Garantie légale des vices cachés : ce qu’il faut savoir
Garantie légale des vices cachés : de quoi s’agit-il ?
Une garantie. La « garantie légale des vices cachés » protège le client contre les défauts cachés affectant le produit vendu : ces défauts cachés, qui, par définition, ne sont pas visibles au moment de l’achat, doivent rendre le produit impropre à l'usage auquel il est destiné ou diminuer tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Un vice caché. Pour que la garantie soit mise en œuvre, il faut que le vice n’ait pas été connu de l’acquéreur lors de l’achat (si le vice était apparent lors de la vente, la garantie ne s’applique pas). Il faut également que le vice ait existé avant la vente ou qu’il ait été en germe à cette date.
Fruits non consommables. Lorsqu’il apparaît que des fruits ne sont pas consommables à leur réception, l’acheteur ne peut pas se prévaloir de la garantie des vices cachés lorsqu’il a pu se convaincre, avant l’achat de ces fruits, qu’ils étaient atteints d’un vice de nature à entraîner leur perte à plus ou moins bref délai. Le vice est, en effet, alors considéré comme apparent.
Tracteur en panne. Lorsqu’un tracteur tombe en panne peu après avoir été acheté, l’acquéreur ne peut pas se prévaloir de la garantie des vices cachés s’il ne prouve pas que le défaut causant la panne était antérieur à l’achat.
Dysfonctionnement d'une dépanneuse. Lorsqu’une dépanneuse présente des dysfonctionnements peu après avoir été achetée, l’acquéreur peut obtenir l’annulation de la vente, lorsque ceux-ci proviennent de défauts de conception qui n’étaient pas visibles ni détectables par un professionnel lors de son achat.
Serrure trop près du mur. Lorsqu’une porte d’entrée ne peut pas être ouverte sans se blesser la main, car la serrure est trop près du mur, ce défaut relève de la garantie des vices cachés.
Chaussures bas de gammes. Il a été jugé que des chaussures pour enfants présentant un décollement de la semelle moins de 2 mois après leur commercialisation présentent un vice caché qui justifie l’annulation de leur vente. En effet, même si elles n’étaient pas vendues en tant que chaussures de sport, elles demeurent des chaussures pour enfants, lesquels peuvent être amenés à faire du sport dans le cadre de leurs activités. Par conséquent, le défaut relevé est suffisamment grave pour justifier l’annulation de la vente.
Le saviez-vous ?
Tout défaut porté à la connaissance de l’acquéreur permet d’écarter l’application de la garantie des vices cachés. Toutefois, si l’ampleur et les conséquences d’un défaut visible ne se révèlent qu’après la vente, la garantie des vices cachés peut jouer.
Une distinction. Le caractère caché du défaut est apprécié différemment selon que l’acquéreur est ou non un professionnel :
-
s’il est professionnel, il est présumé connaître le vice s’il est un professionnel de la même spécialité que le vendeur (cette présomption tombe s’il prouve que le vice était indécelable) ;
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s’il est non professionnel, il est présumé ne pas connaître le vice si ce dernier était effectivement caché au jour de la vente ; il faut toutefois qu’il ait porté une attention minimum, comme toute personne soucieuse de ses intérêts, lors de l’examen du produit.
Le saviez-vous ?
Lorsque l’acquéreur est un professionnel et le vendeur non-professionnel, l’acquéreur ne peut pas se prévaloir de la garantie des vices cachés.
Un contrat de vente. La garantie ne s’applique que pour les contrats de vente de produits, de biens ou de marchandises.
Garantie légale des vices cachés : des caractéristiques précises
2 critères alternatifs. Pour faire jouer la garantie des vices cachés, il faut que 2 critères soient remplis. Ces critères sont alternatifs : il suffit que l’un soit remplit pour que la garantie puisse être mise en œuvre.
Critère 1. La garantie s’applique lorsque le vice rend impropre le produit à l’usage auquel il est destiné. Si l’acquéreur utilise le produit pour un usage auquel il n’était pas destiné, il ne peut pas se prévaloir de la garantie légale des vices cachés.
Critère 2. La garantie peut également être mise en œuvre lorsque le vice diminue tellement l’usage du produit que l’acquéreur ne l’aurait pas acheté ou n’en aurait donné qu’un prix moindre.
Le saviez-vous ?
L’usure d’un produit d’occasion n’est pas un vice caché.
Pour la petite histoire. Après avoir acheté un véhicule d’occasion mis en service depuis 16 ans et affichant plus de 200 000 kilomètres au compteur, l’acheteur s’aperçoit d’une usure importante au niveau du train arrière du véhicule, il demande donc l’annulation de la vente. Le juge a refusé cette demande estimant qu’il s’agissait d’une usure normale au vu de la vétusté du véhicule concerné.
Garantie légale des vices cachés : le double choix de l’acquéreur
Pour l’acquéreur, 2 solutions. L’acquéreur a 2 ans pour engager l’action en garantie à compter du jour où il a connaissance du vice. Lorsque l’action en garantie des vices cachés est mise en œuvre, l’acquéreur a 2 solutions :
-
soit il demande la résolution de la vente contre restitution du prix (on parle d’action « rédhibitoire ») ;
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soit il demande une diminution du prix de vente et conserve le bien acheté (on parle d’action « estimatoire ») : l’action en réduction du prix s’apprécie par rapport au coût du vice et non par rapport à la valeur vénale du produit ; ce prix est déterminé par un expert.
Un choix discrétionnaire. Ce choix lui appartient : il n’a pas à se justifier. Mais l’acquéreur peut seulement demander la réduction du prix lorsque :
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le vice n’est pas assez grave pour justifier une résolution de la vente ;
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le produit ne peut plus lui être restitué, sauf si cette restitution est impossible par sa faute ;
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le produit a été détruit par sa faute.
À noter. Le juge a récemment rappelé que le délai de 2 ans est un délai de prescription et non de forclusion. Concrètement, cela signifie que le délai de 2 ans est susceptible d’être suspendu en cas de demande d’instruction du juge.
Garantie légale des vices cachés : la responsabilité du vendeur
Qui est concerné ? C’est le vendeur qui est tenu par cette garantie légale des vices cachés vis-à-vis de ses clients. Un tiers au contrat de de vente ne peut pas se prévaloir de la garantie légale des vices cachés. En qualité de vendeur, vous pouvez être condamné à payer des dommages-intérêts à l’acquéreur si votre responsabilité est engagée au titre de la garantie légale des vices cachés. Si tel est le cas, leur montant va varier en fonction de votre connaissance ou non de la présence du vice.
Vendeur ignorant le vice. Si vous ignoriez la présence du vice caché, vous ne devez rembourser à l’acquéreur que le prix du produit et les frais occasionnés par la vente.
Vendeur connaissant le vice. Si vous connaissiez la présence du vice caché, vous êtes tenu, outre de restituer le prix payé par le client, de régler tous les dommages et intérêts envers l’acquéreur. Pour mémoire, le vendeur professionnel est présumé connaître la présence du vice.
Assurance. Il est possible de souscrire une assurance vous protégeant si votre responsabilité est engagée au titre de la garantie des vices cachés.
Garantie des vices cachés : y échapper ?
En pratique. Il est possible de prévoir dans vos contrats et dans vos conditions générales de vente une clause d’exonération des vices cachés. Toutefois, cette clause ne sera valable qu’à l’égard des acquéreurs professionnels de la même spécialité que le vendeur.
Pour un acquéreur professionnel de la même spécialité. La clause d’exonération des vices cachés pourra prévoir une exonération totale ou partielle pour le vendeur. Ainsi, par exemple, pour limiter votre responsabilité, vous pouvez prévoir le délai dans lequel elle pourra être engagée après la découverte du vice. Mais pour que cette clause d’exonération des vices cachés soit valable, il faut que l’acquéreur l’ait acceptée. Assurez-vous qu’il a donc bien pris connaissance de vos documents contractuels et qu’il les a signés.
Pour les autres acquéreurs. Qu’il s’agisse d’un acquéreur professionnel d’une spécialité différente ou d’un acquéreur non professionnel, il n’est pas possible de limiter la responsabilité du vendeur au titre de la garantie des vices cachés.
Le saviez-vous ?
Vous devez mentionner dans vos conditions générales de vente (CGV), à l’égard des consommateurs, que vous êtes tenus des défauts cachés du bien vendu au contrat dans les conditions prévues par la Loi.
Un encadré contenu dans les CGV doit rappeler que le consommateur peut décider de mettre en œuvre la garantie contre les défauts cachés et que dans cette hypothèse, il peut choisir entre la résolution de la vente ou une réduction du prix de vente.
À retenir
Dans le cadre d’un contrat de vente, vous êtes tenu à l’égard de vos clients de la garantie légale des vices cachés. Pour qu’elle soit mise en jeu, il faut que ce vice existe au moment de la vente, mais qu’il ne soit pas connu de l’acquéreur.
Votre responsabilité sera plus ou moins étendue selon que l’acquéreur est ou non un professionnel de la même spécialité que vous.
- Articles 1641 et suivants du Code civil
- Article 2224 du Code civil
- Article 2232 du Code civil
- Article L 121-7 du Code des assurances
- Arrêt de la Cour de cassation, 2e chambre civile, du 29 avril 2004, no 01-16432 (le tiers ne peut pas invoquer la garantie des vices cachés)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 22 mars 1965, no 62-12871 (NP) (l’usure n’est pas un vice caché)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 16 octobre 2007, no 06-13805 (ignorance du vice au moment de la vente)
- Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 14 mars 2012, no 11-10860 (défaut dont l’ampleur ne se révèle qu’après la vente)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 8 décembre 1980, no 79-10848 (acheteur de la même spécialité que le vendeur)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1re chambre civile, du 23 février 1983, no 81-16293 (acquéreur professionnel - vice caché car indécelable)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 26 mars 2013, no 12-10204 (achat par un professionnel auprès d’un vendeur non professionnel)
- Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 6 novembre 1974, no 73-14128 (vice caché en germe lors de l’achat)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 10 mai 2000, no 97-17472 (restitution impossible - faute du vendeur)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 19 mars 2013, no 11-26566 (clause d’exonération des vices cachés non valables - professionnels de spécialité différentes)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1re chambre civile, du 21 octobre 2016, no 15-19638 (le vendeur professionnel est tenu de tous les dommages-intérêts envers l’acquéreur)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1re chambre civile, du 16 novembre 2016, no 25-25630 (tracteur en panne -défaut non antérieur à l’achat)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 14 novembre 2019, no 18-14502 (garagiste - achat dépanneuse neuve présentant des dysfonctionnements)
- Arrêt de la Cour de cassation, 3 chambre civile, du 30 janvier 2020, no 18-26790 (SCI et construction d’une maison - serrure trop près du mur)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 17 juin 2020, no 19-10207 (des chaussures pour enfants présentant un décollement de la semelle moins de 2 mois après leur commercialisation présentent un vice caché qui justifie l’annulation de la vente)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1re chambre civile, du 25 novembre 2020, no 19-18882 (véhicule d’occasion et vétusté)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 29 mars 2023, no 21-21346 (attentes du client et vices cachés)
- Arrêt de la Cour de cassation, 1re chambre civile, du 28 février 2024, no 22-19921 (délai de prescription et non de forclusion)