Dirigeants et prise en charge de frais : (a)normal ?
Pas d’intérêt de la société = « revenus réputés distribués »
Les 2 fondateurs, associés minoritaires et dirigeants historiques d’une société spécialisée dans la fabrication et la vente de vins et spiritueux, ont conclu un accord avec l’associé majoritaire, destiné à mettre fin au conflit qui les opposait.
Cet accord prévoyait notamment un rachat des parts sociales de l’associé majoritaire par les 2 fondateurs. Pour pouvoir honorer cet accord, et donc procéder au rachat convenu, les dirigeants ont fait appel, personnellement, à un intermédiaire financier qui leur a prêté les fonds nécessaires.
Etant toutefois en désaccord sur le contenu du contrat de prêt, ils ont refusé de respecter l’engagement pris auprès de l’intermédiaire financier. Ce dernier a fait appel à la justice et a obtenu des fondateurs qu’ils lui versent une indemnité pour rupture abusive de contrat.
Ayant dû faire face à ce procès, les fondateurs ont engagé des avocats, dont les honoraires ont été pris en charge par la société. C’est donc naturellement que cette dernière a déduit ces honoraires de son résultat imposable.
A l’issue d’un contrôle fiscal, l’administration a remis en cause la déduction de ces charges, estimant qu’elles n’avaient pas été engagées au profit de la société, mais bien au seul profit des dirigeants. Considérant qu’il s’agissait de « revenus réputés distribués », elle a directement imposé ces sommes entre les mains des dirigeants, au titre de l’impôt sur le revenu…
…ce qu’ils contestent : pour eux, la société avait tout intérêt à prendre en charge leurs frais d’avocats afin, notamment, de favoriser la stabilité de son actionnariat.
« Faux » répond le juge qui rappelle que :
- si le recours à l’intermédiaire financier a permis aux dirigeants d’évincer l’actionnaire majoritaire et donc, de stabiliser l’actionnariat de leur société, ils ne démontrent pas que la persistance du conflit aurait pu porter une quelconque atteinte à la stabilité de la société elle-même ;
- l’engagement pris par les dirigeants auprès de l’intermédiaire financier est un engagement personnel, puisque les fonds qui leur ont été prêtés leur ont permis de racheter, en leur nom propre, les titres de l’actionnaire majoritaire.
En conséquence, la société n’a pas à supporter les conséquences financières du non-respect d’un engagement personnel souscrit par ses dirigeants. Le juge valide donc le redressement fiscal.
Source : Arrêts de la Cour Administrative d’Appel de Versailles du 1er juin 2017, n° 15VE01815 et 15VE01816
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