Salarié inapte : le point sur sa rémunération
Inaptitude du salarié : suspension du versement du salaire ?
Et la rémunération du salarié dans tout ça ? Avant toute chose, vérifiez les dispositions de la convention collective applicable afin de vous assurer que le salarié ne bénéficie pas de dispositions dérogatoires par rapport à celles du Code du travail. Si ce n’est pas le cas :
- dans un 1er temps, le salarié déclaré inapte étant dans l’incapacité d’occuper ses fonctions habituelles, vous ne serez pas tenu de maintenir sa rémunération ;
- dans un 2nd temps, si vous n’avez pas procédé au reclassement du salarié ou à la rupture de son contrat de travail dans un délai d’un mois à compter de la date du constat de l’inaptitude, vous devez reprendre le versement de son salaire.
À noter. Des arrêts de travail (dus à une rechute d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle) postérieurs à une déclaration d’inaptitude ne sont pas de nature à suspendre, une nouvelle fois, le contrat de travail, et ne peuvent pas faire échec à la procédure d’inaptitude : l’employeur a donc 1 mois, à compter de la déclaration d’inaptitude pour reclasser ou licencier le salarié. A l’échéance de ce délai, si le salarié n’est ni reclassé, ni licencié, l’employeur doit reprendre le versement des salaires.
Le saviez-vous ?
Ce principe est valable dans toutes les situations : que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non, qu’elle soit temporaire ou définitive, cela n’impacte pas votre obligation de rémunérer le salarié.
Cette obligation ne s’applique toutefois pas lorsque le salarié inapte est apprenti.
Inaptitude du salarié : reprise du versement du salaire
Quelle rémunération ? La rémunération à reprendre correspond au salaire afférant à l'emploi que le salarié occupait avant la suspension de son contrat de travail et comprend l'ensemble des éléments de rémunération (y compris, le cas échéant, la prime de 13e mois). Elle ouvre droit à une indemnité de congés payés, et, le cas échéant, à la prime de vacances qui y est liée.
En revanche… Les indemnités de repas, de salissure et de remboursement de frais de transport correspondent à un remboursement de frais professionnels, engagés par le salarié pour exécuter sa prestation de travail. Elles ne constituent donc pas un élément de rémunération et n’ont pas à être prises en compte dans le calcul de la rémunération à reprendre.
Décompte du délai d’un mois. À compter de la visite de reprise, vous disposez d’un délai d’un mois pour reclasser ou licencier votre salarié inapte. À l’issue de ce délai, vous devrez reprendre le versement du salaire. Ce délai ne peut pas être interrompu, ce qui signifie que si le licenciement n’a pas été porté à la connaissance du salarié avant son expiration, le versement des salaires devra reprendre, peu importe que le salarié ait alors continué à vous adresser des arrêts de travail.
Cas particulier. Lorsqu’un avis « d’aptitude » est transformé en avis « d’inaptitude », suite à une contestation du salarié, l’employeur doit reprendre le versement des salaires dans le délai d’un mois suivant la date de la décision modificative.
Attention ! Aucune indemnité de congés payés ne peut se substituer à cette obligation de reprise des paiements. L’employeur ne peut pas non plus imposer au salarié de prendre ses congés résiduels.
Fin de l’obligation de reprise du versement des salaires. Par ailleurs, la rémunération doit lui être versée jusqu’à la présentation au salarié de la lettre de licenciement (et non pas jusqu’à la réception), peu importe que le salarié ait, avant la présentation de la lettre de licenciement, déjà retrouvé un emploi à temps complet.
Une indemnité temporaire d’inaptitude ? Lorsque le médecin du travail constate l’inaptitude d’un salarié, susceptible d'être en lien avec un accident ou une maladie d'origine professionnelle, il remet à ce dernier un formulaire de demande d’indemnité temporaire d’inaptitude (ITI). Cette indemnité peut être versée pendant un délai d’un mois, par la caisse de sécurité sociale. Elle n’est pas cumulable avec une autre rémunération. De votre côté, vous devrez informer la caisse de la date du reclassement ou du licenciement, le cas échéant, ainsi que du versement d’une rémunération.
A retenir
Lorsqu’à l’issue du délai d’un mois à compter de l'examen médical, le salarié inapte n’est ni reclassé, ni licencié, l’employeur est tenu de reprendre le paiement du salaire correspondant à l’emploi qu’il occupait avant la suspension du contrat de travail. L'employeur doit lui verser sa rémunération jusqu'au reclassement ou la rupture du contrat de travail conformément à la procédure applicable.
- Article L 1226-14 du Code du travail (indemnité compensatrice de préavis)
- Article L 1226-15 du Code du travail (indemnité de 12 mois de salaires)
- Loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail (article 28)
- Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, article 8
- Circulaire DGT 13 du 9 novembre 2012
- Décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l'organisation de la médecine du travail
- Décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la modernisation de la médecine du travail (décret d’application de la Loi travail du 8 août 2016)
- Décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017 portant diverses dispositions procédurales relatives aux juridictions du travail, article 6 (précisions sur la contestation de l’avis du médecin du travail)
- Décret n° 2017-1698 du 15 décembre 2017 portant diverses mesures relatives à la procédure suivie devant le conseil des prud’hommes
- Décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 établissant des modèles types de lettres de notification de licenciement
- Décret n° 2022-372 du 16 mars 2022 relatif à la surveillance post-exposition, aux visites de préreprise et de reprise des travailleurs ainsi qu'à la convention de rééducation professionnelle en entreprise.
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 24 octobre 2018, n° 17-18149 (pas d’indemnité conventionnelle de préavis)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 5 décembre 2018, n° 17-18170 (reprise des salaires et de l’indemnité de congés payés)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 12 décembre 2018, n° 17-20801 (ancienneté et fin du versement du salaire)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 19 juin 2019, n°18-17831 (pas de doublement de l’indemnité en cas de rechute d’une MP survenue chez un ancien employeur)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 19 juin 2019, n°18-12094 (doublement de l’indemnité et rechute d’un AT survenu chez un ancien employeur)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 4 mars 2020, n° 18-10719 (reprise du paiement des salaires et nouvel emploi du salarié)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 23 septembre 2020, n° 19-11652 (indemnités dues au salarié licencié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 05 mai 2021, n° 19-22456 (rémunération du salarié ni licencié ni reclassé et 13e mois)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 19 mai 2021, n° 19-23510 (nature indemnité compensatrice)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 10 janvier 2024, no 21-20.229 (reprise du paiement du salaire au terme du délai d'1 mois y compris en cas de refus par le salarié du poste de reclassement)