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Gérer la démission du salarié

Gérer la démission d'un salarié

Date de mise à jour : 21/01/2022 Date de vérification le : 27/05/2024 16 minutes

Un salarié vous informe de son souhait de quitter l'entreprise et vous remet sa démission. Quelles sont vos obligations face à une telle situation ? Quelles sont les erreurs à ne pas commettre ? Réponses...

Rédigé par l'équipe WebLex.
Gérer la démission d'un salarié

Démission d'un salarié : une volonté claire et non équivoque

Démission : de quoi s'agit-il ? Une démission consiste en une rupture d'un contrat à durée indéterminée à l'initiative d'un salarié. Si le salarié est libre de démissionner à tout moment, sous réserve du respect d'un préavis, vous devez impérativement vérifier qu'au moment où elle est donnée, la démission résulte effectivement d'une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin à son contrat de travail : si tel n'est pas le cas, la démission peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Attention. Un salarié qui ne rentre pas de ses congés ou qui ne revient pas après un arrêt maladie, un salarié qui refuse de venir travailler, un salarié qui abandonne son poste de travail ou encore un salarié qui refuse une modification de ses conditions de travail n'est pas nécessairement un salarié démissionnaire. C’est ce qu’a rappelé le juge dans une affaire où une salariée ne s’est tout simplement plus rendue à son travail et s’est engagée dans le cadre d’un second contrat de travail auprès d'une autre entreprise (donnant lieu, dans cette affaire, à un cumul d’emploi matériellement impossible) : malgré ces circonstances, le juge a considéré que la salariée n’a pas manifesté une volonté claire et non équivoque de démissionner.

Attention (bis). Un salarié qui démissionne sous le coup de l’émotion et se rétracte dans un bref délai ne sera pas toujours considéré comme « démissionnaire » : dans une telle hypothèse, selon les circonstances, le juge pourra considérer que la démission ne résulte pas d’une volonté claire et non équivoque et requalifier cette démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le saviez-vous ?

La démission ne peut concerner, en pratique, que les salariés en contrat à durée indéterminée : un salarié ne peut, en principe, pas mettre fin de manière anticipée à un CDD, sauf si un accord en ce sens est conclu avec l’employeur, et sauf cas spécifiques (embauche en CDI, force majeure, faute grave, inaptitude constatée par le médecin du travail).

Une distinction nécessaire. Une démission ne doit pas être confondue avec une rupture d'une période d'essai, avec un départ volontaire à la retraite, ou encore avec une prise d'acte de la rupture du contrat par le salarié qui se définit comme un acte par lequel le salarié exprime sa volonté de mettre fin à son contrat de travail en raison de faits imputables à son employeur.

Démission « équivoque »Arrêtons-nous quelques instants sur ce dernier point : si une démission suppose que le salarié assume seul la rupture du contrat de travail, la prise d'acte d'une rupture du contrat par le salarié produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si cette prise d'acte est justifiée (à défaut, elle s'analyse comme une démission). Si un salarié adresse des reproches et/ou conteste des faits imputables à l'employeur dans sa lettre de démission, les juges pourraient considérer qu'il ne manifeste pas une volonté claire et non équivoque de démissionner.

Exemple d’une démission non équivoque. Une salariée démissionne puis, 6 mois plus tard, adresse des reproches à son employeur. Ne pouvant prouver les manquements qu’elle allègue et ayant informé ses collègues qu’elle partait pour de nouvelles fonctions, sa démission a été jugée claire et non équivoque.

Attention. Il faut également faire attention aux situations dans lesquelles un salarié démissionne de son poste, crée sa propre entreprise et continue, dans ce nouveau cadre d’activité indépendante, à travailler pour son ancienne entreprise : il ne s’agit pas de se voir reprocher la poursuite de la relation contractuelle de travail, sous une autre forme, notamment parce qu’un lien de subordination est toujours caractérisé.

Un cas vécu. C’est ce qui est arrivé à un employeur qui a fait travailler un ancien salarié devenu indépendant qui a poursuivi le travail entamé avant sa démission : parce le juge a estimé qu’un lien de subordination était toujours présent, notamment parce que l’ancien employeur continuait à donner des directives à son ancien collaborateur, il a considéré que le contrat de travail avait perduré. Et parce que la relation contractuelle a été rompue, cette rupture a été analysée comme un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Un écrit est recommandé. Il n'existe pas de conditions de forme propre à la démission. Cette dernière peut donc être donnée verbalement, même s'il est toujours préférable d'obtenir un écrit pour s’assurer de la volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner. L'écrit devra être daté et signé par le salarié et devra vous parvenir sous pli recommandé avec accusé réception ou vous être remis en propre contre décharge (mentionner sur chaque exemplaire revenant à l'employeur et au salarié 'remis en mains propres le...' suivi de la signature de l'employeur).

Un écrit « non équivoque ». Parce que la démission ne se présume pas, l’écrit doit être clair et non-équivoque. Pour la petite histoire, la salariée et femme du dirigeant annonce à son époux qu’elle rompt toute relation avec lui : si le dirigeant en a déduit qu’elle démissionnait, le juge a considéré, dans ce cas, que la démission n’était pas claire et non-équivoque.

Le saviez-vous ?

Une démission abusive peut ouvrir droit à des dommages intérêts, mais cela suppose que vous soyez en mesure de rapporter la preuve de cet abus.


Démission d'un salarié : les obligations à respecter

Préavis... Un salarié qui démissionne doit, en principe, effectuer un préavis dont la durée est fixée par la Loi, la convention collective ou, à défaut, par les usages. Dans certaines hypothèses, le salarié est dispensé de préavis. Ainsi, par exemple :

  • une salariée enceinte (ou, plus exactement, en état de grossesse médicalement constaté) peut démissionner sans préavis et sans avoir à payer une indemnité de rupture ;
  • un salarié peut, pour élever son enfant, et sous réserve d'en informer son employeur au moins 15 jours à l'avance, rompre son contrat de travail à l'issue du congé de maternité ou d'adoption ou, le cas échéant, deux mois après la naissance ou l'arrivée au foyer de l'enfant, sans être tenu de respecter le délai de préavis, ni devoir de ce fait d'indemnité de rupture ;
  • un salarié peut démissionner sans préavis à l'issue d'un congé pour création d'entreprise ou d'un congé sabbatique, sous réserve d'en informer son employeur au moins 3 mois avant la fin de son congé.

... ou dispense de préavis. Vous pouvez aussi dispenser le salarié d'effectuer son préavis, mais, dans cette hypothèse, vous serez redevable d'une indemnité compensatrice égale au salaire que ce dernier aurait perçu s'il avait effectué son préavis. Inversement, le salarié peut demander à être dispensé de faire son préavis et, dans ce cas, si vous accédez à sa demande, vous n’aurez pas à payer cette indemnité.

Le saviez-vous ?

Si le salarié sollicite une dispense de préavis, vous n’êtes, en principe, pas tenu de l’accepter (vérifiez tout de même ce que prévoit votre convention collective sur ce point). Et si le salarié passe outre ce refus, vous pourriez être en droit de solliciter une indemnité, égale au montant de la rémunération brute correspondant à la période non effectuée. Là encore, consultez votre convention collective pour vérifier ce qu’elle prévoit en pareille hypothèse.

Formalités. Vous devez remettre au salarié, à la fin de son contrat de travail, outre ses salaires et éventuelle prime, son indemnité de congés payés et, le cas échéant, son indemnité de préavis et la contrepartie financière en application d’une clause de non-concurrence, un certain nombre de documents :

  • l'attestation Pôle Emploi,
  • le certificat de travail précisant, pour les ruptures de contrats intervenues avant le 1er janvier 2015, les heures acquises au titre du droit individuel à la formation et l’organisme paritaire collecteur agréé (OPCO) dont relève l’entreprise,
  • le reçu pour solde de tout compte.

Attention. Il ne faut pas, non plus, omettre de compléter le registre du personnel en indiquant la date de départ du salarié démissionnaire.

Le saviez-vous ?

Dans le cadre d’une démission, la portabilité de la prévoyance n’est pas possible, puisqu’entre autres conditions, ce dispositif suppose que le salarié soit involontairement privé d’emploi et pris en charge par l’assurance chômage. Toutefois, en cas de démission considérée comme « légitime » par l’assurance chômage (démission pour suivi de conjoint par exemple), la portabilité est possible.

A retenir

Assurez-vous que le salarié démissionnaire veut effectivement quitter l’entreprise (un écrit est indispensable). Ne considérez pas comme démissionnaire un salarié qui ne revient pas à l’issue de ses congés.
 

J'ai entendu dire

Un salarié a démissionné et, quelques jours plus tard, se rétracte : que faire dans ce cas ?

En principe, un salarié qui a démissionné ne peut pas se rétracter, sauf si sa démission n'est pas vraiment réfléchie et si la rétractation intervient dans un bref délai. C'est ainsi qu'une rétractation a été valablement admise par les juges à propos d'une démission donnée par un salarié sous la menace d'une plainte pénale à l'issue d'une entrevue avec son employeur et qui est revenu sur sa décision le lendemain, les juges ayant, au cas d'espèce, estimé que la démission ne résultait pas d'une volonté claire et non équivoque du salarié. Bien entendu, il est tout à fait possible, d'un commun accord du salarié et de l'employeur, de considérer une démission nulle et non avenue, pour autant que cet accord mutuel ne soit pas équivoque.
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Sources
  • Article L 1231-1 du Code du travail
  • Articles L 1237-1 et L 1237-2 du Code du travail
  • Articles L 1243-1 et L 1243-2 du Code du travail
  • Articles L 1225-34, L 1225-66 et L 3142-85 du Code du travail
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 10 novembre 1998, n° 96-44299 (démission analysée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 25 juin 2003, n° 01-42679 (démission motivée par des fautes imputables à l’employeur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 24 mars 2004, n° 02-41650 (démission sous la menace d’une plainte pénale pour vols suivie d’une rétractation)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 mai 2013, n° 12-13891 (refus de la dispense de préavis et indemnité compensatrice)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 4 décembre 2013, n° 12-23859 (volonté claire et non équivoque)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 avril 2014, n° 12-16053 (salarié démissionnaire qui continue à travailler pour son ancien employeur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 15 janvier 2015, n° 13-21355 (appréciation du caractère équivoque d’une démission)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 février 2016, n° 14-18888 (démission donnée sous le coup de l’émotion et requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 2 mars 2016, n° 14-13134 (refus de venir travailler)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 6 octobre 2016, n° 15-17549 (n’est pas une démission équivoque un salarié qui ne revient pas après un arrêt maladie)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 8 juin 2017, n° 16-16024 (démission non équivoque malgré des reproches tardifs)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 octobre 2017, n° 16-18548 (rupture des relations personnelles et professionnelles)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 4 décembre 2019, n° 18-18092 (création d’entreprise et démission)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 21 octobre 2020, n° 19-10635 (démission verbale)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 7 mai 2024, no 22-23.749 (démission rédigée et envoyée par l'épouse n'est pas valable) 
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