenir l’annulation des redressements, ce que confirme le juge.

A noter. En matière de charge de la preuve, il reste toutefois quelques exceptions :

  • la charge de la preuve vous incombe lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis du comité ;
  • elle vous incombe également à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu ;
  • elle vous incombe également en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle.

Conseil. Si vous avez un doute sur la portée d’une opération que vous envisagez de mettre en œuvre, notamment parce que vous redoutez l’abus de droit, vous pouvez solliciter au préalable l’avis de l’administration au moyen d’un rescrit fiscal spécifique : le « rescrit abus de droit ».

Concrètement. Vous exposez, par écrit, l’opération envisagée afin de recueillir l’avis de l’administration fiscale. Pour qu’elle puisse se prononcer en toute connaissance de cause et que l’avis qu’elle est susceptible de prendre lui soit opposable, pensez à expliciter et joindre tous les éléments et documents décrivant et justifiant l’opération projetée.

Conséquence. Soit l’administration vous envoie un avis favorable : dans ce cas, l’opération ne pourra pas être qualifiée d’abus de droit (pour autant qu’elle soit rigoureusement conforme à la description faite dans la demande). Soit l’administration vous envoie un avis défavorable : dans ce cas, il est conseillé de ne pas réaliser l’opération sous peine de la voir requalifier en abus de droit en cas de contrôle (ce que ne manquera pas, à coup sûr, de vérifier l’administration fiscale).

A noter. Si ces conditions sont remplies et que l'administration n'a pas répondu dans un délai de 6 mois à compter de la demande, la procédure de l’abus de droit fiscal ne pourra pas être appliquée à l’opération envisagée. En revanche, si l'une des conditions posées n'est pas satisfaite, vous ne pourrez pas vous prévaloir de cette garantie en l'absence de réponse de l'administration.

Conseil. Si le rescrit permet d’obtenir l’avis préalable de l’administration et de sécuriser une opération, il n’en demeure pas moins vrai que vous décrivez, avec force détails, l’opération projetée et votre volonté de mettre en place un schéma d’optimisation fiscale : il est donc conseillé de s’entourer de précautions dans ce domaine, idéalement en recourant aux services d’un professionnel du droit spécialisé dans ce domaine.

Le saviez-vous ?

Rappelons que, pour que l'administration soit engagée par la réponse qu'elle vous fournira, il faut que votre demande soit formulée de bonne foi et de manière à ce que l'administration dispose de tous les éléments qui caractérisent l’opération.

A retenir

Le nouvel abus de droit suppose la recherche d’un but principalement fiscal qui aura donc pour effet de diminuer, voire d’annuler une imposition.

Dès lors que vous réalisez une opération fiscalement avantageuse, pensez à conserver tous les éléments de preuve qui seront de nature à établir que cette opération est motivée par des intérêts juridiques, économiques, patrimoniaux, etc.

J'ai entendu dire

J’ai entendu dire que ce nouvel abus de droit allait empêcher toute velléité d’optimisation fiscale : il ne sera plus possible, par exemple, de mettre en place des schémas de transmission anticipée d’entreprise. Est-ce vrai ?

Le Gouvernement est récemment venu affirmer que la nouvelle définition de l’abus de droit n’aura pas pour effet de remettre en cause les transmissions anticipées de patrimoine, à condition toutefois que ces transmissions ne soient pas fictives. Toutefois, les commentaires de l’administration et les décisions du juge de l’impôt seront les bienvenus à ce sujet.
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