Avez-vous pensé à la donation temporaire d'usufruit ?
Vous donnez à votre enfant une rente mensuelle
Le cas classique. Parce que votre enfant aura des besoins incompressibles (logement, nourriture, frais de scolarité, etc.), vous devrez l’aider financièrement : vous lui versez un montant fixe par mois, vous prenez en charge le loyer, etc. Le montant que vous lui versez est donc prélevé, par principe, sur vos propres revenus.
Mais… Regardons d’un peu plus près votre situation : vos revenus d’activité et vos éventuels revenus du patrimoine (revenus de placements financiers, revenus fonciers, etc.) sont soumis à l’impôt sur le revenu. Vous percevez ces revenus, sur lesquels vous payez de l’impôt sur le revenu ; sur ces mêmes revenus, vous prélevez ensuite des fonds pour venir en aide financièrement à votre enfant. Et si, dans cette suite logique, on gommait la phase « impôt »…
Une solution alternative : faites une donation temporaire d’usufruit
Procéder au démembrement de propriété. Le droit de propriété se compose de la nue-propriété (qui constitue votre droit à disposer du bien comme un propriétaire) et de l’usufruit (qui constitue votre droit d’utiliser le bien en question et de percevoir les revenus qu’il peut produire, comme les revenus fonciers pour un bien immobilier mis en location par exemple).
Préparer une transmission de patrimoine. Le démembrement de propriété est souvent utilisé pour préparer une transmission de patrimoine : vous donnez la nue-propriété d’un ou plusieurs biens à vos enfants tout en conservant l’usufruit, ce qui vous permet de vous garantir les éventuels revenus produits par ces biens (on parle alors d’usufruit « viager »).
Quel intérêt ? L’intérêt de ce démembrement de propriété est de diminuer le coût des droits de mutation, dans la mesure où ils ont pour base de calcul la valeur de la nue-propriété du bien, par définition inférieure à la valeur en pleine propriété. Et plus cette opération est réalisée tôt, plus elle sera avantageuse, puisque la valeur de la nue-propriété est fonction de l’âge de l’usufruitier : plus vous êtes jeune au moment de l’opération, et plus la valeur de la nue-propriété est faible. Au décès de l’usufruitier, la réunion de la nue-propriété et de l’usufruit s’opère en exonération de droits de mutation.
Donner temporairement l’usufruit à votre enfant. Il s’agit ici de réaliser l’opération inverse : en pratique, vous donnez l’usufruit d’un bien à votre enfant pour une durée fixe. Vous conservez alors la nue-propriété du bien en question. Une fois le terme de l’usufruit arrivé à échéance, vous récupérez la pleine propriété du bien. Cela signifie que c’est donc votre enfant qui devient titulaire des revenus, pour le temps que dure cet usufruit temporaire.
Quel intérêt ? En réalité, il est double : vous pouvez optimiser, à la fois le montant de votre impôt sur le revenu, mais aussi celui de l’IFI…
L’intérêt d’une donation temporaire d’usufruit…
Cas pratique. Imaginons que vous soyez détenteur d’un patrimoine immobilier locatif, qui vous procure des revenus fonciers pour 750 € par mois, en moyenne. Pour peu que votre patrimoine soit suffisamment important (au moins 1 300 000 €, déduction faite de vos dettes), vous pouvez, en outre, être soumis à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) à raison de ce patrimoine immobilier. Plutôt que de verser une rente à votre enfant correspondant au montant des loyers que vous percevez, vous allez lui donner temporairement l’usufruit de votre bien locatif.
Pour votre impôt sur le revenu…
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en l’absence de donation temporaire d’usufruit, vous percevez les loyers et vous versez une rente d’égal montant. Mais vous supportez l’impôt sur les revenus que vous transférez à votre enfant ;
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en présence d’une donation temporaire d’usufruit, c’est votre enfant qui perçoit les revenus fonciers : c’est donc lui (et non plus vous) qui sera soumis à l’IR sur ces revenus, pour autant qu’il y soit effectivement assujetti, compte tenu du montant de ses revenus, et qu’il ne fasse plus partie de votre foyer fiscal (parce qu’il est majeur et non rattaché, il constitue son propre foyer fiscal, ce qui suppose qu’il fasse sa propre déclaration de revenus) ;
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dans les deux cas, vous ne conservez pas effectivement les revenus fonciers, mais dans la seconde hypothèse, vous évitez l’impôt…
Pour votre IFI…
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en l’absence de donation temporaire d’usufruit, vous êtes (plein) propriétaire du bien immobilier : il est donc compris dans votre patrimoine soumis à l’IFI, étant ici précisé que l’imposition à l’IFI s’apprécie au niveau du foyer fiscal composé des père et mère et des enfants mineurs ;
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en présence d’une donation temporaire d’usufruit, ce ne sera plus le cas : parce que la règle veut, sauf exceptions, qu’un bien dont la propriété est démembrée soit, pour le calcul de l’IFI, compris dans le patrimoine de l’usufruitier pour sa valeur en pleine propriété, ce bien est soumis à l’IFI, au nom de votre enfant majeur usufruitier (il compose son propre foyer fiscal au titre de l’IFI) ; comme il y a fort à parier que son propre patrimoine n’est pas d’un niveau suffisant pour qu’il y soit effectivement assujetti, il ne paiera pas d’IFI ;
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le bien immobilier en question n’est plus compris dans votre patrimoine, pour le calcul de votre IFI, pendant la durée de l’opération : il échappe donc à cet impôt…
Un coût fiscal ? Sachez que la donation temporaire d’usufruit est soumise aux droits de mutation. La base de calcul retenue est égale à 23 % de la valeur en pleine propriété par période de 10 ans (sans pouvoir excéder la valeur de l’usufruit viager). Par exemple, dans l’hypothèse d’un petit appartement locatif d’une valeur de 100 000 €, la base de calcul pour une donation temporaire d’usufruit de 10 ans sera de 23 000 €. Compte tenu des abattements applicables en cas de donation entre parents et enfants (égal à 100 000 € sur la part de chacun des parents et sur la part de chacun des enfants), il est, là encore, possible de minorer le coût des droits de donation.
Conclusion. Non seulement vous venez en aide financièrement à votre enfant dans le cadre de ses études, ce qui doit être la motivation première, mais, en plus, vous optimisez votre fiscalité personnelle.
Attention. La mise en place d’une telle opération requiert des attentions particulières, qui devront notamment être analysées au regard de votre situation personnelle. Une analyse patrimoniale préalable sera certainement nécessaire, en lien avec un professionnel. Notez, par ailleurs, que l’administration fiscale est vigilante sur les conditions d’application de ce type de montage, et notamment sur l’existence d’un réel dessaisissement des revenus du bien dont l’usufruit est temporairement donné au profit du bénéficiaire.
A retenir
Plutôt que de verser une rente à votre enfant, prélevée sur vos revenus qui ont été soumis à l’impôt, vous pourriez lui donner temporairement l’usufruit d’un bien locatif : il perçoit lui-même les revenus locatifs (qui représenteraient idéalement peu ou prou l’équivalent de la rente prévue). Faute de les percevoir directement, vous n’êtes plus imposé sur les revenus fonciers et, si vous êtes assujetti à l’IFI, vous serez gagnant puisque le bien immobilier sort de votre patrimoine pour le calcul de l’IFI.
- Article 669 du Code général des impôts (démembrement de propriété)
- Article 964 et suivants du Code général des impôts (IFI)