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Organiser le télétravail dans l’entreprise

Date de mise à jour : 29/05/2024 Date de vérification le : 29/05/2024 26 minutes

De plus en plus d’entreprises se laissent tenter par le « télétravail ». Et il est vrai que ce type d’organisation du travail, qui ne présente toutefois d’intérêt que si l’activité de l’entreprise s’y prête, offre de multiples avantages, tant pour vous que pour vos salariés. Mais encore faut-il respecter diverses règles, sous peine de voir le rêve se transformer en cauchemar…

Rédigé par l'équipe WebLex.
Organiser le télétravail dans l’entreprise

 

Télétravail : de quoi s’agit-il ?

Une organisation de travail. Le télétravail est une organisation du travail qui permet à votre salarié de travailler hors des locaux de votre entreprise de façon volontaire, alors qu'il aurait pu exécuter ses tâches dans vos locaux.

Pour qui ? Par principe, n’importe quel salarié de l'entreprise peut être un « télétravailleur », soit dès l'embauche, soit ultérieurement. Néanmoins, vous conviendrez que certains postes ne sont pas compatibles avec cette organisation particulière du travail. Par exemple, un poste en production sera difficile à organiser en télétravail. De plus, certains accords de branche ou d'entreprise peuvent réduire la capacité d'user du télétravail à certaines catégories de collaborateurs.

Le saviez-vous ?

Parce qu’il travaille à distance, votre collaborateur en télétravail utilise nécessairement des outils numériques : ordinateur, connexion web, téléphone portable, etc.

Des avantages certains… Mettre en place le télétravail dans votre entreprise peut être très favorable, tant pour vous que pour vos salariés. Cette organisation permet, entre autres et par exemple, de faciliter les déplacements de certains salariés, notamment en termes de temps passé dans les transports en commun, de concilier vie professionnelle et vie privée, de concilier vie professionnelle et mandat d'élu local, le cas échéant, etc. et d’accroître les performances et la productivité de votre entreprise tout en améliorant la qualité des conditions de travail des salariés (bruit, interruptions des collègues, etc.).

Mais aussi des points de vigilance… Néanmoins, pour bénéficier de ces multiples bienfaits, la mise en place de cette nouvelle organisation du travail suppose de respecter scrupuleusement diverses obligations matérielles.


Télétravail : ce qu’il implique…

Pour le télétravail régulier. Il existe un certain nombre de points de vigilance à connaître et à étudier avant d'envisager la mise en place du télétravail dans votre entreprise.

Un accord collectif ou une charte. L’employeur peut mettre en place le télétravail par accord collectif, ou à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée après avis du comité social et économique (CSE), s'il existe. Cet accord ou cette charte précise :

  • les conditions de passage en télétravail, en particulier en cas de pic de pollution, et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
  • les modalités d'acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
  • les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
  • la détermination des plages horaires durant lesquelles l'employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail.
  • les modalités d'accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail ;
  • les modalités d'accès des salariées enceintes à une organisation en télétravail.

Clause du contrat de travail. Le télétravail peut être permis au salarié en vertu du contrat de travail. Le cas échéant, l’employeur ne peut donc revenir sur son accord, mais, le télétravail n’est possible que selon les modalités préalablement fixées.

Attention ! Lorsque les clauses de l’accord collectif ou de la charte sont contraires aux clauses d’un contrat de travail conclu avant le 24 septembre 2017, le salarié peut refuser l’application de l’accord ou de la charte. Pour cela, il dispose d’un délai d’1 mois à partir de la communication faite dans l’entreprise sur l’existence d’un tel accord ou d’une telle charte.

Des obligations à connaître. Tout salarié qui occupe un poste éligible au télétravail, conformément à cet accord collectif ou à cette charte, peut, à sa convenance, demander à bénéficier de cette organisation de travail. Si l’employeur refuse, il doit motiver sa réponse. Voici quelques motifs de refus envisageables :

  • l’impossibilité matérielle,
  • la confidentialité des informations sur lesquelles travaille le salarié,
  • la désorganisation de l’équipe des collaborateurs de l’entreprise.

Le saviez-vous ?

Le refus du salarié ne pourra pas être considéré comme motif de son licenciement.

Limite au volontariat ? En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d'épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l'activité de l'entreprise et garantir la protection des salariés.

Mais aussi… Depuis le 1er avril 2018, il est possible de mettre en place le télétravail régulier en l’absence d’accord collectif ou de charte, par accord entre l’employeur et le salarié, formalisé par tout moyen (idéalement, un avenant au contrat de travail comportant les mêmes précisions que comporterait l’accord collectif ou la charte).

Le saviez-vous ?

Dans l’hypothèse où un employeur fixe les modalités relatives au télétravail d’un de ses salariés dans un avenant au contrat de travail, il ne peut pas revenir sur cette organisation sans l’accord exprès de ce dernier.

Handicap et proche aidant. En l’absence d’accord collectif, de charte ou de toute autre formalisation de l’accord entre le salarié et l’employeur, ce dernier n’est jamais obligé d’accéder à la demande du salarié et dans pareil cas, il n’a pas à motiver son refus, sauf si le salarié concerné est reconnu travailleur handicapé ou s’il s’agit d’un salarié « proche-aidant » auxquels cas le refus devra être motivé.


Télétravail : mode d’emploi d’un emploi à la mode

Le point sur le contrôle du salarié... La première question qui vient à l’esprit lorsqu’on évoque le télétravail concerne le contrôle du travail et de son exécution par le salarié. Vous êtes en droit de contrôler et d’évaluer le travail du télétravailleur. Néanmoins, rappelons que si un dispositif particulier de surveillance du salarié est utilisé, sa mise en place répond à des modalités d’information et consultation préalables obligatoires (consultation des représentants du personnel, le cas échéant). Dans tous les cas, le salarié doit être informé de cette mise en place.

… et de son temps de travail. C’est aussi une question qui revient fréquemment lorsqu’il s’agit de mettre en place le télétravail : à temps plein ou en alternance, le nombre de jours de télétravail au domicile de votre salarié (apprécié sur la semaine ou sur le mois) doit être précisément défini.

Le saviez-vous ?

Dans tous les cas, vous devrez respecter la législation relative à la durée du travail (durées maximales quotidienne et hebdomadaire, temps de repos, etc.).

À noter. Précisons qu’il est possible de décompter le temps de travail sur la base d’un forfait jours, mais les conditions de recours et de gestion du forfait jours devront alors être respectées (autonomie du salarié, accord individuel, référence à un accord collectif valable, respect des obligations liées au forfait jours).

Attention. Retenez que pendant les plages horaires fixées par l’accord collectif ou la charte, le salarié doit être à son poste de travail et donc répondre à vos appels téléphoniques. En dehors de celles-ci, l’absence de réponse du salarié ne peut pas justifier une sanction disciplinaire.

Le point sur les dépenses. Si la loi n’impose pas expressément à l’employeur de prendre en charge les dépenses liées au télétravail (notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils, ainsi que leur maintenance), rappelons que les charges supportées par le salarié lors de l’accomplissement de leurs missions et inhérentes à leur fonction constituent des frais professionnels, que l’employeur doit donc lui rembourser.

Précisions. Les frais engagés par le salarié en situation de télétravail sont considérés comme des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi, sous réserve que les remboursements effectués par l’employeur soient justifiés par la réalité des dépenses professionnelles supportées par le salarié.

Quels frais ? 3 catégories de frais peuvent être identifiées et exonérés de cotisations sociales :

  • les frais fixes et variables liés à la mise à disposition d’un local privé pour un usage professionnel ;
  • les frais liés à l’adaptation d’un local spécifique ;
  • les frais de matériel informatique, de connexion et fournitures diverses.

Mais aussi… D’autres frais professionnels peuvent être admis, à charge pour l’employeur de démontrer qu’il s’agit de frais professionnels liés au télétravail.

Le cas échéant. Si vous remboursez votre salarié de ses frais liés au télétravail, sachez que ce remboursement est exonéré de cotisations sociales, sous conditions. Notez que vous pouvez aussi verser une indemnité d’occupation du domicile privé à des fins professionnelles, qui est, pour sa part, soumise à cotisations sociales.

     =>  Consulter le barème des frais professionnels liés au télétravail

Télétravail et titres-restaurant. Les salariés en situations de télétravail doivent impérativement bénéficier de titres-restaurant dans le cas où leurs conditions de travail sont équivalentes à celles des autres salariés de l’entreprise travaillant sur site et ne disposant pas d’un restaurant d’entreprise. Ainsi, lorsque les salariés de l’entreprise bénéficient de titres-restaurant, il doit en être de même pour l’ensemble des télétravailleurs, qu’ils travaillent à domicile, de façon nomade ou en bureau satellite.

Verser une allocation forfaitaire ? A titre de remboursement des frais professionnels, l’employeur peut verser une allocation forfaitaire au salarié. Cette allocation sera réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite globale de :

  • 10,40 € par mois, pour un salarié effectuant 1 jour de télétravail par semaine ;
  • 20,80 € par mois, pour un salarié effectuant 2 jours de télétravail par semaine ;
  • 31,20 € par mois, pour un salarié effectuant 3 jours de télétravail par semaine ;
  • etc.

Allocation forfaitaire journalière ? En cas d’allocation forfaitaire fixée par jour, cette dernière est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations sociales dès lors que son montant journalier n’excède pas 2,60 €, dans la limite de 57,20 € par mois.

Verser une allocation forfaitaire prévue par un accord collectif ? De la même manière, le montant de l’allocation forfaitaire peut être prévu par une convention collective de branche, un accord professionnel ou interprofessionnel ou un accord de groupe. Dans ce cas, ce montant est exonéré de cotisations sociales, dès lors que l’allocation est attribuée en fonction du nombre de jours effectivement télétravaillés.

Précisions. Cette allocation forfaitaire, lorsqu’elle est fixée par accord collectif, est ainsi exonérée de cotisations sociales dans la limite des montants prévus par cet accord dès lors que son montant n’excède pas :

  • 13 € par mois, pour un salarié effectuant 1 jour de télétravail par semaine ;
  • 26 € par mois, pour un salarié effectuant 2 jours de télétravail par semaine ;
  • 39 € par mois, pour un salarié effectuant 3 jours de télétravail par semaine ;
  • etc.

Allocation forfaitaire journalière « collective » ? Les employeurs ont également la possibilité de fixer par accord collectif une allocation forfaitaire journalière qui sera exonérée de cotisations sociales dès lors que son montant n’excède pas 3,25 € par jour, dans la limite de 71,50 € par mois.

En cas de remboursement de montants supérieurs ? En cas de remboursement dépassant ces limites, l’exonération de cotisations et contributions sociales ne pourra être admise que sur la base des justificatifs produits à l'occasion des contrôles.

Nécessité d’un accord. Notez que le juge a déjà eu l’occasion de rappeler qu’à défaut d’accord entre le salarié et l'employeur sur le recours au télétravail, le salarié ne peut pas se prévaloir de la législation relative au télétravail et donc que l’employeur n’a pas à prendre en charge les frais liés au télétravail qui n’a pas été autorisé.

Un accident de télétravail ? Notez que tout accident survenu sur le lieu de télétravail sur le temps de travail du télétravailleur est présumé être un accident de travail.

Et l’accident survenu peu après la fin de la journée de télétravail ? Selon le juge, l’accident, qui survient peu après qu’une salariée se soit déconnectée de son poste de travail, ne peut pas être qualifié d’accident du travail. 


Télétravail : encadrement juridique

Hier. La question du télétravail était régie par un ANI datant de 2005 ainsi que par certaines dispositions législatives, dont les plus récentes ont été insérées dans le Code du travail par les ordonnances Macron de 2017.

Aujourd'hui. Les partenaires sociaux (organisations patronales et syndicales) viennent de négocier, le 26 novembre 2020, un nouvel ANI sur la question du télétravail. Cet accord a vocation de clarifier les modalités de mise en œuvre du télétravail aussi bien en temps normal qu’en temps de crise.

Précisions. Cet ANI vient notamment apporter des précisions concernant certaines règles relatives :

  • à la définition du champ des postes télétravaillables ;
  • au double volontariat ;
  • à la motivation du refus du télétravail par l’employeur ;
  • à la prise en charge des frais professionnels, à l’équipement et l’usage des outils numériques ;
  • ou encore à la période d’adaptation du salarié en télétravail.

Nouvelles problématiques. Cet ANI prend également en compte de nouvelles problématiques :

  • l’adaptation des pratiques managériales au télétravail ;
  • la formation des managers ;
  • la nécessité du maintien du lien social et la prévention de l’isolement ;
  • la possibilité de mobiliser le télétravail pour accompagner le travailleur dans son rôle d’aidant familial.

Temps de crise. Ce document prévoit enfin un ensemble de dispositions visant à accompagner la mise en place du télétravail en temps de crise :

  • modalités d’anticipation des mesures pour la continuité de l’activité ;
  • voies de dialogue social et d’information des salariés ;
  • organisation matérielle et des équipements de travail.

Un accord restreint ? Depuis le 13 avril 2021, le contenu de cet accord est obligatoire pour l’ensemble des employeurs et salariés des entreprises appartenant un secteur professionnel représenté par les organisations patronales signataires, à savoir le Medef, la CPME et l’Union des entreprises de proximité (U2P).

À retenir

Avant d’envisager la mise en place du télétravail, pensez à l’impact organisationnel que l’introduction de cette nouvelle forme de travail pourra avoir sur vos équipes.

Si vous souhaitez le mettre en place dans votre entreprise, vous pouvez négocier un accord collectif ou élaborer une charte. Mais veillez toujours à conserver la preuve que vos salariés sont volontaires pour utiliser cette organisation de travail.
 

J'ai entendu dire

Est-il obligatoire de rembourser les frais d’utilisation du véhicule personnel du télétravailleur pour se rendre dans l’entreprise ?

Non, vous n’avez pas l’obligation de rembourser ce type de frais d’utilisation du véhicule personnel pour le trajet domicile-entreprise. Par contre, comme pour les autres salariés, vous devez prendre en charge 50 % du coût de l’abonnement de transport public du salarié pour ses déplacements domicile-lieu de travail.
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