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Le statut du salarié dans l'entreprise

Lanceurs d’alerte : ce qu’il faut savoir

Date de mise à jour : 03/10/2023 Date de vérification le : 03/10/2023 21 minutes

Depuis quelques années, les médias abordent fréquemment le sujet des lanceurs d’alerte : qui sont-ils ? Que font-ils ? Quelle position adopter face à un lanceur d’alerte ? Depuis le 1er janvier 2018, certaines entreprises doivent impérativement mettre en place une procédure de recueil des signalements…

Rédigé par l'équipe WebLex.
Lanceurs d’alerte : ce qu’il faut savoir

Lanceur d’alerte : qui est-il ?

Notion. Dans un 1er temps, les lanceurs d’alerte ont été reconnus dans le domaine de la santé publique : il s’agissait de salariés (ou de fonctionnaires) qui signalaient ou témoignaient des faits relatifs à un risque grave pour la santé publique ou l'environnement dont ils auraient eu connaissance dans l'exercice de leurs fonctions. Puis, cette notion s’est élargie aux signalements des crimes et des délits.

Définition actuelle. Aujourd’hui, la loi définit le lanceur d’alerte comme une personne qui signale ou divulgue des informations portant sur :

-    un crime ; 
-    un délit 
-    une menace ou un préjudice pour l'intérêt général ;
-    une violation ou une tentative de dissimulation d'une violation d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, du droit de l'Union européenne, de la loi ou du règlement. 

Ces signalements doivent être désintéressés (sans contrepartie financière directe) et effectués de bonne foi.

Le juge a eu l’occasion de rappeler que l’intérêt personnel du salarié à agir, en tentant de renégocier sa rémunération préalablement à son alerte, ne l’empêche pas de bénéficier du statut protecteur en ce qu’il ne s’agit pas d’une contrepartie financière directe. 

Le saviez-vous ?

Les faits, informations ou documents couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre un avocat et son client ne sont pas concernés.

Lanceur d’alerte : la procédure à respecter 

La procédure de signalement. 3 types de signalement sont possibles :

  • Le signalement par voie interne, dès lors que le lanceur d’alerte estime qu’il est possible de remédier efficacement à la violation par cette voie et qu’il ne s’expose pas à un risque de représailles. A ce titre, les entreprises d’au moins 50 salariés ont l’obligation de créer, en plus de la procédure interne de recueil, une procédure de traitements des signalements après consultation des instances de dialogue social. En l’absence de procédure interne, les signalements peuvent être faits auprès des supérieurs hiérarchiques directs ou indirects, à l’employeur ou à un référent ;
  • Le signalement par voie externe, qui peut être utilisé directement, ou après un signalement interne. Ce signalement s’adresse à une autorité compétente (dont vous pouvez retrouver la liste ici), au défenseur des droits, à l’autorité judiciaire, à une institution, à un organe ou à un organisme de l’union européenne compétent ;
  • Le signalement public, qui peut être fait lorsque un signalement interne ou externe a été effectué sans qu’aucune mesure appropriée n’ait été prise à l’issue d’un délai de 3 mois 

Signalement interne. Dans le cadre du signalement interne, l’employeur d’une entreprise d’au moins 50 salariés doit mettre en place un canal de réception afin de permettre aux lanceurs d’alerte d’adresser un signalement oral ou écrit (en fonction de ce que prévoit la procédure), ainsi que les éléments en lien avec cette dénonciation. Pour ce faire, il a l’obligation de préalablement consulter le CSE en place dans l’entreprise. De plus, cette procédure de signalement interne doit être diffusée par tout moyen assurant une publicité suffisante : 

  • Par voie de notification, d’affichage, de publication ;
  • Le cas échéant, sur le site internet de l’entreprise, ou par voie électronique dans des conditions qui permettent de la rendre accessible de manière permanente aux salariés.

Accusé réception du signalement interne. L’employeur doit accuser réception du signalement émis par son salarié dans un délai de 7 jours ouvrés à compter de la réception. Il doit également informer le lanceur d’alerte, des suites données au signalement dans un délai raisonnable n’excédant pas 3 mois.

Un signalement public conditionné. Sauf exceptions, notez que ce signalement public pourra s’appliquer en cas de danger grave et imminent ou lorsque la saisine d’une des autorités compétentes générerait un risque de représailles pour le lanceur d’alerte, ou qu’elle ne permettrait pas d’y remédier efficacement en raison des circonstances particulières de l’affaire (par exemple, dans le cas où des preuves pourraient être détruites ou dissimulées). 

Une protection étendue. La protection des lanceurs d’alertes est étendue aux facilitateurs (personnes qui aident le lanceur dans sa révélation ou sa divulgation), aux personnes physiques en lien avec le lanceur d’alerte, aux entités juridiques contrôlées par un lanceur d’alerte, pour lesquelles il travaille ou avec lesquelles il est lien dans un contexte professionnel.

En cas de recrutement. Les candidats lanceurs d’alerte ne peuvent pas être écartés d’une procédure de recrutement, d’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise pour avoir signalé ou divulgué des informations.

Des mesures discriminatoires interdites. Il est rappelé qu’aucun salarié lanceur d’alerte ne peut être sanctionné, licencié, ni faire l’objet d’une mesure discriminatoire, y compris en matière d’horaires de travail et d’évaluation de la performance. Cette protection propre aux salariés est également étendue aux facilitateurs et aux personnes en lien avec un lanceur d’alerte.

De nouveaux publics. Les mesures de protection des lanceurs d’alerte sont aussi applicables :

  • Aux personnes qui dénoncent, de bonne foi, des faits de harcèlement moral ou sexuel ;
  • En outre-mer, à toute personne victime de harcèlement sexuel, ou qui a refusé de le subir et pour les personnes qui ont, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements ;
  • Aux salariés ou agents des établissements et services sociaux et médico-sociaux qui ont témoigné, de bonne foi, de mauvais traitements ou de privations infligés à une personne accueillie, ou qui ont relaté de tels agissements. 

La notion de « bonne foi ». Le salarié lanceur d’alerte qui dénonce de bonne foi des faits répréhensibles bénéficie de la protection, même s’il s’avère que les faits ne sont finalement pas établis. 

Les irresponsabilités. Les lanceurs d’alerte pourront bénéficier d’une irresponsabilité civile dès lors que les signalements ou la divulgation publique des faits ont eu lieu car ils avaient des motifs raisonnables de croire en leur nécessité pour la sauvegarde des intérêts en cause. Le lanceur d’alerte ne pourra pas non plus être poursuivi pour soustraction, détournement ou recel de documents ou de tout autre support, dès lors qu’ils contiennent des informations dont il aura eu connaissance de manière licite et qu’il remplit les conditions liées au signalement ou à la divulgation.

Une renonciation impossible. Les lanceurs d’alerte ne peuvent plus renoncer aux droits relatifs à leur protection, droits qui ne peuvent pas non plus être limités, quelle que soit la forme de la limitation.

De nouveaux soutiens. Le lanceur d’alerte peut bénéficier d’un soutien psychologique, ainsi que d’un secours financier temporaire.

Référentiel de la CNIL. En juillet 2023, la CNIL a adopté un nouveau référentiel « alertes professionnelles » concernant le traitement des données personnelles pour la mise en œuvre d’un dispositif d’alerte professionnelle, qui remplace celui datant de 2019. Ce nouveau référentiel n’a pas de valeur contraignante. Néanmoins, les organismes qui choisissent de le respecter bénéficient d’une présomption de conformité de leurs traitements de données relatifs aux alertes professionnelles. Par conséquent, les organismes qui choisissent de s’en écarter devront justifier et documenter ce choix et les mesures mises en œuvre afin de garantir la conformité des traitements à la réglementation en matière de protection des données à caractère personnel.

Lanceur d'alerte : salarié protégé ?


Protection de l’identité du lanceur d’alerte. L’entreprise doit, sous peine de lourdes sanctions, garantir la confidentialité de l’identité du lanceur d’alerte. Elle ne peut pas être dévoilée, sauf à l’autorité judiciaire, sans le consentement de l’intéressé et après que les vérifications aient confirmées que l’alerte était justifiée.

Protection de l’emploi du lanceur d’alerte. Le lanceur d’alerte bénéficie d’une protection particulière. Il est donc interdit :

  • de faire obstacle au recrutement ou à l’accès à un stage ou à une période de formation professionnelle d’un lanceur d’alerte qui aura respecté la procédure d’alerte ;
  • de sanctionner, de licencier ou de prononcer une quelconque mesure discriminatoire (notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, etc.) à un lanceur d’alerte qui aura respecté la procédure d’alerte.

Attention ! Le simple fait pour un salarié de relater des dysfonctionnements qu’il a constatés dans l'entreprise, et d'attirer l'attention de son employeur sur ces faits ne justifie pas de le considérer comme un lanceur d'alerte : encore faut-il qu’il procède à une « dénonciation » de ces faits.

Un licenciement possible… Si l’alerte ne peut pas être un motif de refus d’embauche, ni un motif de sanction à peine de nullité, cette protection est relative. Il vous est, en effet, possible de licencier un lanceur d’alerte si vous justifiez que votre décision est motivée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l'intéressé.

Le saviez-vous ?

Une dénonciation de faits, même s’ils ne constituent finalement pas une infraction, n’est pas fautive si le salarié a alerté le Procureur de la République en toute bonne foi. Cette dénonciation résulterait même de la liberté d’expression. Un licenciement prononcé en raison de cette dénonciation doit être déclaré nul.

Les sanctions possibles

Toute personne qui fait obstacle à la transmission d'un signalement à l’employeur ou à son référent, au Procureur de la République, à l’administration ou aux ordres professionnels encourt une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 1 an et une peine d’amende de 15 000 € maximum.

Divulgation de l’identité du lanceur d’alerte. Le fait de divulguer l’identité du lanceur d’alerte, les informations ou les personnes visées par l’alerte est puni de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, au maximum (ou 150 000 € si l’entreprise est condamnée).

Sanction du lanceur d’alerte de mauvaise foi. Si le lanceur d’alerte se rend coupable de diffamation (si son signalement est effectué de mauvaise foi), il encourt une amende de 30 000 €.

Un nouvel abondement. Le Conseil des Prud’hommes peut, à l’occasion d’un litige relatif à la rupture du contrat de travail consécutive au signalement d'une alerte, obliger l’employeur à abonder le compte personnel de formation du salarié lanceur d’alerte. Pour calculer le montant de cette condamnation, le Conseil des prud’hommes tient compte du montant des droits inscrits sur le compte du lanceur d’alerte et du plafond de 8 000 €. Quoi qu’il en soit, la somme fixée ne peut excéder la différence entre ces 2 montants.
 

A retenir

Une alerte est une dénonciation de faits ou de manquements graves à la Loi ou à la règlementation. Pour permettre à son auteur de bénéficier d’une protection, elle doit respecter une procédure définie par l’employeur.
 

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