Responsabilité pénale du dirigeant : ce qu’il faut savoir
Responsabilité pénale du dirigeant : une infraction pénale
Principe. Pour qu’un dirigeant engage pénalement sa responsabilité, il faut tout d’abord que soit constituée une infraction pénale. Mais qu’est-ce qu’une « infraction pénale » ?
Une définition précise… Une infraction pénale résulte de la violation d’une loi qui est frappée par une sanction spécifique qui est pénale. Il peut s’agir d’une contravention, d’un délit ou d’un crime.
Exemples. Il existe de nombreuses infractions pénales : escroquerie, abus de biens sociaux, faux et usage de faux, absence de souscription d’une assurance décennale professionnelle obligatoire, violation de certaines règles pénales relevant du droit du travail ou du droit des sociétés, etc.
Garantie de livraison. Un artisan du bâtiment commet une faute pénale lorsqu’il entreprend l’exécution des travaux sans avoir obtenu la garantie de livraison prévue par la loi pour les contrats de construction de maison individuelle.
Le saviez-vous ?
Lorsqu’il commet une infraction pénale intentionnelle, séparable de ses fonctions sociales, le dirigeant peut engager sa responsabilité civile personnelle. C’est ainsi qu’un dirigeant d’une société de construction de piscine, qui n’avait pas souscrit d’assurance responsabilité décennale intentionnellement, a dû assumer personnellement les frais de réparation d’une piscine qui présentait de graves malfaçons.
Une infraction nécessairement commise par le dirigeant ? Pour qu’un dirigeant engage sa responsabilité pénale, il n’est pas nécessaire qu’il ait lui-même commis la faute. Sa responsabilité est aussi engagée :
- lorsque la faute pénale est commise par des salariés ;
- lorsqu’il est complice d’infractions pénales ;
- lorsqu’il commet des actes de recel suite à une infraction pénale (est constitutif d’un recel, par exemple, le fait de bénéficier, en toute connaissance de cause, du produit d’une infraction pénale).
Exonération de responsabilité. Toutefois, le dirigeant peut être exonéré de sa responsabilité lorsqu’il prouve qu’il ne pouvait pas empêcher le comportement de l’auteur de l’infraction ou qu’il a délégué son pouvoir à l’auteur de l’infraction (un salarié, par exemple).
Responsabilité pénale du dirigeant : les sanctions
Des sanctions variables. Les sanctions prononcées à l’encontre d’un dirigeant qui a commis une infraction pénale varient selon que l’infraction commise est un « délit » ou une « contravention ».
Délit. Pour un délit, le dirigeant encourt les sanctions suivantes :
- l'emprisonnement ;
- la contrainte pénale (la personne condamnée évite la prison mais est assujettie aux respects d’obligations et d’interdictions) ;
- l’amende dont le montant minimum est de 3 750 € ;
- le jour-amende (pendant un certain nombre de jours, la personne condamnée va payer une amende dont le montant ne peut pas dépasser 1 000 €) ;
- le stage de citoyenneté ;
- le travail d'intérêt général ;
- certaines peines privatives ou restrictives de droits (suspension ou annulation du permis de conduire, interdiction d’exercer une activité professionnelle déterminée, etc.) ;
- certaines peines complémentaires (suspension, annulation ou interdiction d’exercer un droit) ;
- la sanction-réparation.
Contravention. Pour une infraction qualifiée de contravention, un dirigeant risque d’être condamné au paiement d’une amende dont le montant maximal est de 1 500 €. Il peut être condamné à des peines complémentaires comme la suspension du permis de conduire, l’interdiction d’émettre des chèques, etc.
Attention ! Le dirigeant doit répondre des infractions qu’il commet personnellement, même si elles ont été commises dans le cadre de ses fonctions et même si les infractions en question ne sont « que » des contraventions (et qu’elles ne présentent donc pas une particulière gravité). Il engage donc sa responsabilité à l’égard des personnes auxquelles il cause un dommage en commettant ces infractions.
Recel. Le recel est puni de 5 ans d'emprisonnement et de 375 000 € d'amende.
Complicité. Si le dirigeant se rend complice d’une infraction pénale, il est jugé comme s’il avait commis lui-même l’infraction pénale.
À noter. Une société peut aussi être condamnée pénalement si une infraction a été commise pour son compte par son ou ses dirigeants (ou toute personne titulaire d’une délégation de pouvoir). Dans ce cas, les sanctions peuvent aller de la simple amende (d’un montant 5 fois supérieur à celui applicable aux particuliers) à la dissolution de la société. Bien entendu, la responsabilité pénale de la société n’exclut pas celle du dirigeant qui peut être engagée pour la même infraction.
À retenir
Un dirigeant engage, par principe, sa responsabilité pénale lorsqu’une infraction pénale est commise dans le cadre de son activité professionnelle (qu’elle soit commise par lui ou par des salariés). Il peut néanmoins voir sa responsabilité exonérée dans certains cas (notamment lorsqu’il a délégué son pouvoir).
- Articles 131-3 et suivants du Code pénal (sanctions délits et contraventions)
- Article 381 du Code pénal (amende-délit)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 6 décembre 2016, no 14-25626 (absence de souscription d’une assurance décennale professionnelle obligatoire-faute séparable des fonctions sociales du dirigeant)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre criminelle, du 5 avril 2018, no 16-83984 (responsabilité personnelle du dirigeant et contravention)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 18 septembre 2019, no 16-26962 (faute détachable des fonctions de dirigeant même si commises dans ce cadre)
- Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 9 juillet 2020, no 18-21552 (faute pénale d’un artisan du bâtiment)