Loi d’urgence : que contient-elle ?
Déclaration d’un « état d’urgence sanitaire »
La nouvelle Loi prévoit la possibilité de déclarer, par décret, un « état d’urgence sanitaire », en cas de catastrophe sanitaire menaçant la santé de la population, de par sa nature et de sa gravité.
Il peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, ainsi que sur les territoires d’outre-mer, dans lesquels il peut être adapté dans un délai de deux mois à compter de la publication de la loi le mettant en place.
La durée de cet état d’urgence est d’un mois (et ne peut être prolongée que par une nouvelle loi).
Par exception, l’état d’urgence sanitaire déclaré en raison de l’épidémie liée au coronavirus (Covid-19) est d’une durée de deux mois à compter de l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi, soit le 24 mars 2020.
Conséquences et pouvoirs du gouvernement
La déclaration de cet état « d’urgence sanitaire » donne de nouveaux pouvoirs au gouvernement pour enrayer la crise : le Premier Ministre peut notamment ordonner, par décret, la mise en quarantaine des personnes susceptibles d’être affectées par la situation ou la réquisition de biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire. Toute personne qui ne respecte pas ces mesures encourt une peine d’emprisonnement de 6 mois et une amende de 10 000 €.
Il peut également restreindre la liberté de circulation et celle d’entreprendre, sous peine du paiement d’une amende de 135 euros (amende pour les contraventions de 4ème classe).
Quant au Ministre de la Santé, il peut prescrire par arrêté toute mesure règlementaire relative à l’organisation et au fonctionnement du dispositif de santé.
A toutes fins utiles, notez que les mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire peuvent être contestées devant le juge administratif.
Mesures juridiques en faveur des entreprises
En vue de prévenir et faire face aux conséquences de l’épidémie de coronavirus, le gouvernent peut intervenir dans différents domaines par voie d’ordonnance.
- Aide aux entreprises en difficulté
Afin de venir en aide aux entreprises touchées par la crise, le gouvernement peut prendre différentes mesures, notamment décider de la mise en œuvre d’aides directes et indirectes aux entreprises mises en difficulté suite à la situation d’urgence, (notamment avec la mise en place de mesures de soutien à leur trésorerie).
Il peut également décider de la modification des obligations des entreprises, notamment des délais de paiement et des pénalités, prévues aux contrats qu’elles ont conclus avec leurs clients et leurs fournisseurs, et tout particulièrement dans les contrats de vente de voyage et de séjour.
Enfin, la capacité de la BPI France à accorder des garanties peut être renforcée.
- Trêve hivernale
Le gouvernement peut prolonger la trêve hivernale, pendant laquelle toute mesure d’expulsion des logements est en principe interdite, au-delà du 31 mars 2020.
- Marchés publics
Les règles de passation, les délais de paiements et les modalités d’exécution et de résiliation des marchés publics, ainsi que des contrats publics afférents, sont susceptibles d’être adaptés.
- Petites entreprises
Pour les « microentreprises » (soit celles qui occupent moins de 10 personnes et qui ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’€) affectées par l’épidémie, le gouvernement peut décider du report ou de l’étalement du paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférentes aux locaux professionnels.
Le gouvernement peut également suspendre, au bénéfice de ces entreprises, le paiement des pénalités financières ou des mesures d’interruption ou de réduction d’énergie en cas de non-paiements des factures.
- Sociétés
Afin de tenir compte de la situation exceptionnelle, deux mesures sont notamment possibles en faveur des entreprises.
D’abord, les délais de prescription et les conditions de réunion des assemblées générales et organes de direction sont susceptibles d’être aménagés, et simplifiés.
Par ailleurs, les règles d’arrêté, d’audit, de revue, d’approbation et de publication des comptes et des autres documents que les entreprises sont tenues de déposer ou de publier, ainsi que les règles d’affectation des bénéfices et de paiement des dividendes, peuvent être modifiées.
- Copropriété
En matière de copropriété, il peut être décidé d’adapter les règles applicables pour tenir compte, notamment pour la désignation des syndics, de leur impossibilité ou difficultés à réunir les assemblées générales des copropriétaires.
Mesures sociales
La Loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 autorise le Gouvernement à prendre diverses mesures sociales par ordonnance. Voici un tour d’horizon des mesures attendues en matière sociale.
- Activité partielle
Afin de limiter les ruptures de contrats de travail et d’atténuer les effets de la baisse d'activité, il est prévu de faciliter et de renforcer le recours à l'activité partielle pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille.p>
A cette fin, le régime social applicable aux indemnités d’activité partielle pourrait être temporairement adapté.
Les adaptations du dispositif devraient permettre de réduire le reste à charge pour l’employeur ou, pour les indépendants, la perte de revenus.
Le dispositif devrait, également, adapter ses modalités de mise en œuvre, en favorisant une meilleure articulation avec la formation professionnelle et une meilleure prise en compte des temps partiels.
- Arrêts maladie
Spécifiquement pour le covid-19, les indemnités journalières de sécurité sociale sont versées ou garanties dès le 1er jour d'arrêt, pour tous les arrêts de travail débutant à compter de la date de publication de la Loi d’urgence (soit le 24 mars 2020) et ce, jusqu'à la proclamation de la fin de l'état d'urgence.
Le Gouvernement pourra prévoir, par ordonnance, d’adapter les conditions et modalités d'attribution de l'indemnité complémentaire aux indemnités journalières en cas de risque sanitaire grave et exceptionnel (comme, par exemple, l’ancienneté du salarié requise pour bénéficier de cette indemnisation).
- Congés payés, RTT, repos
Le Gouvernement pourra permettre, par ordonnance, à un accord d'entreprise ou de branche d'autoriser l'employeur à imposer ou à modifier les dates de congés payés dans la limite de 6 jours ouvrables (soit une semaine de CP).
Cet accord pourra déroger aux délais de prévenance et aux modalités de prise de ces congés définis par le Code du travail et par les conventions et accords collectifs applicables dans l'entreprise.
En outre, le Gouvernement autorisera, par ordonnance toujours, l’employeur à imposer, ou à modifier, unilatéralement des jours de RTT, des jours de repos prévus par les conventions de forfait et des jours de repos affectés sur un compte épargne temps du salarié, en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités d'utilisation définis par le Code du travail ou les conventions et accords collectifs (ou encore le statut général de la fonction publique).
- Dérogations concernant la durée du travail
Dans les secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation ou à la continuité de sa vie économique et sociale (le secteur médical ou du transport, notamment), les entreprises pourront déroger aux dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical.p>
- Rémunérations
Les dates limites et modalités de versement de la participation des salariés aux résultats de l’entreprises, de l’intéressement ou encore de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat 2020 pourront être aménagées.
- Représentation du personnel
Les élections professionnelles des TPE, devant se dérouler en 2020 pourront faire l’objet d’adaptation. Auquel cas, les mandats des conseillers prud'hommaux et des membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles seront prorogés à titre exceptionnel.
Par ailleurs, les entreprises organisant actuellement leurs élections des représentants du personnel au sein du CSE peuvent interrompre le processus électoral en cours.
Une ordonnance modifiera, en outre, les modalités d’information et de consultation des instances représentatives du personnel pour leur permettre d’émettre les avis requis dans les délais impartis.
- Surveillance médicale des salariés
Une ordonnance pourra aménager les modalités de surveillance médicale des salariés et notamment concernant ceux qui, en raison de l'épidémie, n'ont pas été reçus pour leur visite médicale.
- Formation professionnelle
Une ordonnance pourra aménager la formation professionnelle, notamment en ce qui concerne la rémunération des stagiaires et le paiement des cotisations sociales relatives à la formation professionnelle.
- Prestations sociales
Une ordonnance pourrait également adapter, à titre exceptionnel, les modalités de détermination des durées d’attribution de l'aide au retour à l’emploi, l’allocation spécifique de solidarité ou de l’allocation de travailleur indépendant.
Il est également prévu de permettre la poursuite des soins et des prestations des personnes vulnérables (en situation de handicap, âgées ou en situation de pauvreté).
- Garde d’enfants
Une ordonnance s’attachera également à l’accueil du jeune enfant dont les parents exercent une activité professionnelle maintenue sur le lieu de travail. Elle permettra d’étendre exceptionnellement et temporairement l’autorisation du nombre d’enfants accueillis simultanément par un(e) assistant(e) maternel(le) agréé(e).
Elle prévoira également la communication nécessaire aux familles au sujet de l’offre d’accueil et de sa disponibilité.
- Travailleurs étrangers
Des mesures de prolongation (dans la limite de 180 jours) de la durée de validité des visas de long séjour, titres de séjour, autorisations provisoires de séjour, récépissés de demande de titre de séjour ainsi que des attestations de demande d’asile expirés entre le 16 mars 2020 et le 15 mai 2020, sont attendues.
- Affiliation des expatriés de retour en France
Les Français expatriés de retour en France entre le 1er mars 2020 et le 1er juin 2020 et n'exerçant pas d'activité professionnelle seront affiliés à l'assurance maladie sans carence. Un Décret devra préciser les modalités d'application.
- Concernant l’aide sociale à l’enfance
Il ne peut être mis fin, pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire, à la prise en charge par le conseil départemental des jeunes, au titre de l’aide sociale à l’enfance précédemment pris en charge en tant que mineurs, mineurs émancipés ou jeunes majeurs de moins de 21 ans.
Source : Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
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