Le démembrement de propriété : « donner, c’est donner » ?
Pas de donation, pas de rectification !
Pour optimiser la transmission de son patrimoine immobilier, une personne a choisi de donner la nue-propriété de ses biens à ses petits-enfants et d’en conserver l’usufruit. Concrètement, elle conserve le droit de percevoir les revenus de ses biens, mais transmet le droit de disposer de ces mêmes biens à ses enfants. Malheureusement, cette personne décède moins de 3 mois après avoir consenti ce don !
Dans le cadre d’un contrôle fiscal, l’administration rehausse le montant des impôts payés au moment de la donation. Elle réclame donc un complément d’impôt, ce que conteste le nu-propriétaire, invoquant pour sa défense la « présomption légale de propriété ».
La présomption légale de propriété revient à considérer qu’un bien meuble ou immeuble, dont l’usufruit (c’est-à-dire le droit d’utiliser le bien et, le cas échéant, d’en percevoir les revenus) appartient au défunt et la nue-propriété à ses héritiers potentiels (appelés « héritiers présomptifs »), doit entièrement faire partie de la succession de l’usufruitier pour le calcul des droits de succession, jusqu’à preuve du contraire, sauf à ce que la donation ait été consentie plus de 3 mois avant le décès par acte régulier.
Le nu-propriétaire considère donc que la présomption légale de propriété induit une présomption d’inexistence de la donation. Or, qui dit absence de donation, dit absence de droits de donation !
L’administration persiste : elle considère que cette présomption, purement fiscale, n’entraîne pas l’annulation rétroactive de l’acte de donation. Partant de là, elle est en droit de demander le paiement d’un complément d’impôt.
Faux rétorque le juge : la donation étant intervenue moins de 3 mois avant le décès de l’usufruitier, la présomption légale de propriété a vocation à s’appliquer, entraînant avec elle une présomption d’inexistence de l’acte de donation… sauf à ce que le nu-propriétaire apporte la preuve de la sincérité de l’opération réalisée. Ce qui n’était pas le cas ici !
Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 1er mars 2017, n°15-14170
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