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Rescrit fiscal : faut-il demander l’avis de l’administration ?

Date de mise à jour : 01/06/2023 Date de vérification le : 01/06/2023 9 minutes

Vous vous demandez si votre entreprise répond à toutes les conditions pour bénéficier d’une réduction d’impôt sur les bénéfices ou d’un dispositif fiscal particulier. Vous craignez les conséquences d’une décision qui serait erronée, notamment en cas de contrôle fiscal. Il existe un moyen de vous rassurer : il vous suffit de solliciter un « rescrit fiscal ». Mais attention tout de même…

Rédigé par l'équipe WebLex.
Rescrit fiscal : faut-il demander l’avis de l’administration ?


Solliciter un rescrit fiscal : quel intérêt ?

Rescrit fiscal : de quoi s’agit-il ? Il s’agit, en pratique, d’une réponse donnée par écrit par le service des impôts des entreprises à une question posée par une entreprise. En clair, vous interrogez l’administration fiscale sur une problématique que rencontre votre entreprise au regard d’un impôt ou d’une taxe, à charge pour l’administration de vous apporter une réponse.

Pour quoi ? Cela n’aura échappé à personne : les règles fiscales, notamment celles applicables à l’entreprise, sont d’une rare complexité ; et n’en déplaise à nos gouvernants, la tendance ne va pas à la simplification ! Il peut donc être intéressant, pour vous, de solliciter l’avis de l’administration fiscale sur la situation de l’entreprise, quels que soient l’impôt et/ou la taxe dont elle est redevable : vous pourrez ainsi être rassuré quant à une application correcte de la règlementation fiscale par votre entreprise.

Exemple. Vous vous interrogez sur l’application du taux de TVA et notamment sur l’application du taux réduit à vos opérations… Vous vous interrogez sur la comptabilisation et la déduction fiscale d’une charge… Bien qu’il vous semble que vous puissiez bénéficier de la réduction d’impôt au titre du mécénat, vous vous demandez toutefois si le versement que vous avez effectué ne sera pas remis en cause… Voilà autant de situations qui peuvent motiver une demande auprès de l’administration.

Pourquoi ? L’intérêt du rescrit fiscal réside dans le fait que la réponse de l’administration fiscale l’engage : concrètement, une fois qu’elle a apporté une réponse à votre question (on dit qu’elle a pris formellement position sur la situation que vous lui avez exposée), elle ne pourra pas procéder à l’avenir à une rectification fiscale qu’elle fonderait sur une appréciation différente. En clair, vous ne risquez pas de redressement fiscal à l’avenir… pour autant que toutes les conditions d’application du rescrit fiscal soient respectées.

Faut-il le faire ? Voilà une question que l’on se pose légitimement : faut-il demander l’avis de l’administration fiscale lorsqu’on a un doute sur l’application de la règlementation fiscale dans l’entreprise ? Le problème, c’est que la réponse peut être autant positive que négative :

  • pour une réponse positive, retenons l’avantage que vous retirerez à opposer à l’administration le contenu de sa réponse : vous bénéficiez d’une garantie « anti-rectifications fiscales » ;
  • pour une réponse négative, retenons que, pour que le rescrit fiscal produise tous ses effets, vous devrez fournir des informations précises, ce qui suppose une transparence totale de votre part, transparence qui suscite toujours quelques réticences, surtout lorsqu’on a affaire avec l’administration fiscale.

N’y allez pas seul ! Solliciter un rescrit peut conduire à un effet boomerang inattendu : il ne s’agit pas de fournir à l’administration des informations qui pourraient mettre en évidence des insuffisances, des inexactitudes ou des omissions, sources possibles de rectifications fiscales. Avant d’entamer une démarche de ce type, assurez-vous que la situation fiscale de votre entreprise n’est pas susceptible d’être remise en cause. Voilà pourquoi le recours aux services de votre conseil habituel sur ce point n’est peut-être pas à négliger.

Le saviez-vous ?

Dans certaines hypothèses, vous devrez recourir à des procédures de rescrits répondant à des conditions d’application particulières. Ce sera le cas si vous sollicitez un « rescrit valeur » (qui permet d’obtenir un avis sur la valorisation de l’entreprise dans le cadre d’une opération de transmission) ou un « rescrit abus de droit » (qui vous permet de vous prémunir contre les conséquences d’un abus de droit fiscal).

Il existe également la procédure des « accords implicites », qui s’applique aux demandes relatives à certains régimes d’amortissements exceptionnels, aux demandes portant sur les dispositifs d’allègement d’impôt sur les bénéfices (pôles de compétitivité, régime des entreprises nouvelles, des jeunes entreprises innovantes, etc.), aux demandes en matière de crédit d’impôt recherche, ou encore aux demandes permettant de qualifier, sur le plan fiscal, une activité professionnelle pour apprécier la règlementation qui lui est applicable.

A noter. Depuis le 7 juin 2018, la documentation administrative, déjà conséquente, s’est enrichie de par la création d’une nouvelle section dans le BOFiP (Bulletin Officiel des Finances Publiques), section qui est réservée aux rescrits ayant une portée générale. N’hésitez pas à aller consulter cette section pour vérifier si la question que vous vous posez n’a pas déjà été soumise à l’administration.


Solliciter un rescrit fiscal : quelles conditions ?

Une demande de votre part. Solliciter un rescrit auprès de l’administration fiscale suppose que vous fassiez une demande écrite, sur papier libre, demande qui devra respecter un contenu précis : lequel ?

Une demande nominative. Pour espérer obtenir une réponse de la part de l’administration fiscale, vous devrez mentionner toutes les coordonnées de l’entreprise : une demande qui ne serait pas nominative ne sera évidemment pas prise en compte.

Un contenu précis et détaillé. Pour que l’administration fiscale puisse se prononcer en toute connaissance de cause, vous aurez soin, dans votre demande, de faire une présentation précise, complète, détaillée et sincère de la situation qui motive votre demande et d’expliciter l’analyse que vous en faites. Vous devrez, en outre, préciser le texte fiscal sur la base duquel vous saisissez l’administration pour qu’elle prenne utilement position.

Exemple. Un chirurgien-dentiste s’est vu refuser le bénéfice de l’exonération d’impôt liée à son implantation en ZAFR. S’il a bien obtenu l’agrément préalable de l’administration, celle-ci ne s’est pas trouvée liée par sa prise de position au moment du contrôle fiscal : la demande du chirurgien n’était pas suffisamment précise et n’a pas permis à l’administration de se prononcer en toute connaissance de cause. Le professionnel n’avait pas précisé dans sa demande la date de création de l’entreprise, la date de début de son activité, le fait qu’il reprenait le cabinet familial, etc.

Le saviez-vous ?

Pour conférer une date certaine à votre demande, adressez-là à votre service des impôts des entreprises sous pli recommandé avec accusé réception. Vous pouvez aussi opter pour une remise en mains propres contre décharge.

Pour information. Si elle estime que votre demande est incomplète, l’administration doit vous adresser, par lettre recommandée avec avis de réception, un courrier sollicitant les renseignements complémentaires nécessaires à l’étude de votre dossier.

A noter. La garantie ne vaut que si l’administration est sollicitée et se prononce sur des demandes se rapportant à la base de calcul d’un impôt ou d’une taxe, au taux, à la liquidation de l'impôt ou aux règles de prescription. Elle ne s’applique pas aux demandes portant sur la procédure d’imposition, le recouvrement de l’impôt, les pénalités, la procédure contentieuse, ou encore sur les obligations comptables.


Solliciter un rescrit fiscal : quelles conséquences ?

3 mois pour répondre. L’administration fiscale dispose d’un délai de 3 mois pour vous répondre : seule une réponse expresse l’engagera, ce qui suppose qu’elle prenne position par écrit. Pour que sa réponse l’engage effectivement, il faut qu’elle apporte son appréciation sur la situation que vous lui avez exposée au regard d’un texte fiscal, en vous livrant un avis juridique à partir des éléments que vous aurez portés à sa connaissance.

Exemples. L’administration émet un avis qui l’engage lorsqu’elle s’est par exemple expressément prononcée sur la validité d’une déduction fiscale d’une provision ou sur le taux d’amortissement retenu par l’entreprise. Inversement, l'administration ne se livre pas à l'appréciation d'une situation de fait en remboursant un crédit de TVA : elle n’est donc pas engagée par le remboursement réalisé, remboursement qui pourra être remis en cause a posteriori lors d’un contrôle de la TVA due par l’entreprise.

Le saviez-vous ?

La prise de position de l’administration doit vous concerner directement, vous et/ou votre entreprise. Vous ne pourrez pas vous prévaloir de l’appréciation qu’aura portée l’administration sur la situation d’autres personnes (sauf dans l’hypothèse où vous auriez participé à l’acte ou à l’opération qui a justifié la demande de rescrit).

Une réponse dont vous pourrez vous prévaloir. Dès lors que l’administration a pris formellement position sur la situation que vous lui avez exposée, elle ne pourra pas changer d’interprétation lors d’un contrôle ultérieur : elle devra se conformer à sa propre réponse. Vous ne risquez donc pas de subir un redressement fiscal sur ce point, à l’avenir, sous réserve de quelques nuances qu’il est important de préciser.

Mais attention. Pour que vous puissiez utilement opposer la réponse de l’administration, il faut que soient réunis les critères suivants :

  • vous devez être de bonne foi, c’est-à-dire que vous devez avoir fourni à l’administration tous les éléments lui permettant de se prononcer en connaissance de cause ;
  • la situation examinée lors d’un contrôle ultérieur est strictement identique à celle sur laquelle l’administration avait pris position ;
  • vous avez respecté à la lettre la solution et les éventuelles recommandations formulées par l’administration dans sa réponse écrite ;
  • enfin, la garantie ne peut faire échec qu'aux compléments d'imposition venant s'ajouter aux impositions initiales précédemment mises en recouvrement.

Le saviez-vous ?

La prise de position de l’administration, dont vous pouvez vous prévaloir pour faire échec à une imposition supplémentaire, suppose qu’elle ait été exprimée antérieurement à la date d’expiration du délai de déclaration ou, en l’absence d’obligation déclarative, avant la date de mise en recouvrement de l’imposition initiale.

Attention aux changements ! La garantie qui vous protège contre un redressement fiscal futur cessera de s’appliquer si :

  • votre situation n’est plus identique à celle que vous avez présentée dans votre demande ;
  • la règlementation fiscale applicable à votre situation a évolué, soit du fait d’un changement intervenu dans la législation, soit du fait d’un changement intervenu dans la doctrine administrative ou dans la jurisprudence ;
  • si l’administration elle-même modifie son appréciation sur la situation que vous lui avez présentée : dans cette hypothèse, son ancienne appréciation ne sera caduque que si elle vous a avisé de ce changement, qui ne vaut, en outre, que pour l’avenir.

A retenir

En répondant à une demande de rescrit, l’administration fiscale ne pourra pas procéder à un rehaussement d'imposition qu’elle motiverait sur une appréciation différente de celle qu’elle a apportée dans le cadre de sa réponse. Cela suppose, toutefois, que vous soyez de bonne foi, que la situation évoquée auprès de l’administration n’ait pas évoluée, et que vous respectiez la solution et les éventuelles recommandations formulées par l’administration dans sa réponse.

J'ai entendu dire

Que peut-on faire si la réponse de l’administration fiscale ne nous satisfait pas : peut-on faire appel de cette décision ?

Si la réponse de l’administration fiscale ne vous satisfait pas, vous avez la possibilité de solliciter un nouvel examen de votre demande initiale (vous avez deux mois, à compter de la réception de la réponse de l’administration à votre demande initiale pour solliciter ce deuxième avis). Dans le cadre de cette seconde demande, vous avez la possibilité d’être entendu par les services de l’administration fiscale. Vous pouvez également passer outre l’avis de l’administration, mais ce n’est pas nécessairement recommandé : vous prenez le risque de faire l’objet d’un rehaussement en cas de contrôle.

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